Août 1968, à Prague : n’oublier jamais !

Comme le temps passe… Parmi les anniversaires de cette année 68, la mémoire a le devoir de ne pas oublier l’invasion de ma seconde patrie : la Tchécoslovaquie. Nous rentrions de Prague où les intellectuels dominants tenaient le futur comme « possible », à savoir une société plus juste dans un cadre de liberté retrouvée. J’ai partagé, une année (1967), cette utopie, cette illusion. Ce fut un temps où la comparaison avec le mystère de la Sainte Trinité apparaissait comme la plus accordée pour juger du parti communiste. Il n’y en avait pas un mais deux, réunis sous la même appellation qui n’en faisait qu’un. La partie la plus sectaire, doctrinaire et sanguinaire finit par l’emporter…

Le 21 août 1968, 450 000 soldats de l’URSS, de la Pologne, de la Hongrie – et, horresco referens, de l’embryon allemand mal dénazifié qui s’appelait alors « RDA »-, déferlèrent en Slovaquie et en Bohême. Les chars en premiers : 6300 ! rien que ça. En pointe, des Soviétiques de Sibérie, allergiques, ces bons sauvages, à toutes ces nouveautés « fascistes » rencontrées dans un pays en train de virer « à droite ». Tel était le conte qu’on leur avait servi avant qu’ils embarquent pour la reconquête. Il y eut des morts par dizaines, évidemment, car les jeunes Tchèques d’alors n’avaient  pas froid aux yeux. Un photographe les a brillamment montrés escaladant les monstres d’acier : Josef Koudelka. Retenez bien ce nom, c’est celui d’un artiste courageux.

La nuit s’étendit sur tout le royaume de Bohème et dura plus de vingt ans. Vaclav Havel n’écrivait plus et ne jouait plus de pièce. Les pompiers n’étaient plus à leur misérable fête « socialiste », comme dans le film très corrosif de Milos Forman. Il n’y avait plus de « petites marguerites », comme dans le film de Vera Chytilová. Il n’y eut plus de ces dessins à double sens de mon ami Vladia Jiranek… Tous sont morts désormais.

Comme l’écrit Stéphane Courtois sans en dire davantage : « au moment où les chars soviétiques écrasaient à Prague des velléités de démocratie, à Paris, Rome ou Berlin-Ouest des milliers d’étudiants politiquement incultes, cornaqués par des leaders léninistes – trotskistes, maoïstes, guévaristes -, chantaient L’Internationale en brandissant le poing et appelaient à une révolution communiste dont ils étaient incapables de percevoir le caractère totalitaire. »

J’irais aujourd’hui plus loin : avez-vous remarqué que ces misérables avatars de bolcheviques se sont introduits un peu partout : dans la presse, le cinéma, la politique… ? Ils pullulent et ont produit la pensée « korrecte ».

MORASSE

Photo : domaine public
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