Johanna Rolland (PS), maire des Nantes, et Emmanuel Macron on déjà eu l’occasion de faire frotti-frotta. Elle accompagnait en effet le président de la République lors d’un voyage enn Russie (24 et 25 mai 2018). Raison officielle : elle intervenait dans une table ronde consacrée à la « ville durable » (sic). Lors d’un dîner, le Président a pu vérifier si Johanna Rolland était « macron-compatible ». Bien entendu, à son retour à Nantes, elle s’est empressée d’affirmer : « Nous n’avons pas parlé des municipales 2020 » (Presse Océan, mardi 28 mai 2018).
Rappelons qu’avant le second tour de l’élection présidentielle, cette dernière avait déjà fait preuve de bonne volonté : « La priorité doit être la mobilisation absolue : pas une voix ne doit manquer à Emmanuel Macron pour faire barrage au FN. La seule question qui compte c’est de le battre. » (Presse Océan, samedi 29 avril 2017). Il doit donc être possible de s’arranger avec elle. D’autant plus qu’elle a eu le temps d’examiner les résultats du premier tour de la présidentielle à Nantes. Alors qu’elle parrainait Benoît Hamon, Emmanuel Macron se plaçait facilement en tête (30,83%), tandis que le Breton de Saint Renan arrivait piteusement en quatrième position (10,98%). Un mois plus tard, les marcheurs s’emparaient des cinq circonscriptions nantaises.
La seule ambition de Johanna Rolland : conserver son siège
Voilà qui donne à réfléchir. De pareilles données ne peuvent laisser indifférente une femme qui n’a qu’une ambition : conserver son siège en 2020. Mais d’un autre côté, les marcheurs manquent d’un leader local capable de prendre la tête de la liste aux municipales puisque François de Rugy a dit et redit qu’il ne participera pas à cette compétition : « Non, je ne serai pas candidat » (Ouest-France, Nantes, vendredi 23 février 2018).
Il faut également compter avec l’effet « Macron » qui prend de plus en plus de consistance. En effet, en un mois, la cote de confiance du chef de l’État a chuté de six points, tombant à 34% (contre 40 en juin). Dans l’électorat de gauche, seuls 26% des Français (- 3 points) lui font confiance ; ils ne sont plus que 35% à droite (- 6 points). Chez les ouvriers, on tombe à 19% (- 11 points). Chez les habitants des communes rurales, il doit se contenter de 23% ( – 11 points). En clair, les Français qui ne lui font pas confiance représentent maintenant 66% des électeurs (Baromètre Elabe Les Échos, 6 – 7 juillet 2018).
C’est à partir de tous ces éléments que les marcheurs (Élysée et Matignon) et Johanna Rolland négocieront. Une bonne transaction vaut mieux qu’un combat incertain alors que les clientèles électorales de LREM et du PS appartiennent, à Nantes, aux mêmes couches sociologiques.
« Nous pourrons soutenir des gens issus de LR ou du PS » (Libération, mardi 5 juin 2018), a déjà prévenu Christophe Castaner, délégué général de LREM. Mais le gouvernement pose désormais des conditions. Pour Sébastien Lecornu, secrétaire d’État à la Transition écologique et solidaire, on demandera simplement aux élus de « s’engager à nous aider ». Avec des limites cependant : un tel engagement ne sera pas « compatible » avec l’appartenance au PS ou à LR. « Et ces élus devront soutenir la vision progressiste d’Emmanuel Macron lors des européennes de juin 2019. Mais il ne s’agit pas d’exiger un seul soutien partisan, c’est dépassé. L’un des critères pourrait être de signer la contractualisation financière avec l’État sur la limitation des dépenses des collectivités. Cela pourrait aussi passer par la signature d’une charte d’engagement et d’intégration d’un nombre de membres de LREM aux municipales. » (Libération, lundi 16 juillet 2018).
« Je suis profondément une femme de gauche. »
Cette règle du jeu va-t-elle convenir à Johanna Rolland ? Elle qui affirmait récemment : « Pour les municipales, ma question ne sera pas d’abord les accords entre les appareils politiques. Ce sera le rassemblement autour d’un projet. En cohérence avec nos convictions. Je suis profondément une femme de gauche. » (Presse Océan, samedi 9 juin 2018). Étant entendu que les ambitions de Madame Rolland ne sont pas seulement municipales : « Je pense que la réinvention de demain ce n’est pas que le PS ; c’est la gauche » (Presse Océan, samedi 6 janvier 2018).
L’heure de vérité arrivera à partir de janvier lorsque les sondages portant sur les intentions de vote indiqueront si Johanna Rolland peut faire cavalier seul avec une liste « de gauche » ou bien si l’alliance avec LREM est inévitable.
Bernard Morvan
Crédit photo : Jpjp 12 Wikipedia (cc)
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