On se souvient de cette phrase historique de Jean-Yves Le Drian : « Le responsable du PS aujourd’hui, M. Rachid Temal, a déclaré il y a peu de temps « aucun ministre ne pourra voter » et « il n’y a aucun socialiste au gouvernement ». Donc j’en prends acte, c’est-à-dire que je me retire du Parti socialiste. » (C News, jeudi 8 mars 2018). On a le droit d’avancer que Le Drian n’a fait qu’anticiper une probable exclusion ; il a pris les devants. Effectivement, il serait peu glorieux pour le ministre des Affaires étrangères de se faire virer comme un malpropre de ce qui reste du PS par des seconds couteaux. Trouver un prétexte, c’est plus pratique ; Temal lui a donc rendu service.
Autre phrase historique du ministre Le Drian devenu un marathonien diplomatique : Ryad, Kaboul, Rangoon, New Delhi, Pékin, Beyrouth…Rien ne l’arrête : « Je voyage beaucoup, mais je suis bien. Et je n’ai plus envie de m’occuper des algues vertes de la baie de Saint-Brieuc. » (Challenges, 7 décembre 2017). Or, qui dit algues vertes, dit agriculture intensive. Et comme Le Drian n’a jamais eu l’intention de recadrer les cochonniers qui fabriquent cette pollution, mieux vaut aller voir à New-York si la météo est plus favorable. Il est vrai qu’en Bretagne, s’opposer au lobby de l’agrobusiness (FNSEA, chambres d’agriculture, Crédit agricole, Groupama, industriels…) présente des risques pour les politiques. Mieux vaut les avoir avec soi que contre soi devait penser Jean-Yves Le Drian lors des élections régionales de décembre 2015.
C’est pourquoi il avait embauché sur sa liste un brillant représentant de ce lobby, Olivier Alllain, à l’époque président de la chambre d’agriculture des Côtes d’Armor. Pendant la campagne présidentielle, cette tête de la FNSEA était même devenue le conseiller agriculture d’Emmanuel Macron. Aujourd’hui, vice-président du conseil régional de Bretagne, tout naturellement chargé de l’agriculture, Olivier Allain se trouve en première ligne pour traiter la question des « algues vertes de la baie de Saint-Brieuc ».
Car Allain est un professionnel des « algues vertes » avec les outils qui conviennent. N’est-il pas « à la tête de l’un des plus importants élevages bovins de Bretagne – 128 hectares et 400 têtes – enrichi d’un poulailler industriel de 6000 pondeuses » ? Ce vaillant petit soldat de l’agro-industrie a fait ce qu’il fallait pour que la région Bretagne déverse en 2017 32 millions d’euros d’aides publiques « pour continuer de produire du cochon à tour de bras » avec le dispendieux plan Porc (Le Canard enchaîné, 27 septembre 2017)
Emmanuel Macron ne pouvait pas rester indifférent à un tel savoir-faire. Il a donc bombardé Olivier Allain coordonnateur des récents États généraux de l’alimentation.
Bernard Morvan
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