L’auteur est une jeune helléniste italienne. Son essai La langue géniale a fait un tabac : plus de 200 000 exemplaires vendus. Sa traduction nous arrive.
Elle a appris le grec au « liceo classico » puis à l’université. A ses débuts, elle a trouvé l’apprentissage difficile, rebutant même puis elle a fait les rencontres qui lui ont donné la flamme et la voilà livrant sa déclaration d’amour à la langue d’Homère.
J’ai fait quatre ans de grec et le début fut formidable. En 4°, « Monsieur Alain » nous apporta une méthode ronéotypée, à compte d’auteur qui se révéla presque un jeu. A Chantenay, nous n’étions pas la fine fleur des lycéens nantais mais nous mordîmes au grec et le BAB fut vite avalé. La suite fut plus terne faute de pédagogues ayant la flamme. J’ai oublié « mon grec ».
Andrea Marcolongo ne fait pas dans la facilité. Son essai est linguistique, grammatical et il ne vous épargne aucune des subtilités et des pièges du grec ancien. Tout y passe, dans les moindres recoins. Mais elle sait raconter. Elle évoque, elle sourit d’elle et de ses chers auteurs, Platon, Aristote, Thucydide, Aristophane, Sophocle… Pour apprendre le grec, comme toute langue, « il faut de la patience, de la constance, de l’indulgence, de l’aptitude. Il faut du temps, tout le temps nécessaire (…) Mais surtout, il faut avoir confiance en soi-même, et dans la langue, qui EST-CE QU’ELLE EST, et qui est unique… »
Une année, la télévision d’État, décida, sur sa seule chaîne de diffuser « Les Perses » d’Eschyle, le soir, après le dîner des Français. Tous ceux qui pouvaient accéder à un téléviseur – on est en 1961 – regardèrent. Au café, chez le voisin, entre prolos ; dans leur salon, chez les bourgeois. Au matin, à l’entrée du lycée, nous en parlions tous : « formidable… chiant… pas mal… ! » Je parle d’un temps révolu.
Notre actuel ministre de l’Éducation a balayé l’infamie de la dame d’avant. Il a remis, un peu, le latin et le grec en piste. C’est la bonne voie, la seule pour continuer à vivre notre héritage d’Européens. Il faut l’encourager et, comme le dit en conclusion Andrea Marcolongo, non pas « revendiquer » mais « vouloir ».
Jean Heurtin
* Andrea Marcolongo, La Langue géniale. 9 bonnes raisons d’aimer le grec, Les Belles Lettres.
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