Apollon nage et chante dans la baie de Brest, mais en provoquant de sacrées frousses. Voilà huit jours, le maire de Landevennec, Roger Lars, avait pris un arrêté interdisant la baignade dans sa commune en cas de présence d’un dauphin baptisé (par qui ?) « Zafar ». Le cétacé était réputé d’autant dangereux pour les baigneuses, qu’il avait été surpris en rut anatomique confirmé. Aussitôt, l’avocat quimperois Erwann Le Cornec souhaita déposer un recours devant le tribunal administratif, plaidant l’innocuité du mammifère pour les baigneurs. Zafar est maintenant parti naviguer dans les eaux plus nordiques de Plougastel, et les baigneuses de Landevennec ne sont plus concernées.
Reste que ce cétacé est une réincarnation, celle d’Apollon Métageïtnos. Personne n’en tient compte, et c’est dommage. Les Métageïtna étaient des fêtes célébrées à Athènes durant la seconde quinzaine du mois d’août, en l’honneur d’Apollon dont la fonction particulière était alors de présider aux déménagements. Les changements de résidence à la fin d’août, voilà qui correspond très exactement à ce qui se passe en Bretagne à la même période, pour nombre de vacanciers et de fonctionnaires, enseignants ou militaires.
Apollon avait pris les apparences d’un dauphin pour parcourir les eaux de l’Attique, avant de jeter son dévolu sur le bas du Mont Parnasse. Souvenir de son équipée delphinique, il nomma « Delphes » le lieu de culte qui lui serait dédié. Toutes choses que rappelait Zafar en cette fin de mois d’août. Les dauphins modernes ont une longue mémoire, et c’est tant mieux ! D’autant mieux que nombre de celtisants voient dans leur triskel une figuration de trois dauphins, jetant ainsi un pont immémorial entre marins bretons et marins helléniques.
JF Gautier
Crédit photos : Pixabay (CC0/werdepate) – Photo d’illustration
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