Le collectif Copain44, proche de la Confédération paysanne, a beau appeler à « converger » vers la ZAD ce mercredi et ce jeudi, la plupart des paysans suivent la ligne de l’ACIPA qui pour l’heure ne se mêle pas de l’expulsion des zadistes irréductibles. Pendant ce temps, les gendarmes avancent et ont détruit ce mercredi soir 29 des 40 squats, cabanes et autres habitats précaires qu’ils visaient.
Les zadistes promettaient des conséquences cataclysmiques si la ZAD était investie. En réalité, sans la force de frappe paysanne, ce n’est pas grand-chose : quelques mairies ont été occupées : Forcalquier (04) depuis lundi, Die (26) mardi par 70 militants d’extrême-gauche dont 20 retranchés à l’intérieur, Châteaubriant (44) où 70 personnes ont envahi mardi soir aussi le conseil municipal, sans oublier le viaduc de Millau lundi après-midi (12) et une manifestation sauvage entre Tolbiac et Masséna où 200 militants d’extrême-gauche ont cassé des vitrines aux alentours de Tolbiac. L’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) a aussi été occupée dans la journée de mardi à Paris – l’occasion pour bien des français de découvrir que cette école existe.
A Nantes, si la première manifestation de soutien, lundi à 18h, a rassemblé 1800 personnes qui ont été sévèrement douchées par une averse avant d’être dispersées aux abords du marché de Talensac, la manifestation de mardi n’a regroupé que 180 personnes au mieux et celle de mercredi à peine 100. Les deux n’ont d’ailleurs pas quitté la place devant la Préfecture – une AG se tenait en effet à B17 (cour derrière le 17 rue Bellamy, au-dessus d’un garage solidaire) à 20h30.
Peu avant 19h mardi des manifestants se sont signalés en allumant une poubelle sous les escaliers de la rue Moquechien, en bas de Talensac. « Ils étaient quatre à y aller, cinq à revenir en rigolant », explique un témoin. « Jeunes, habillés en sarouels, l’un d’eux avait des dreadlocks, de type européen. Ils ont allumé la benne et l’ont poussée vers les voitures garées » sur le coté droit de la rue. Hélas pour les manifestants qui espéraient un feu de joie, des riverains ont appelé les pompiers et un autre est intervenu avant que le feu ne soit trop violent – il a écarté la benne des voitures et l’a renversée, jetant les ordures au loin. Des gestes simples qui permettent d’éviter que la bêtise des uns ne fasse le malheur des autres.
Mercredi, démoralisés par leur faible nombre – à peine 50 en fin de manifestation – les « soutiens » à la ZAD ont évité de charrier les policiers de la BAC au mégaphone (ceux-ci étaient d’ailleurs absents) comme la veille et de s’attaquer au mobilier urbain. Il a fallu cependant aux CRS un peu d’insistance pour les repousser du carrefour et rouvrir la circulation. Quoi qu’il en soit, le « mouvement de masse » de soutien à la ZAD se fait attendre, même si le même jour une quinzaine de tracteurs de COPAIN35, un collectif, comme COPAIN44, très proche de la Confédération Paysanne, ont fait un barrage filtrant au sud de Rennes, occasionnant des kilomètres de ralentissement sur la route de Nantes.
ZAD : manifestation samedi à Nantes, réoccupation et reconstruction dimanche ?
Si les soutiens locaux à la ZAD annoncent une manifestation chaque jour devant la préfecture à 18 heures, une AG à B17 et un « point d’information » animé par des zadistes – difficile de s’y tromper, l’habit ne fait peut-être pas le moine mais le sarouel et le foulard boueux, si – deux rendez-vous cruciaux sont annoncés en appui à la ZAD.
Samedi, le conseil municipal de Notre-Dame-des-Landes doit aborder le point important de l’abrogation de l’arrêté pris en 2012 pour interdire les démolitions sans permis sur le territoire de la commune. Même si le dispositif des gendarmes mobiles s’est passé de l’avis de la mairie de Notre-Dame-des-Landes (et des autres) pour détruire depuis lundi nombre de cabanes, gourbis, caravanes et autres miradors érigés sans permis, la commune a son mot à dire, d’autant que l’abrogation est dans les tuyaux. Les zadistes ont d’ores et déjà appelé à perturber ledit conseil municipal, au motif qu’il est ouvert au public.
Samedi toujours, à 16h30 place du Cirque, une manifestation commune de l’extrême-gauche et des zadistes doit avoir lieu à Nantes, menée par « une entité collective issue de la rencontre entre le mouvement contre l’aéroport et diverses composantes interprofessionnelles a vu le jour dans le sillage de la lutte contre la Loi Travail. Le CAN, Comité d’Action Nantais, a pour vocation à ouvrir un front commun seul à même de répondre à la vague d’attaques actuelle ». L’association de commerçants Plein Centre a déjà prévenu ses adhérents du risque probable de dégradations en marge de cette manifestation qui pourrait attirer casseurs et black block soucieux de se venger du succès de la gendarmerie dans le démantèlement des « irréductibles » de la ZAD.
Dimanche enfin, une manifestation de réoccupation de la ZAD doit avoir lieu à 15 heures. « Nous allons reconstruire ce que les gendarmes et autres chiens de garde du système ont cassé cette semaine », nous explique un militant, Camille, qui a déjà commencé avec des amis « à rassembler contreplaqués, vis, boulons, bois etc. Il n’y aura plus qu’à les emmener sur la ZAD et si les riverains ou les gendarmes ne sont pas contents, on les poussera un peu ». Riverains qui ne sont pas vraiment réjouis par la perspective : « s’ils reviennent et reconstruisent, on va repartir pour un tour avec une nouvelle semaine de dispositif policier pour tout détruire », relève Antoine, à la Pâquelais. « Et puis les anars qui bloquent tout, sont armés et balancent des cocktails Molotov sur la gendarmerie, ça suffit. L’aéroport c’est terminé, maintenant qu’ils se cassent ! ». Pas sûr qu’ils le comprennent…
Louis Moulin
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