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Notre-Dame-des-Landes. Dialogue impossible avec les zadistes ?

Une rencontre entre la délégation commune de la ZAD et la préfète Nicole Klein a eu lieu ce mercredi 18 dans l’après-midi. Elle était présidée par Nicolas Hulot. Si le dialogue a été renoué – une constante des appels de l’ACIPA et de Copain 44 (très proche de la Confédération Paysanne) de ces derniers jours avec pas moins de 3 communiqués entre les 15 et 17 avril, aucune avancée sérieuse n’a été faite.

En effet, la préfète et Nicolas Hulot se sont heurtés à un mur : les zadistes refusent mordicus de donner leurs identités et remplir le formulaire déclaratif à expédier en recommandé à la DDTM d’ici le 23 avril. La préfète Nicole Klein résume : « il y a un refus absolu d’entrer dans ce qui est normal pour tout autre agriculteur en France, c’est incompréhensible et inacceptable pour tous les autres ». D’autant qu’au Larzac les agriculteurs avaient déposé, eux, des projets nominatifs – pour faire ensuite du collectif. Quant à Nicolas Hulot, il a déploré un « gâchis » et martelé qu’il n’y avait pour les zadistes « pas d’autre issue que de saisir la main tendue du gouvernement ».

Des compromis avec l’état de droit pour intégrer les zadistes modérés ?

Cependant une nouvelle rencontre, « ultime » aura lieu ce vendredi. Les zadistes les plus insérés – une trentaine – qui portaient déjà des projets agricoles ou associatifs (boulangerie, brasserie de bière, herboristerie, épicerie), semblent partis pour remplir des formulaires, en trouvant des prête-noms pour couvrir tout le territoire de la ZAD et héberger ceux qui veulent rester.

Une solution politique qui ne ferait cependant que décaler dans le temps le problème de ceux qui restent et refusent toute légalisation même minime. Pour éviter à la préfète et au gouvernement de se faire infliger un camouflet par les zadistes, y aura-t-il à nouveau des compromis avec la loi ?

« [On] ne négociera jamais avec l’État.  Soit ils se cassent, soit on les casse »

Cependant la position des zadistes irréductibles n’est pas si « incompréhensible » que ça, n’en déplaise à la préfète. Il y a déjà une lutte de fond entre citoyennistes (ou appellistes) – qui s’appuient sur un rapport de force citoyen (dans ce cas avec l’ACIPA, la France Insoumise, la Confédération Paysanne…) pour changer partiellement le système et les irréductibles, proches des anarchistes-autonomes pour lesquels la ZAD  doit rester une ligne de front. « La lutte était contre l’aéroport et son monde, l’aéroport c’est fini, pas son monde, la lutte continue », précise l’un d’eux, qui « ne négociera jamais avec l’État. Soit ils se cassent, soit on les casse ».

Dans ce paysage idéologique profondément clivé s’ajoute un autre facteur : l’évolution du rapport de force entre citoyennistes et irréductibles. Les premiers, locaux ou plus intégrés, étaient majoritaires sur la zone avant le début de l’opération des forces de l’ordre. Les seconds le sont devenus – les deux premiers jours (9 et 10 avril) le dispositif des gendarmes ne tenait que les carrefours principaux (Boissière, Bois Rignoux, Ardilières, la Saulce) ce qui a permis l’arrivée de 600 militants d’ultra-gauche passés par les nombreuses petites routes d’accès.

Majoritaires, les irréductibles s’appuient sur des lieux tenus par les « modérés » comme les Fosses Noires (boulangerie, cantine) ou le Liminbout (cantine, poste de secours). La destruction de la ferme des 100 noms n’a pas arrangé les choses, en douchant les ardeurs des modérés pour une hypothétique légalisation – même si le battage médiatique n’a pas permis que riverains et paysans s’unissent autour des zadistes. L’ACIPA n’a d’ailleurs pas appelé à rejoindre la manifestation de Nantes du 14 avril – marquée par trois heures d’affrontements entre 800 casseurs et les CRS depuis Duchesse Anne jusque Gare Maritime, en passant par Bouffay et Commerce.

« On n’ira pas à Nantes soutenir ces connards qui nous ont décrédibilisés »

« On n’ira pas à Nantes soutenir ces connards qui nous ont décrédibilisés », nous expliquait peu avant un membre de l’ACIPA. « Pas de soutien pour eux, ce n’est plus du tout comme en 2012, ce n’est plus la même logique. Nous on essaie de sauver ce qui peut l’être, et eux nous cassent les couilles. Si la ZAD s’enferme dans le collectif et la volonté de faire la guerre, ils n’auront pas de soutien ». Plus dur, il assène « ces connards veulent récupérer la lutte en prônant la réoccupation, le fait de vivre sans payer d’impôts etc. En 2012, on s’est déjà fait avoir une fois. Mais à l’époque il y avait la lutte, ça a fait passer la couleuvre. Depuis on a gagné, on en a assez ». Et il adresse un message aux soutiens de la ZAD : « qu’ils accueillent les zadistes dans leur jardin ! ».

Ce n’est effectivement pas la même logique : les modérés se sont fait promettre des représailles par les irréductibles s’ils signaient le formulaire. « Ceux qui signent seront considérés et traités comme des traîtres », prévient un de ces irréductibles. Ce qui signifie, au vu des pratiques sur la ZAD – le 20 mars dernier par exemple – battu comme plâtre par un commando cagoulé et armé de battes, ligoté tout nu et abandonné à une vingtaine de kilomètres de la ZAD.

Des expéditions similaires ont eu lieu régulièrement depuis 2013, et souvent, ce sont les irréductibles ou leurs proches qui en ont été les victimes – ainsi le 20 mars dernier, le zadiste tabassé à la Gaieté et abandonné devant le CHS de Blain était un des deux irréductibles qui a entraîné dix autres à détruire dans la nuit du 14 au 15 mars le goudron posé la veille sur la RD281 par le Conseil Général, suspendant les travaux de réfection de la route. Selon nos informations, l’autre meneur des dégradations s’est fait casser la gueule sur la ZAD quelques jours après.

Rancœurs anciennes et divisions idéologiques, accentuée par une véritable course à l’échalote vers la radicalité plombent le dialogue sur la ZAD. Tandis que le délai d’évacuation des irréductibles se rapproche – le 23avril, c’est lundi – pour les riverains comme pour les paysans alentour, il n’y a plus qu’une solution pour rétablir la paix : « virer tous les irréductibles, faire le vide sur la ZAD, les enfermer, et ne traiter qu’avec ceux des zadistes vraiment engagés dans une démarche légale. Ils sont à peine une trentaine », confie un paysan installé à quelques kilomètres de la ZAD.

Louis Moulin

Photo : Breizh-info.com
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