La FFMC-44 (Fédération française des motards en colère) ne lâche rien. Après avoir défilé sur le périphérique contre le 80km/h il y a quelques semaines, réunissant près d’un millier de motards, elle en avait réuni une cinquantaine, mardi matin à 10h30, pour accueillir le délégué interministériel à la sécurité routière, Emmanuel Barbe, qui fait le tour des préfectures afin d’expliquer aux associations qui ont signé le document général d’orientation pour la sécurité routière – dont la FFMC – la bonne parole du gouvernement sur les 80 km/h.
Facétieux, les motards avaient ramené avec eux des sacs de farine. Peine perdue, puisque Emmanuel Barbe a écourté la réunion – commencée à 9h30, elle devait durer jusqu’à 11 heures – pour s’enfuir par la petite porte de derrière et quitter rapidement les lieux sous la protection de la police nationale. Les motards se sont donc contentés de faire un peu de bruit devant l’entrée de la Préfecture avec cornes de brumes et fumigènes.
Ghislain est venu de Rezé, il est adhérent à la FFMC 44. Pour lui, le 80 km/h sur le réseau secondaire « n’a rien à voir avec la sécurité. Il ne s’agit que d’enrichir l’Etat – et les privés qui vont qui vont tourner sur les routes pour mettre des amendes [expérimentation des voitures-radars exploitées par la société Challancin en Normandie] On sait que c’est du racket de toute façon ». Jean-Pascal précise que « l’expérimentation faite sur le 80 km/h dont l’Etat a planqué les résultats a été analysée par 40 millions d’automobilistes et n’a pas montré d’amélioration pour la sécurité routière, les accidents augmentent ». Ce qui confirment les révélations de nos confrères du Point à ce sujet.
Coordinateur de la FFMC 44, Denis Chaimbault est plus direct : « avec Emmanuel Barbe on continue d’entendre les mêmes conneries qu’on entend à la TV. Ce Monsieur est payé comme répétiteur, à chaque argument contraire il trouve un contre-argument pour continuer à répéter la parole divine du gouvernement avec ses 18 commandements. Bref, selon lui on peut rouler bourré du moment qu’on a un régulateur à 80 km/h on ne risque rien ».
Le raisonnement du gouvernement ne s’appuie plus tant sur l’expérimentation contestée que sur le modèle de Nilsson, selon lequel une baisse de 1% de la vitesse entraîne une diminution des accidents mortels de 4%. Problème : il date quelque peu : « M. Nilson l’a tiré en 1980 sur un fait divers qui a eu lieu le 3 septembre 1967, c’est à dire avant les ceintures de sécurité, les airbags, les ABS etc. », explique Denis Chaimbault. Depuis, la construction des voitures et l’infrastructure routière ont considérablement changé.
Pascale Goutet, qui est en charge de l’éducation routière de la jeunesse pour la FFMC – près de 2000 élèves formés en Loire-Atlantique – faisait partie de la délégation reçue en Préfecture. Pour elle, l’abaissement de la vitesse à 80 km/h sur le réseau secondaire sans terre-plein est « un bobard national. Emmanuel Barbe fait le tour des préfectures, le gouvernement achète des espaces publicitaires dans la presse et la TV, ça coûte 1.6 millions d’euros, c’est plus simple que de refaire les routes. S’il était si sûr de lui, il ne sortirait pas à la dérobée ». La réunion n’était « guère utile, bien qu’il a dit qu’il était content de rencontrer la FFMC et qu’il était motard lui-même ».
Pour elle, « l’usager de la route est placé en permanence dans une situation d’urgence, les routes ne sont pas entretenues, pas plus que les bas-côtés, s’ajoute à cela la peur du gendarme, quand est-ce qu’on regarde la route ? ». Les motards sont bien placés, eux, pour savoir que la vitesse compte peu dans l’accidentologie : « 70% des accidents mortels ont lieu à moins de 50 km/h, en ville. Ce sont des refus de stop, de feu rouge, de priorité… ».
Louis-Benoît Greffe
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