À Nantes, le conseil métropolitain du 22 juin entendra les rapports sur les délégations de service public (DSP). Parmi celles-ci, la « délégation de service public pour la gestion et la mise en œuvre de la politique touristique » rendra compte du travail du Voyage à Nantes en 2017.
La mission de cette société publique locale (SPL) créée en janvier 2011 est de vendre Nantes en tant que destination touristique. Experte en marketing et en communication, elle veille à présenter ses résultats au mieux (voire à les enjoliver quelquefois). Son rapport s’ouvre sur l’indicateur qui lui est le plus favorable : l’évolution des hébergements marchands (hôtels, campings, chambres d’hôtes, etc.) sur le territoire de Nantes Métropole de 2010 à 2017. Elle est de +7,3% par an en moyenne et de +7,8% en 2017. Ses activités de billetterie sont aussi en nette hausse.
Très favorable, ce résultat n’est cependant pas exceptionnel. L’année 2017 a été globalement excellente pour le tourisme en France, avec un retour en nombre des touristes étrangers. La fréquentation des hébergements marchands a progressé de 5,6% par rapport à 2016 au niveau national, de 6,8 % en Loire-Atlantique et de 8,6% sur le littoral breton.
Des circonstances propices en 2017
De plus, Nantes a bénéficié en 2017 de la réouverture de son musée d’arts, l’un des plus importants de France, après plusieurs années de travaux et plus de 88 millions d’euros de dépenses. Cet événement exceptionnel a drainé au deuxième semestre une clientèle d’amateurs d’art.
Un autre facteur favorable n’est pas évoqué par le rapport de la DSP : l’essor de l’aéroport de Nantes Atlantique. Autrefois géré par la Chambre de commerce et d’industrie de Nantes-Saint-Nazaire, celui-ci a été confié en 2010 au groupe privé Vinci, qui a beaucoup dynamisé sa gestion. Il a en particulier attiré de nombreuses compagnies aériennes low-cost. S’il n’est que le 7e aéroport de province, Nantes Atlantique a accueilli 15% de passagers supplémentaires en 2017. Sa progression est donc presque double de celle du tourisme nantais et y contribue.
L’activité aéroportuaire exerce un effet mécanique sur l’activité hôtelière puisque les voyageurs qui doivent prendre un vol tôt le matin choisissent souvent de passer la nuit précédente à l’hôtel s’ils ne résident pas à proximité. Les annulations de vols profitent aussi à l’hôtellerie : en cas de report d’un vol au lendemain, la compagnie aérienne doit prendre en charge l’hébergement des passagers. Or les annulations ont été nombreuses en 2017 : jusqu’à 38 en une seule journée de grève en octobre.
Le Voyage à Nantes : pas vraiment à la hauteur
Nantes Métropole consent un gros effort en faveur de sa politique touristique. Le dossier de presse diffusé lors de la création de la SPL Le Voyage à Nantes en janvier 2011 commençait ainsi :
Le Voyage à Nantes est une structure née de la volonté politique de Nantes Métropole et de la Ville de franchir une nouvelle étape pour s’imposer dans le concert des villes européennes et mondiales, notamment en terme touristique.
De gros moyens ont été dès lors été mis au service de cette ambition. Le Voyage à Nantes a bénéficié chaque année de subventions publiques très importantes : plus de 17,3 millions d’euros en 2017, indépendamment des investissements effectués par la métropole au profit du musée d’arts ou des Machines de l’île.
Pour quel résultat ? Sixième agglomération urbaine de France hors Paris, Nantes Métropole n’est que septième en 2017 pour le nombre total de nuitées hôtelières et ne figure même pas parmi les dix premières pour les nuitées étrangères. Si le château des ducs de Bretagne est le 14e site touristique le plus visité de France d’après Atout France, Les Machines de l’île n’arrivent qu’au 38e rang. Jean-Marc Ayrault, alors maire de Nantes, espérait pourtant en faire une attraction mondiale de premier plan lors de leur ouverture il y a onze ans.
« L’essentiel des moyens marketing porte sur Internet » rapporte la DSP Tourisme, qui fait état de progrès considérables de son trafic en ligne par rapport à 2016. Ses résultats paraissent pourtant peu probants si on les compare à ceux de l’autre métropole de la façade atlantique, Bordeaux. Alors que le site web du Voyage à Nantes revendique à cette date 74 986 « J’aime », celui d’Un air de Bordeaux en compte 110 960. Globalement, le site Nantes Tourisme.com est classé par Alexa au 63 986e rang en France et au 523 126e rang dans le monde, alors que Bordeaux Tourisme est classé respectivement 10 042e et 266 169e.
Entre les lignes, le rapport de la DSP Tourisme admet que tout ne va pas si bien. « L’accueil principal de Nantes Tourisme (rue des États) a accueilli 336 408 visiteurs en 2017, soit +13% » note-t-il par exemple. Mais il ne mentionne même pas les deux autres bureaux d’accueil, l’un à Vertou, l’autre sur le site des Machines de l’île, au résultat sans doute moins flatteur. Autres indices de difficulté, la SPL Le Voyage à Nantes, qui a terminé l’exercice 2017 avec près de 200 000 euros de déficit, compte renoncer à son activité de centrale d’hébergement et envisage de louer son siège de la rue Crucy pour des réceptions privées. Bien entendu, le rapport ne dit pas un mot des « nombreuses défaillances » reprochées à la SPL par un rapport de la chambre régionale des comptes publié en décembre dernier.
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