Une partie de la gauche radicale allemande compte désormais s’opposer à l’immigration extra-européenne. Et va lancer un mouvement dans cette optique.
L’extrême gauche s’y met
Sur le plan politique, les lignes bougent assez sensiblement ces temps-ci en Allemagne. Avec pour principal détonateur la question de l’immigration extra-européenne. Tandis que le sujet a fait dévisser Angela Merkel et ses alliés dans les enquêtes d’opinion, c’est désormais à la gauche de la gauche qu’il crée des remous.
Ainsi, pour Sahra Wagenknecht, l’une des figures les plus connues de la gauche radicale, l’AfD (Alternative für Deutschland) ne doit plus avoir le monopole de l’opposition à l’arrivée massive de migrants en Allemagne. Il n’est pas inutile de rappeler que l’AfD est actuellement la première formation d’opposition à la coalition d’Angela Markel au Bundestag.
La « bonne conscience de gauche »
Sahra Wagenknecht, présidente du groupe parlementaire de la gauche radicale (Die Linke) a bien saisi le pouls de la société allemande. C’est donc dans cette optique que la femme de 49 ans, par ailleurs d’origine iranienne par son père, compte « mettre la pression » sur les autres formations politiques de gauche dans le but d’engager une « autre politique migratoire ».
À terme, l’ambition de cette partie de la gauche allemande bien décidée à changer de logiciel est de tourner la page de cette « bonne conscience de gauche sur la culture de l’accueil ». De plus, Sahra Wagenknecht n’échappe pas aux accusations de populisme de la part de sa famille politique lorsqu’elle critique aussi ces « responsables vivant loin des familles modestes qui se battent pour défendre leur part du gâteau ».
L’argument social
Pour justifier ce virage politique, Sahra Wagenknecht base son argumentation sur les craintes économiques engendrées par l’immigration extra-européenne. Et précise que s’opposer à ces flux migratoires vers l’Allemagne n’est pas antinomique avec ses convictions initiales : « Une frontière ouverte à tous, c’est naïf. Ce n’est surtout pas une politique de gauche ».
La présidente du groupe parlementaire de la gauche radicale en profite aussi pour tacler au passage le gouvernement allemand, n’ayant d’ailleurs pas grand-chose à envier sur le fond aux déclarations d’un Matteo Salvini ou d’un Viktor Orbán. Selon elle, les milliards d’euros utilisés pour accueillir les migrants en 2015 « auraient pu aider beaucoup plus de nécessiteux en Allemagne ». « Plus de migrants économiques signifie plus de concurrence pour décrocher des jobs dans le secteur des bas salaires. Le nombre de logements sociaux n’est pas non plus illimité », a également asséné Sahra Wagenknecht.
Nouveau mouvement
Des propos qui vont se concrétiser par le lancement d’un nouveau mouvement prévu le 4 septembre prochain. Pas de quoi rassurer le Parti social-démocrate (SPD), déjà à la peine dans les sondages et payant son association avec l’image d’Angela Merkel.
Dénommé « Aufstehen » (signifiant « se lever »), le mouvement va s’adresser au même public que Die Linke, ce qui risque de ne pas apaiser les clivages à la gauche du spectre politique allemand. Avec une différence clé sur ce sujet de l’immigration extra-européenne. Bien que déjà railler par des personnalités d’autres formations politiques, notamment de gauche, Aufstehen est tout de même pris avec un certain sérieux compte tenu du précédent populiste créé par l’AfD. Une affaire qui, à défaut de savoir à l’avance si elle remportera l’adhésion des électeurs traditionnels de gauche comme des autres, sera à suivre de près dans une scène politique européenne en profonde mutation.
Crédit photo : Flickr (CC BY-SA 2.0/DIE LINKE)
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