Bertrand Deléon, pour l’association Bemdez, nous adresse une tribune libre sur la spéculation immobilière en Bretagne, que nous reprenons ci-dessous :
La Bretagne aux enchères !
L’explosion du marché de l’immobilier, due à l’achat à prix d’or de nos terres et de nos maisons par une bourgeoisie principalement francilienne, empêche définitivement aux gens d’ici l’accession à la propriété. Celle-ci est même devenue quasiment impossible pour les classes moyennes. Le taux moyen d’apport diminue et la durée des prêts s’allonge : 47,1% des acheteurs ont choisi un emprunt de 25 ans et plus. 29% ont pris un emprunt de 20 ans et 8,1% de 15 ans (source : Adil 2006). L’arrivée massive de retraités aisés en est l’une des causes.
Devrons-nous tous faire nos bagages ?
Parallèlement, la débretonnisation des emplois s’accélère, particulièrement en ce qui concerne les fonctions d’encadrement. On assiste à un parachutage de cadres dans la fonction publique, installés par relations ou complicités diverses. L’Etat français hypercentralisé place délibérément la Bretagne en périphérie européenne, perçue comme un réservoir humain aux petits soins de l’Ile-de-France. Dès lors, les jeunes entrant sur le marché du travail sont la proie de l’impitoyable loi du système économique, autant dire esclaves de la fluctuation du marché (précarité de l’emploi dans l’agro-alimentaire, la grande distribution, emplois saisonniers, etc.) ou rejoignent le cortège de milliers de jeunes qui vont grossir les rangs des millions de Bretons exilés, et de leurs descendants. En attendant cette triste alternative, il reste les stages alibis, le RMI ou le chômage.
Le paroxysme est atteint sur le littoral breton. Rien qu’aux abords du Golfe du Morbihan où se massent 150 000 habitants, presque la moitié des acquéreurs de maisons ou d’appartements ne viennent pas de Bretagne. Dans ce lieu très prisé des retraités, les acquéreurs locaux ne représentent plus que 18,8 % du marché. Cette situation rend illusoire toute installation durable de jeunes actifs.
Ce monopole de seniors venus d’ailleurs génère un favoritisme politique au détriment des retraités bretons moins bien nantis, parfois passés d’une classe moyenne à la situation de précaires. Autre conséquence, les écoles des communes proches du littoral se vident alors que le coût de développement des structures pour le troisième âge augmente.
Allons-nous accepter encore longtemps de jouer les valets de la France ?
Cette nouvelle population aisée se substituant à la population bretonne s’installe en maître jusqu’à interdire à notre culture de s’exprimer. Certains d’entre eux, pour avoir évolué dans les hautes sphères des salons de l’Etat, détiennent déjà les rênes du pouvoir avant même de débarquer sur nos terres. Ces derniers ont réussi, à coups de pétitions et autres pressions en accord avec les élus, à museler le dynamisme naturel des Vannetais : les rues de la ville de Vannes deviennent silencieuses, les bars et les lieux de vie doivent obéir aux règles des nouveaux occupants du centre-ville. Des péninsules du littoral voient leur accès privatisé et surveillé par des vigiles, devenant ainsi de véritables embryons de quartiers à l’américaine avec leur police privée. C’est le cas de plusieurs accès au littoral du golfe comme à la pointe et au port du Blaire à Baden, bientôt Conleau et la Pointe d’Arradon ?
Dans le même sens, les politiques locaux prônent le choix du tout tourisme, une économie morte qui risque de donner le coup de grâce à une activité économique diversifiée qui profitait à l’emploi et au confort de vie des résidants (dans son projet de « Menhirland » à Carnac, l’Etat a procédé à des expropriations sacrifiant par le même biais des exploitations agricoles, de l’artisanat et des petits commerces…).
La surpopulation du littoral : une bombe à retardement…
Cette mise aux enchères de la Bretagne entraîne aussi des conséquences gravissimes sur le littoral et la santé publique. En effet, la concentration des résidants s’ajoutant à un tourisme de masse amène au bétonnage du littoral (malgré la loi « littoral »), à un coût exorbitant de gestion de l’eau et d’assainissement, à une surconsommation estivale de l’eau potable (exemple du transport d’eau potable vers Belle-Ile, financé par le Conseil Général du Morbihan, autant dire par les seuls contribuables du département), à un difficile traitement des déchets (pollution des incinérateurs comme à Plouharnel), à une réfection des zones naturelles mises à mal après chaque saison touristique, à une pollution des eaux maritimes (hydrocarbures dans le Golfe, prolifération des algues vertes…), à une surconsommation d’énergie, à une pollution de l’air par les gaz d’échappement des véhicules, à une diminution notable de la biodiversité et des populations animales, etc.
A noter que ces frais sont supportés essentiellement par les contribuables bretons (Conseils généraux et régional) !
Loin d’être inquiets, les élus semblent plus prompts à se placer pour les prochaines échéances électorales françaises dans le seul but de maintenir leur petite souveraineté locale, en restant les fidèles vassaux des forces centrales au pouvoir.
Sortons au plus vite de l’impasse !
Bertrand Deléon
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