Samedi 14 juillet. Centre des Côtes d’Armor. Rural ! 23 h 00. Le feu d’artifice vient de s’achever. Bal des pompiers sur la grand place. Pas d’orchestre cette année, juste un DJ.
J’arrive devant. Et c’est parti pour la danse des canards. Rn’B, rap, zouk machine et raï machin. Des enfants bretons dansent. Derrière quelques jeunes mères de famille gigotent péniblement du croupion. Verre de bière à la main. Les enfants accrochent leurs mères du regard. Celles-ci leur répondent en agitant des mains. Signes de doigts. Genre « cités ». Et tronches bien connes. Genre « grimaces de mafiosas ». Les mâles discutent à la buvette. Survêtements. Tatouages. Le nom de leurs gosses en chinetoque ou en kalmouko-tibétains sur les avants-bras. Mouftards dont ils ne s’occupent surtout pas. Et surtout pas ce soir.
Derrière, sous le chapiteau, des Noirs. Regroupés. Entreprennent des filles beaucoup plus jeunes qu’eux. Maillots du PSG. Lunettes noires. Rires. Forts ! Jacassants. Dansant. Admiration autour. Et ils partent régulièrement, conquête sous le bras, dans une rue adjacente. Sur la place on passe Maître Gim’s. « Sapés comme jamais ». Ça connait les paroles de partout. Tout le monde il est congolais ce soir. « Loulou et boutin ». Même Valérie Le Sayec la secrétaire de mairie connaît tout le déroulé. Et par coeur. Et très fière de le montrer. À toute la commune !
Après le Congo c’est l’Algérie. Un peu de raï variétoche. « On va danser, oui c’est la vie laï laï laï laï la ». Ça lève des bras autour de la buvette. « Oui c’est la vie, laï laï etc… » Là tout le monde chante Maghreb. C’est dingue ce génie des langues à Treglagla ce soir ! Après c’est les « Magiciens » et faut aussi mettre les mains en l’air. Même les pompiers s’y collent ! Sous le chapiteau, les noirs emballent à bloc. Ça n’arrête pas les allers-retours ! Toutes les jeunettes du quartier vont connaître de l’exotique cette nuit !
Pendant une demi-heure, DJ Jean-Claude va mettre quelques tubes des années 80. Les plus de 45 ans se mettent un peu à danser. Electro-préhistorique, Indochine, Téléphone. Les démons de minuit de la nuit. On est quelques vieux à se trémousser en faisant semblant de jouer de la guitare. Les jeunes nous regardent. L’air désolé. Les filles vont rejoindre leurs Noirs qui ont remis du rap 9-3 sur leurs portables. Fort. Juste histoire de bien emmerder le monde. Ça résonne comme 10 000 tam-tams sous le chapiteau.
Sur la place, Jean-Claude a mis le « loup, le renard et la belette ». Des jeunes mâles blancs à la peau grasse se mettent à danser genre « boîte »… mais petits doigts dessus, petits doigts dessous… et puis l’air bien abruti. Leurs femelles les regardent. Bière dans une pogne. Leurs gamins affreux sont, eux, partis depuis longtemps sous le chapiteau danser sur Sniper et Tunisiano.
Ah et puis vers une heure… L’un des noirs prend sa voiture. Belle bagnole. Pas donnée ! Une jeune blondette à côté de lui. Fait trois fois le tour de la place en faisant bien rugir le moteur d’impatience quand des passants attardés traversent la route. Personne ne lui dit rien. Surtout pas ! Racisme ! « Ah non pas moi ! ».
Après son cirque il se gare en triple file, le sacré zoulou. La fille descend. Une autre monte… 17-18 ans… la gamine de l’ancien boucher. Il est à Carrefour market maintenant. Mais pas ce soir parce que là, présentement, il est surtout bien cuit à la buvette.
Sur la place, je finis mon solo de guitare sur « Anti Social »… Indifférence générale… les jeunes attendent le retour du Rn’B en regardant leur portable…
Oncle Hô
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