« Ça fait de la couleur dans la commune ». Ces propos ne sont pas ceux d’un enfant de deux ans, mais du maire du Cloître-Saint-Thégonnec, Véronique Pereira (divers gauche) à propos de l’ouverture d’une « école alternative » pour migrants.
Portée par l’association pro immigration « les utopistes en action », une petite école pour adultes a en effet ouvert à la mi-mai, au Cloître-Saint-Thégonnec (29), dans les monts d’Arrée. Destinée uniquement aux migrants, donc véritable discrimination, elle accueillera un maximum de dix élèves encadrés par des enseignants bénévoles. Dans ses statuts, l’association a pour objet : « apporter l’aide d’urgence, dans l’esprit de la Déclaration universelle des droits de l’homme : matérielle, alimentaire, vestimentaire, l’hébergement, l’accompagnement sanitaire, moral, social et éducatif ; pratiquer la solidarité sous toutes ses formes pour soutenir les personnes et leurs familles victimes de l’arbitraire, de l’injustice sociale, des catastrophes naturelles, des changements climatiques, de l’exil, de la misère, de la famine, de l’exclusion et des conflits, quelles que soient leurs origines, leur statut ».
Derrière ces beaux principes, qui fait la sélection – pourtant refusée par les pédagogues de l’Education nationale – entre les candidatures et comment?
L’école pour migrants a pris ses quartiers à la maison des associations du Cloître-Saint-Thegonnec, mise à disposition gratuitement par la mairie, salle respectant normalement le règlement qui régit les ERP (établissements recevants du public) pour la sécurité et accessibilité des locaux.
Un reportage de Tébéo montre les dessous de ce « centre de formation »
On y voit des professeurs retraités, des bénévoles, encadrer non pas les réfugiés syriens que de nombreuses communes bretonnes avaient promis fût un temps, mais des migrants d’Afrique noire, de Guinée Conakry, un pays qui n’est nullement en guerre près de 20 ans. Lorsque les « élèves » s’expriment, eux qui pour l’occasion ne sont plus des « mineurs isolés » (l’association aurait alors dû se plier à des contraintes administratives plus longues et plus lourdes comme pour toute école hors contrat), mais des adultes entre 19 et 36 ans, ils expliquent vouloir se former et travailler, et donc rester ici, en Bretagne.
Et ils sont soutenus dans leurs démarches par ces bénévoles : Catherine Le Gouic, enseignante, explique non sans une petite pique adressée à tous les élèves à qui elle fût, durant sa carrière, chargée d’enseigner : « On aimerait avoir des élèves comme ça chez nous ». Les autochtones seraient des paresseux, les migrants des génies désireux de tout apprendre ? L’ethnomasochisme à son paroxysme.
Impossible toutefois d’en débattre, puisque les mots de conclusion de Madame Pereira sonnent presque comme un sermon religieux : « Ça fait de la couleur dans la commune et ça fait du bien. Ça fait une ouverture pour tout le monde et je suis sûre que ça va bien se passer, qu’ils vont être bien accueillis ».
Et qu’importe si en Bretagne, et notamment dans les régions rurales, de nombreux jeunes autochtones aimeraient sans doute, eux aussi, bénéficier de toute l’attention de professeurs à la retraite et des pouvoirs publics.
2895 jeunes en difficulté de lecture en Bretagne
Pour rappel, 7 % de la population adulte âgée de 18 à 65 ans ayant été scolarisée en France est en situation d’illettrisme, soit 2 500 000 personnes en métropole.
Sur ces 2 500 000 personnes en situation d’illettrisme :
- La moitié a plus de 45 ans. Attention aux idées reçues qui limitent ce phénomène aux classes d’âge les plus jeunes alors que les difficultés augmentent avec l’âge.
- Plus de la moitié exerce une activité professionnelle. La lutte contre l’illettrisme touche donc de très près le monde du travail, de l’entreprise.
- 71 % d’entre elles parlaient uniquement le français à la maison à l’âge de 5 ans.
Aucune enquête nationale IVQ portant sur la thématique de l’illettrisme n’a été menée pour la région Bretagne. Les seules données chiffrées disponibles pour la région sont celles issues des résultats des tests organisés lors des Journées Défense et Citoyenneté (JDC). Ces chiffres, s’ils permettent de donner une première tendance, ne prennent pas en compte la totalité de la population bretonne en situation d’illettrisme.
Pour la Bretagne administrative, en 2014, 2,9 % des jeunes reçus à la JDC pouvaient être assimilés comme étant en situation d’illettrisme (profils 1 et 2) soit 1 165 jeunes. La proportion de jeunes en difficulté sévère de lecture se répartissait en 2014 de la façon suivante entre les quatre départements bretons :
– Côtes-d’Armor, 3,3 %.
– Finistère, 2,4 %.
– Ille-et-Vilaine, 3,0 %.
– Morbihan, 2,9 %.
Par ailleurs, bien que ces données dépassent le cadre strict de l’illettrisme, il apparaît intéressant de citer la proportion et le nombre de jeunes en difficulté de lecture. À ce titre, la Bretagne comptait en 2014 2 895 jeunes (7,09 %) en difficulté de lecture, c’est-à-dire présentant un déficit de décodage et d’automaticité de lecture, des difficultés de compréhension et d’expression orale (par manque de vocabulaire) et de réelles lacunes à traiter des problèmes de compréhension complexe.
La lutte contre l’illettrisme des autochtones, l’utopie en action ?
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