La rentrée est arrivée et avec elle rien n’a changé – plus de 500 migrants originaires de l’Afrique de l’est principalement (Soudan, Érythrée, Éthiopie, Somalie) s’entassent toujours sous 441 tentes square Daviais, au cœur de Nantes, tandis que Johanna Rolland, maire (PS) de Nantes et Nicole Klein, préfète, se renvoient la patate chaude et les responsabilités, toutes deux incapables de trouver une solution. Pendant ce temps les migrants souffrent de la gale et de la tuberculose tandis que les Nantais se lassent de ce Camp des Saints au cœur de leur ville.
En apparence la situation paraît inextricable. La Ville s’est laissée imposer la situation par les militants immigrationnistes, comme d’ailleurs pour le squat dans le château du Tertre à l’automne 2017 et l’ancienne maison de retraite Bréa dans le quartier Graslin au printemps 2018. Ce qui transparaissait déjà à Bréa – surpopulation, rixes, nuisances pour les riverains, incapacité des associations immigrationnistes à gérer l’afflux de migrants finalement abandonné à la préfecture – n’a cessé de s’aggraver square Daviais.
Migrants : « les Nantais dans leur grande majorité s’en foutent »
les militants immigrationnistes ont mis en place des douches bricolées et distribuent 500 repas une fois par jour, ainsi que des petits-déjeuner. Cependant la situation sanitaire s’aggrave – cas de gale, de tuberculose – tandis que les bénévoles se fatiguent. Malgré l’exercice de propagande d’Ouest-France le 30 août dernier, sous la plume d’Agnès Clermont prompte à mobiliser tous les vieux poncifs « l’accueil est meilleur ici […] sur cette terre aux fortes traditions humanistes, modelée par l’héritage catholique, le soutien aux migrants fédère largement », la réalité ne suit pas.
« Nous sommes toujours les mêmes à porter la charge des exilés [migrants illégaux] depuis leur arrivée square Daviais », résume un militant. « Les Nantais, dans leur grande majorité, s’en foutent. Il n’y a qu’à les voir dans le tram lorsque celui-ci longe le camp : ils regardent au-dessus, ou tournent le dos ». D’autant que « même dans nos rangs, la solidarité fait défaut : beaucoup refusent d’ouvrir leurs portes aux exilés, au motif que c’est à l’État de les loger. C’est vrai, mais va-t-on les laisser crever lorsque l’hiver arrivera ? ».
Accueillir les seuls réfugiés politiques, mais lesquels ?
Des rixes éclatent régulièrement – le 30 août, plusieurs ont fait trois blessés, d’autres ont eu lieu depuis à cause de la promiscuité ou de divers trafics. Laurence Garnier (LR) a enfoncé le clou : « Plus on attend, et plus la crise va s’aggraver. Ce square, c’est la honte de Nantes, qui montre l’incapacité de Johanna Rolland de régler une crise qui la dépasse ». Pour cette dernière, il ne faut accueillir – où ? – que les seuls réfugiés politiques.
Alors qu’il faudrait savoir lesquels puisque l’Éthiopie et l’Érythrée ont fait la paix après plus de deux décennies de guerre, la première a même rouvert son ambassade, et les deux pays ont signé un accord de coopération avec la Somalie. Dans les tuyaux se trouvent désormais grâce à des accords et des rencontres toutes récentes le règlement du conflit frontalier entre l’Érythrée et Djibouti ainsi qu’entre l’Éthiopie et le Soudan du sud voire entre les deux Soudans.
Sous l’influence des investissements émiratis et chinois, la corne de l’Afrique est en train de devenir un espace sûr, dont les divers gouvernants ont compris que leurs peuples ont plus à gagner par la paix et la prospérité économique qu’en maintenant des conflits frontaliers ou ethniques inutiles, qui ne rapportent guère qu’aux marchands de canons européens et à la finance transnationale, toujours prête à faire baisser le soi-disant « coût du travail » en accueillant des employés issus de l’autre bout du monde prêts à travailler toujours plus, payés toujours moins – comme certains hôteliers restaurateurs aussi.
Pour la préfète Nicole Klein, il aurait fallu laisser les migrants squatter l’ex lycée Launay-Bouhier
De son point de vue, la préfète estime que la situation est « inextricable » et reproche à la Johanna Rolland l’évacuation de l’ex-lycée Launay-Bouhier squatté alors qu’il « n’y avait aucune urgence, les travaux n’avaient pas démarré ». 147 places sont déjà occupées par les migrants, qui reçoivent pour 25 à 35% d’entre eux le droit d’asile – c’est plus qu’ailleurs en France.
Or, il y avait urgence. Les travaux dans l’ancien lycée devaient commencer fin juillet pour qu’une école primaire ouvre dans les locaux de l’ex-lycée – propriété de la Ville – à la rentrée 2019. L’évacuation du squat était tout à fait urgente pour éviter de planter l’ouverture de l’école, ils étaient peu compatibles avec le maintien sur place de 400 migrants, ce que la préfète ne peut pas ne pas le savoir.
Johanna Rolland (PS) : déjà plus d’un million d’euros d’’argent public dépensés en pure perte
Interrogée le 30 août dans Ouest-France, Johanna Rolland n’a pas été avare de bonnes paroles : « Bien sûr que la situation sur le square Daviais n’est pas tenable, bien sûr qu’elle n’est pas acceptable […] On ne peut pas imaginer durablement un camp de fortune dans le cœur de la ville […] C’est clairement ma priorité de régler Daviais ».
Et de dire que la Ville de Nantes a déjà dépensé plus d’un million d’euros pour les migrants du square Daviais, et 150.000 € à la Croix-Rouge pour l’aide alimentaire cet été. Mais pas plus de solutions, à part en appeler à l’État pour créer encore des places dans des centres d’accueil de demandeurs d’asile (CADA) déjà surchargés.
Du reste la maire campe sur son point de vue : « la solution est d’abord nationale avant d’être locale ». Pendant ce temps là les migrants souffrent de la gale, de la tuberculose, de la promiscuité, de la faim… et risquent de contaminer les Nantais, et ce d’autant plus qu’un grand marché alimentaire a lieu tous les samedis (la Petite Hollande) à quelques mètres du camp.
« s’il y a tant d’exilés (sic) qui viennent à Nantes, c’est parce qu’ils savent qu’ici ils sont plus aidés qu’ailleurs ».
Les militants qui viennent en aide aux migrants le disent eux-mêmes, « s’il y a tant d’exilés (sic) qui viennent à Nantes, c’est parce qu’ils savent qu’ici ils sont plus aidés qu’ailleurs, que s’ils déconnent la justice est moins dure qu’ailleurs, qu’ils sont nourris au moins une fois par jour et qu’ils ont plus de chance, ici plutôt qu’ailleurs, d’obtenir le droit d’asile ».
Autrement dit, c’est à Nantes que l’appel d’air marche le mieux, et c’est la principale raison pour laquelle les migrants continuent d’affluer, à raison de « 15 à 50 par jour », témoigne un militant associatif. Et c’est ainsi que les 147 migrants logés par la préfecture et la Ville de Nantes suite à l’évacuation de 452 d’entre eux le 23 juillet dernier ont été incontinent remplacés par d’autres, réduisant à néant l’effort des pouvoirs publics avec l’argent du contribuable.
D’autant qu’ici les pouvoirs publics ne sont guère pressés d’expulser ceux qui ont déjà demandé l’asile dans un autre pays européen. Or les « dublinables » représentent 150 des 500 migrants du square Daviais… et c’est la responsabilité directe de la préfecture, donc de Nicole Klein…
Effectivement, la situation du square Daviais démontre les limites de l’action de la préfète Nicole Klein et de la maire Johanna Rolland (PS). La clé du problème repose dans leur capacité – guère montrée à ce jour – à comprendre les enjeux de la situation et à arrêter l’appel d’air au niveau local. Aux Nantais, il est permis de douter qu’elles y arrivent.
Louis Moulin
Crédit photo : Breizh-info.com
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