09/02/2018 – 09 h 20 Vannes (Breizh-info.com) – Les semaines passent et le tableau reste toujours aussi sombre pour les agriculteurs : en témoigne de nouveau ce nouveau suicide intervenu cette semaine dans le Morbihan.
L’homme, Guénaël O, âgé de 46 ans et résidant à Saint-Brieuc de Mauron, a été retrouvé mardi par sa femme mort. Il avait rendez-vous à la MSA le vendredi précédent et aurait affirmé que si cela ne se passait pas bien, cela aurait des répercussions dès cette semaine. Il a malheureusement tenu parole, lui qui avait du se séparer de toutes ses bêtes après 2013 (élevage porcin) et qui tentait tout de même de s’en sortir avec son bâtiment agricole, des sous-traitants et sa production de céréales (140 hectares).
« S’il y a un endroit où je me sens bien, c’est dans mon tracteur. Mais, le pire des moments, c’est lorsque je me rends à ma boîte aux lettres. Cotisations MSA, impôts, banque… J’appréhende chaque courrier. » déclarait-il déjà en fin 2015 au journal Le Ploërmelais. Ce dernier avait en effet réalisé un « coup médiatique » en griffant un terrain végétalisé de cinq hectares, d’écrire de manière gigantesque « Le Foll, téou ? », message qui avait fait le buzz sur la toile puisque détournant une chanson connue tout en interpellant celui qui était à l’époque ministre de l’Intérieur.
Force est de constater que ni Stéphane Le Foll ni ceux qui l »ont suivi n’ont entendu le message de Guénaël.
Les agriculteurs forment la catégorie socioprofessionnelle la plus touchée par le suicide : la surmortalité par suicide chez les agriculteurs est 20 à 30 % supérieure à la moyenne de la population. En 2016, le nombre de passages à l’acte a été multiplié par trois. Un agriculteur se suicide tous les deux jours en France, sans que les pouvoirs publics ne soient parvenus à en prendre la mesure jusqu’ici. « C’est plus facile d’asphyxier et de laisser mourir des gens qui travaillent toute l’année, sans discontinuer, que de résoudre leurs problèmes profonds. Cela m’écœure quand je vois tout l’argent qui est déversé sur les banlieues à la moindre révolte, à la moindre casse. Nous ne sommes pas traités à la même enseigne par l’administration et l’État » déplore Jean, agriculteur lui aussi, dans le Morbihan.
Agnès Richard, conseillère régionale (FN) et qui connaissait l’agriculteur en question, nous a confié être « profondément choquée et révoltée face à tout ce malaise dans l’agriculture. J’ai le sentiment que rien n’est fait pour le monde agricole ».
Selon une étude publiée par Santé publique France et la MSA en 2016 (et portant sur les années 2007 à 2011), près de 300 agriculteurs se sont suicidés en 2010 et 2011. D’autres sources avancent de leur côté le chiffre de 732 morts pour la seule année 2016.
Selon la même étude, plus de huit cas de suicides sur dix concernent des hommes et les deux tiers des agriculteurs morts par suicide sont âgés de 45 à 65 ans. La production laitière et l’élevage bovin sont les secteurs les plus touchés, avec une surmortalité par suicide de 52 % chez les hommes, et certaines régions sont particulièrement représentées, comme la Bretagne ou les Pays de la Loire.
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