Comme c’était prévisible, supprimer les devoirs sur table pour les filières les plus mobiliées (IGARUN, Histoire et Histoire de l’Art, sociologie, sciences de l’Education) n’a pas permis de couper l’herbe sous le pied des bloqueurs – pourtant très minoritaires – déterminés à perturber le cours des partiels. Ce vendredi matin, ils ont perturbé les partiels au SUAPS et empêché ceux de la Beaujoire, poussant leur avantage. Les partiels en Lettres, langues et sciences humaines prévus la semaine prochaine et ce jour ont ainsi été annulés.
Au SUAPS les partiels ont pu commencer normalement, mais des étudiants ont fait une « opération sous-marin » en rentrant comme s’ils venaient passer leurs partiels puis en déclenchant un gros tapage. Nous étions en revanche sur place à la Beaujoire où la quarantaine d’étudiants – sur 100 attendus – n’a même pas pu rentrer passer des épreuves de langues – alors que 60, puis 90 bloqueurs, dont très peu d’étudiants, avaient pris position dès 6h40 du matin près de l’entrée.
Des zadistes et des syndicalistes parmi les bloqueurs
Avec les bloqueurs se trouvaient des syndicalistes CGT et FSU – dont un professeur d’histoire mobilisé contre la loi ORE depuis le début. Le noyau dur, toujours le même, d’une quinzaine de personnes, était déjà en place depuis 6h40. Il a été rejoint par la legal team (équipe légale) de la ZAD et de l’extrême gauche locale, bien loin de la bataille quasiment perdue des zadistes « irréductibles » face à la volonté politique du gouvernement, l’exaspération des riverains et des gendarmes qui ne se dégonflent pas.
Des forces de police importantes étaient pourtant prépositionnées – des gendarmes mobiles derrière le parc des expositions et une demie-compagnie de CRS à la Beaujoire, avec une commissaire de police sur le site.
Celle-ci ordonne aux deux seuls policiers en faction devant l’entrée de « laisser se regrouper » les bloqueurs, « j’attendrais pour intervenir d’être requise par l’Université. Restez dans votre véhicule et pas devant l’entrée » ; il se trouve en effet que la police ne peut pas intervenir sans l’aval de l’Université. Sur le site, il y avait justement Mohammed Bernoussi, premier vice-président du CA de l’Université. Il n’était pas spécialement rassuré par la « violence » des opposants, d’autant, remarquait-il très embarrassé qu’il y a « là en plus la CGT avec eux », enfin une huitaine de syndicalistes en chasubles.
Toute à sa course à l’échalote derrière l’extrême-gauche, la CGT profite en effet en divers endroits du territoire (notamment à Marseille et Nantes) de l’appui des bloqueurs étudiants qui viennent occuper les voies, voire saccager les installations SNCF alors que les cheminots n’en ont pas le droit, tandis que des syndicalistes s’affichent avec leurs chasubles dans les blocus étudiants ou même sur la ZAD, au nom de la « convergence des luttes ».
Les épreuves annulées le matin puis la semaine prochaine
Bien que Mohammed Bernoussi espérait « essayer de faire rentrer les étudiants », leur entrée est perturbée à deux reprises par les bloqueurs, qui crient « Laboux démission » et « tout le monde déteste la présidence ». Les bloqueurs apprennent en même temps le chahut sur le site SUAPS – où l’Université a pris les cartes de tous les étudiants et gardé celles des gens qui ont mis le chahut. Finalement, à 8h50, les épreuves du matin – qui n’avaient pas commencé – ont été annulées.
Les bloqueurs sont partis sur le site des SUAPS – sept personnels de l’Université ont été bousculés sur les divers sites d’examens touchés par les blocages ce matin. Une situation qui a conduit l’Université de Nantes à arrêter les frais et à annuler les épreuves sur table : « Afin de garantir la sécurité des étudiants et des personnels, les examens sur table prévus pour les composantes Histoire, Histoire de l’Art et Archéologie, Sociologie, FLCE, IGARUN, Lettres et langages et Psychologie sont annulés pour l?ensemble de la session ».
« Passer des examens distanciels n’a pas de sens »
Du côté des étudiants – ceux qui sont venus passer leurs examens et non bloquer – le mécontentement et la déception dominent. « Passer des examens distanciels n’a aucun sens », témoigne un étudiant en langues. « Pour les examens, les faire en ligne ou à la maison, ça veut dire que tout le monde va tricher – les professeurs l’admettent et disent que c’est normal qu’on aie les cours par rapport au semestre de merde qu’on a eu. On va juste perdre du temps bêtement à recopier, autant qu’ils nous donnent le semestre blanc ».
En même temps, « avoir des devoirs sur table n’est pas juste par rapport aux élèves qui se sont présentés et n’ont pas pu les avoir », constate cet autre étudiant. « Autrement dit notre diplôme il vaudra quelque chose, le leur moins, sans que nous ayons tous été testés dans les mêmes conditions. L’esprit même de l’examen s’y perd ».
« Les types de l’Université manquent de courage »
Du côté des policiers et des agents de sécurité, on ne fait aucun commentaire officiel. « Tout de même », relève une source proche du dossier, « les types de l’Université, s’ils avaient voulu faire passer les examens à leurs étudiants, auraient pu mieux s’organiser. D’abord, avec tous les accès du parc des Expos, il n’est pas sorcier de faire rentrer les étudiants discrètement. Ensuite, même si ça peut se comprendre qu’ils ne veulent pas envenimer le truc dès qu’il y a des profs et des syndicalistes pour couvrir les bloqueurs, ils manquent de courage : ce n’est pas parce que ça s’oppose qu’il faut tout arrêter, sinon on ne fait plus rien ».
Les étudiants qui ont travaillé malgré l’absence de cours et qui venaient passer leurs examens pour sauver leur année en ont fait l’amère expérience.
Louis Moulin
Crédit photo :Breizh-info.com
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