Donner un sens à sa vie. Derrière ce questionnement existentiel, se cache le problème d’une nouvelle génération dans le rapport qu’elle entretient à son travail. Quand les emplois tant convoités de l’open space par les uns deviennent des « bullshit jobs » pour les autres.
« Bullshit jobs » ?
Que recouvre donc ce terme de « bullshit jobs » ? L’expression s’est popularisée ces dernières années et désigne ces emplois « sans queue ni tête » et que certains qualifient même « d’inutile ». Une traduction « soft » qui ne masque pas moins ce sentiment croissant dans l’open space et les salles de réunions.
Car, avec la tertiarisation de l’économie, nombreux sont désormais les postes dont les occupants ont pour principales tâches de répondre aux mails et de se perdre en brainstorming à n’en plus finir. Voilà qui explique probablement en partie le pessimisme des moins de 35 ans quant à leur accomplissement professionnel puisque près de 82% d’entre eux jugent comme « compliquée » leur réussite dans la vie professionnelle.
Dilemme épanouissement/argent
Ce questionnement sur le sens donné au travail concerne donc principalement les jeunes urbains diplômés, souvent dotés par ailleurs d’un statut de cadre. Un élément à mettre en relief avec une autre donnée : 71% des moins de 35 ans déclarent que leur salaire est l’élément qui compte le plus dans leurs choix professionnels. Et ce, devant l’ambiance de travail (62%). Le contenu et la nature des tâches effectuées n’arrivant qu’ensuite (45%).
Mais, une distinction nette doit être opérée en fonction du niveau d’étude et du niveau social des jeunes en question. Ainsi, si plus de 30% des moins de 35 ans ne sont pas satisfaits de leur vie professionnelle, les raisons ne sont pas toujours les mêmes.
Chez les jeunes les moins diplômés, c’est bien le salaire qui est la première des préoccupations. Et souvent donc un motif d’insatisfaction. Au contraire, chez les CSP+ en devenir, l’épanouissement et les perspectives de développement sont les critères les plus importants.
Idéalisation du concret
Une fois le constat établi, voilà de quoi expliquer toutes ces reconversions de cadres issus du tertiaire dans des métiers qu’ils jugent plus concrets et « dotés de sens ». De l’économie sociale et solidaire à l’artisanat, de la création de micro-brasseries à l’ouverture d’un commerce de proximité, ils sont de plus en plus nombreux à chercher ce retour au réel. Avec parfois une tendance à l’idéalisation afin de fuir le « brown-out », cette absence de sens au travail. Quand des diplômés d’une école de finance ou de management reprennent leur étude… en CAP boulangerie.
Une remise en question qui n’a que très rarement lieu en sens inverse. Peu nombreuses sont en effet les personnes avec des métiers manuels effectuant une reconversion dans le tertiaire. Quid du maçon souhaitant devenir web marketer ? Ou du garagiste changeant de vie pour embrasser une carrière de développeur informatique ?
Une fois l’euphorie du nouveau départ estompée, reste à savoir si les « travailleurs du réel » ne finiront pas par regretter leurs « bullshits jobs ». L’épanouissement à travers un métier manuel peut, lui aussi, vite atteindre ses limites.
Crédit photo : Flickr (CC/HM Revenue & Customs)
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