À Nantes, tout le monde connaît Jean Blaise. Parachuté à Nantes en 1982 par Jack Lang, il incarne la culture à la sauce Ayrault : Les Allumées, Le lieu unique, Estuaire, Le Voyage à Nantes, Royal de luxe, les Machines… Aujourd’hui il lance « La Traversée moderne d’un vieux pays », « produit » qui s’appuie sur l’image de la Bretagne.
Il faut croire que la disparition de Jean-Marc Ayrault – son ancien patron – de la scène politique locale l’a libéré : il découvre la réalité bretonne. C’est ce qui ressort d’un entretien accordé au magazine Bretons (Juillet 2018). Partant d’une constatation simple, à savoir que Nantes n’existe plus au-delà de l’Europe limitrophe, « au grand international, en Chine ou en Amérique du Nord, on existe plus », il propose d’accrocher la cité des ducs à la Bretagne, « cette partie de la France bien dessinée, qui se voit sur une carte. C’est ce qui est le plus proche de nous, géographiquement et culturellement ». Car il s’agit de dynamiser la fréquentation touristique à Nantes : « On vise la clientèle internationale, notamment les Chinois ». L’objectif étant de « faire atterrir les visiteurs à Nantes, qu’ils y restent deux jours ».
Jean Blaise a donc découvert l’atout « Bretagne » dans le domaine du tourisme : « Parce qu’elle a une identité. Quelle est l’identité des Pays de la Loire ? On est dans une région sinistrée d’un point de vue culturel : Qu’est ce qu’on dit en Pays de la Loire ? Rien. » Après quoi M. Blaise aggrave son cas – aux yeux de Ayrault et consorts – avec cette déclaration solennelle : « Oui, Nantes, c’est la Bretagne ». Selon lui, la ville aurait intérêt à jouer la carte bretonne : « C’est clair. Ça viendra, c’est évident. Qu’est-ce qui freine aujourd’hui ? Je pense que des initiatives comme celle-là [traversée moderne d’un vieux pays] font avancer l’idée de ce territoire ».
Le « cultureux » Blaise ose même s’aventurer sur le terrain politique : « Ce qui serait raisonnable, ce serait le rattachement de la Loire-Atlantique à la Bretagne. Évidemment. D’une façon totalement détachée des tendances politiques ou d’une idéologie. C’est une évidence, tout simplement. »
À coup sûr, de pareilles déclarations vont défriser les élites politico-économiques nantaises – les même qui œuvraient en faveur de la construction d’un aéroport à Notre-Dame-des-Landes. Mais cela n’a pas l’air de gêner Jean Blaise. Qu’une grande figure locale qui dépendait hier du « système Ayrault » ose franchir le Rubicon montre que le corset imposé par l’ancien « boss » est en train de sauter. Autre observation : on voit mal comment Jean Blaise, salarié dans les faits de Johanna Rolland, puisse se permettre de pareils écarts sans le feu vert – implicite ou explicite ? – du maire de Nantes. À suivre.
Bernard Morvan
Crédit photo : Jean-Pierre Dalbera/wikimedia (cc)
[cc] Breizh-info.com, 2018, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine