Depuis le 1er janvier 2015, dix agglomérations disposent du statut de métropole, tel qu’il a été défini dans la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite loi Maptam du 27 janvier 2014, portée par la ministre de la Décentralisation et de la fonction publique, Marylise Lebranchu.
Il s’agit de Lille (1,19 million), Bordeaux (0,73 million), Nantes ((0,58 million), Toulouse (0,71 million), Rouen (0,49 million), Grenoble (0,47 million), Strasbourg (0,47 million), Montpellier (0,42 million), Rennes (0,42 million) et Brest (0,21 million). Ces dix métropoles viennent rejoindre celle de Nice, qui fut pionnière (Le Figaro, mercredi 28 janvier 2015). Quatorze grands ensembles urbains sont donc destinés à dominer le pays : ces dix métropoles, Nice, Lyon qui dispose d’un statut particulier, Aix-Marseille et le Grand Paris.
Mais Emmanuel Macron veut aller plus loin : l’absorption par les métropoles d’une grande partie des pouvoirs des départements et ce, sur le modèle de ce qui a été réalisé dans le Rhône avec Lyon. D’où la réunion « secrète » du 2 août 2018 à l’Élysée afin de discuter des modalités d’une première expérimentation de cette mesure par cinq métropoles (Toulouse, Bordeaux, Nice, Nantes et Lille). « C’était même la troisième fois en sept mois que ces « Macron-compatibles » (Jean-Luc Moudenc, Alain Juppé, Christian Estrosi, Johanna Rolland et Damien Castelain) se trouvaient autour du chef de l’État et du ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb. » (Le Canard enchaîné, 22 août 2018).
Johanna Rolland a-t-elle informé son « ami » Philippe Grosvalet de ses nouvelles amitiés élyséennes ?
Quel jeu joue Johanna Rolland (PS), maire de Nantes et présidente de Nantes Métropole ? A-t-elle informé – sans cachotterie aucune – son « ami » Philippe Grosvalet (PS), président du conseil départemental de Loire-Atlantique, de ses nouvelles amitiés élyséennes ? Le tient-elle au courant de l’évolution des discussions ? Si la Loire-Atlantique disparaissait au profit d’une super –métropole, que deviendrait Grosvalet ? Les membres du cabinet de ce dernier sont-ils de futurs « clients » de Pôle emploi ?
Pour l’instant, les réactions des élus sont faibles. Philippe Grosvalet en parlerait avec Johanna Rolland : « C’était à l’ordre du jour ne notre dernière rencontre. Si les choses devaient évoluer, il faudrait un accord mutuel » (Presse Océan, lundi 13 août 2018). On voit mal Macron demander à Grosvalet l’autorisation de mettre en place à Nantes une super-métropole ! Les déclarations de divers élus montrent leur absence de réflexion en matière d’aménagement du territoire breton : Aymeric Seasseau (PCF), David Samzun (PS), Yannick Haury (LREM), Gatien Meunier (LR), Ronan Dantec (EELV) dans Presse Océan (samedi 3 mars 2018). Aucune vision d’ensemble, aucune volonté forte de s’opposer à un projet dont la démesure serait contraire aux intérêts des populations rurales, aucune aptitude à raisonner Bretagne.
Il n’y avait guère d’avantage de hauteur de vue dans la lettre que Jean-Luc Chenut (PS), président du conseil départemental d’Ille-et-Vilaine, Nathalie Sarrabezolles (PS), présidente du Finistère, et Philippe Grosvalet (PS), président de la Loire-Atlantique, ont expédié à Emmanuel Macron. Il est vaguement question des « inquiétudes relatives au devenir des départements, face au développement d’une vision qui se voudrait essentiellement métropolitaine, inadaptée aux attentes des citoyens et source de rupture sociale, fiscale et économique pour certains territoires. » (Ouest-France, Bretagne, mardi 140 avril 2018).
Des « inquiétudes » boutiquières
On sent plutôt des « inquiétudes » boutiquières qu’un grand souffle dans ces propos. Davantage des préoccupations localistes qu’un grand dessein en matière d’aménagement du territoire. Avec le souci de sauver ce qui constitue pour eux l’essentiel, à savoir la survie de leur petite entreprise qui, en ce moment, craint la crise. Ils soulignent donc « le rôle essentiel des départements et la place déterminante qui doit être la leur, à côté d’une métropole attractive et dynamique » ; ça ne mange pas de pain d’écrire cela et ça permet de ménager la chèvre et le chou.
En attendant, Johanna Rolland « ne veut pas réagir » car « ce n’est pas un sujet d’actualité » (Presse Océan, samedi 3 mars 2018) ; si cette précision concerne la fusion, elle pourrait tout autant se rapporter aux élections municipales de mars 2020. Il faudra bien, en effet, trouver un arrangement entre l’équipe de Mme Rolland et les marcheurs pour bâtir une liste unique. C’est leur intérêt bien compris, n’ont-ils pas les mêmes électeurs sur le plan politique et sociologique ? A l’Élysée, on doit bien trouver un petit quart d’heure pour évoquer cette convergence…
Bernard Morvan
Crédit photo : Jpjp12/Wikimedia (cc)
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