En mars, le peuple Suisse s’est prononcé sur le nouveau régime financier (accepté) et la fin de la redevance (refusé); en juin les thèmes portaient sur la monnaie pleine (refusé) et les jeux d’argent (accepté). Pour cette troisième session de l’année 2018, il est question d’alimentaire et de voies cyclables.
Focus sur les trois objets sur lesquels les Suisses devront trancher ce week-end :
Arrêté fédéral concernant les voies cyclables et les chemins et sentiers pédestres
Faisant suite à une initiative populaire (« initiative vélo ») lancée en 2015 par certains partis et associations, qui allait trop loin selon le Conseil Fédéral et le Parlement, ces derniers ont présenté un contre-projet qui charge la Confédération de soutenir et de coordonner les mesures en faveur des pistes cyclables, comme elle le fait déjà pour les sentiers pédestres.
Les initiants ont immédiatement retiré leur initiative et le peuple se prononcera donc sur ce contre-projet.
Le principe consiste à mettre sur un pied d’égalité juridique les voies cyclables avec les chemins et sentiers pédestres. Cet arrêté fédéral chargerait la Confédération de fixer les principes applicables aux réseaux de voies cyclables, et lui donnerait la possibilité de soutenir et coordonner les mesures des cantons et d’autres acteurs en la matière et fournir des informations sur les voies cyclables.
Les sondages semblent annoncer un résultat favorable, puisque le camp du oui est à 57% (hausse de 7 points par rapport au dernier sondage), contre 40% dans le camp du non, et 3% d’indécis.
Initiative populaire « Pour des denrées alimentaires saines et produites dans des conditions équitables et écologiques »
Le but de l’initiative est de développer l’offre en aliments produits dans le respect de l’environnement et des animaux, ainsi que dans des conditions de travail équitables. La Confédération devrait garantir le respect de ces conditions en ce qui concerne la production indigène. Des contrôles spécifiques devraient garantir que les aliments importés sont eux aussi produits en respectant ces conditions. L’initiative vise également à réduire l’impact du transport des denrées alimentaires sur l’environnement, à lutter contre le gaspillage alimentaire et à promouvoir les produits locaux et de saison.
La campagne des opposants (la droite) semble porter ses fruits, puisque le « oui » s’est effondré dans le sondage Tamedia (43% contre 55% précédemment), laissant le « non » largement en tête avec 56% et seulement 1% d’indécis. La tendance est la même selon l’institut gfs.bern, menée pour le compte de la SSR, même si le « oui » reste en tête (53% contre 45% pour le non, et 2% d’indécis; en sachant qu’au précédent sondage le « oui » recueillait 78% !).
Comme souvent en Suisse, les arguments sont les mêmes « cela part d’une bonne intention, mais… », « le porte-monnaie des Suisses va en souffrir », « cela entre en conflit avec les accords internationaux ». Tant pis pour les Suisses, qui continueront donc à dépenser des milliers de francs pour leurs vacances dans des hôtels 4 ou 5 étoiles à l’étranger, à s’acheter tous les ans des nouveaux Smartphones hors de prix, à rouler dans des belles voitures, tout en refusant de payer un peu plus cher leur nourriture afin qu’elle soit plus saine, éthique et moins nuisible pour la planète. Leurs enfants et les producteurs locaux apprécieront…
Initiative populaire « Pour la souveraineté alimentaire. L’agriculture nous concerne toutes et tous »
Cette initiative, lancée par un comité constitué sous l’impulsion du syndicat agricole Uniterre, estime que la politique agricole de la Confédération va dans la mauvaise direction. Elle propose des mesures destinées à promouvoir une agriculture locale, diversifiée, durable et sans organismes génétiquement modifiés (OGM). L’État devrait garantir de bonnes conditions de travail et des salaires convenables aux personnes qui travaillent dans ce secteur et devrait également protéger l’agriculture locale en prélevant des droits de douane sur certains produits, voire en interdisant certaines importations.
Les arguments des opposants sont similaires à ceux de l’initiative précédente («Pour des denrées alimentaires saines et produites dans des conditions équitables et écologiques») : risque de renchérissement des aliments, augmentation des impôts et conflit avec les accords internationaux. Et cette initiative subira sans aucun doute le même sort, avec un « oui » en chute libre dans les sondages.
L’intervention de l’État n’est pas vue d’un bon œil. Une majorité des Suisses préfère laisser le marché agir. C’est là encore dommage, car avec cette initiative, la hausse des revenus dans l’agriculture pourrait inciter plus de personnes à être active dans ce secteur (et ainsi récompenser un travail difficile), ce qui favoriserait ensuite les circuits courts.
Erwan Pennarun
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