Notre-Dame-des-Landes. Les opposants à l’aéroport font la fête et préparent l’avenir

18/01/2018 – 19h00 Notre-Dame des Landes (Breizh-info.com) –Au-dessus des terres de la ZAD, où seuls quelques oiseaux pépient, une lumière brille. Juchée au sommet d’un grand poteau électrique, à 18 mètres de haut, sa lumière tourne et éclaire la fin du projet d’aéroport. A 1 km de là, à la Vache Rit, dans le grand hangar qui sert de QG aux opposants à l’aéroport, une foule savoure sa victoire.

L’aéroport n’est pas construit – et ne le sera jamais – mais il y a déjà un bouchon. Garés n’importe comment sur l’aire étroite qui permet de faire demi-tour, des deux côtés de la route, les camions des médias et les voitures des fêtards bouchent la route. Des zadistes font la circulation dans une ambiance euphorique. Des bouteilles sont sorties. « Nous avons enfin gagné, c’est la fin ! Nous avons rendez-vous avec l’histoire ! », crie un jeune homme au volant d’une camionnette. Des artisans qui rentrent chez eux à Blain prennent leur mal en patience, ou essaient de faire demi-tour dans une entrée de champ.

Vers midi ce 17 janvier, le gouvernement a annoncé, en bloc, la fin du projet d’aéroport, la fin de la DUP (qui arrivait à échéance le 8 février), la non-expulsion des opposants jusqu’au printemps – en fait jusque la fin de la trêve hivernale, donc début avril –  l’allongement de la piste de Nantes-Atlantique, des travaux à l’aéroport de Rennes, l’amélioration des liaisons ferroviaires avec Orly et Roissy et la vente progressive du foncier acquis à Notre-Dame-des-Landes.

Bref, un bloc de décisions qui permet à Macron-Jupiter d’apparaître comme celui qui  « tranche le nœud gordien », qui décide, alors que ses prédécesseurs se sont contenté de repousser les échéances.

On parle en effet de l’aéroport depuis 1963, le site de Notre-Dame des Landes étant choisi en 1967. D’après les premiers sondages – auxquels on peut cependant faire dire ce qu’on veut – ça marche puisque trois quarts des sondés approuvent l’abandon du projet d’aéroport. Et Macron a repris l’initiative politique que la grève des surveillants pénitentiaires était venue lui arracher, ouvrant une séquence politique pénible pour l’exécutif.

Pendant ce temps à Nantes les centaines de CRS mobilisés se sentaient bien seuls alors que près de 500 membres de l’extrême-gauche locale organisaient une manifestation vers 19h pour fêter la fin de l’aéroport. Mis à part quelques jets de projectile de la part d’une avant-garde cagoulée, ils se sont dispersés dans le calme après une heure de manifestation – évidemment sauvage. D’après la banderole de tête et aux slogans clamés, ils entendaient s’opposer aux menaces d’expulsions des zadistes « irréguliers » après la fin de la trêve hivernale.

La réouverture de la RD281 « dans les prochains jours »

« Le gouvernement nous a donné raison sur toute la ligne, c’est génial ! », nous explique un membre de la coordination qui gère, au quotidien, les usages et la gestion des terres de la ZAD avec toutes les composantes (habitants anciens et nouveaux, paysans ou non, riverains, soutiens de la lutte etc.). « Mais ces derniers jours, c’était épuisant, nous étions en réunion jusqu’à 1 heure du matin. Préparer une expulsion éventuelle, la manif du 10 février aussi », qui est maintenue : « ça devait être le surlendemain de la prorogation de la DUP – si le projet était maintenu – pour marquer le coup et dire notre détermination. Comme le projet est annulé on pense la maintenir pour faire la fiesta ».

« D’ici le mois d’avril le gouvernement aura trouvé des raisons pour ne pas envoyer la police », pense ce paysan. « On va bien sûr devoir donner des arguments. Par exemple la réouverture de la RD281, la route des chicanes, dès les prochains jours. Il y a encore quelques irréductibles qui sont contre, mais ils ne feront pas le poids. Ils vont partir d’eux mêmes ». Un zadiste complète : « ou être dégagés. La majorité ici est pour la réouverture de la route – enfin le dégagement des chicanes puisque la route est ouverte, il y a des gens qui passent dessus régulièrement », notamment des riverains ou des gens qui prennent, en roulant lentement, ce raccourci pratique sur la route de Blain à Nantes (par Orvault-bourg). Nicole Klein, le préfet de Loire-Atlantique, a donné jusqu’au milieu de la semaine prochaine aux opposants, en promettant de venir vérifier par elle-même la réouverture de la route.

« Le plus dur sera de gérer l’après »

« Je suis sur un petit nuage et j’ai du mal à atterrir », nous confie André, soutien de la lutte depuis des années, alors que justement les opposants font un hommage aux anciens soutiens qui sont décédés avant d’avoir vu ce jour historique – et notamment Michel Tarin. « J’étais dans la lutte contre la centrale nucléaire du Pellerin, dans la lutte contre la centrale nucléaire du Carnet, dans la lutte contre celle de Plogoff, et maintenant Notre-Dame des Landes ».

« C’est génial. J’ai du mal encore à m’en rendre compte ; je commençais un peu à perdre espoir, ça fait tellement de temps qu’on lutte contre », confie Françoise, qui habite à quelques kilomètres seulement de la ZAD. Camille, lui, habite sur la ZAD elle-même : « je n’ai jamais perdu espoir mais je suis heureux qu’on évite une nouvelle opération César », la tentative d’expulsion ratée de l’automne 2012. « Maintenant qu’ils ont réussi à imposer aux élus locaux la fin de l’aéroport, sans doute on arrivera à convaincre pour maintenir nos exploitations et nos lieux de vie ».

Les messages du maire de Notre-Dame-des-Landes et de Mme le préfet, Nicole Klein, distillés ces dernières semaines, étaient on ne peut plus clair. Si les zadistes veulent rester, il faudra qu’ils se coulent dans le moule. Paiement de fermages pour les terres, déclaration des exploitations à la MSA, contrôles vétérinaires (DSV) pour les bêtes et les installations, mise aux normes des locaux de production… taxes d’habitation et foncières pour les habitants des maisons en dur, règlement de l’épineuse question des arriérés qui pourraient être réclamés dans l’hypothèse d’une « vengeance administrative » contre la ZAD. Le plus compliqué, c’est la question des cabanes construites dans des zones inconstructibles : elles ne peuvent être régularisées en droit que par leur destruction.

« Mais rien n’empêche propriétaires des terrains et habitants des cabanes de s’arranger entre eux », temporise un paysan, qui reconnaît que « le plus dur, ce sera de gérer l’après ». Autrement dit la régularisation et la normalisation de tout ce qui a été créé ces dernières années, et notamment depuis 2012. « En même temps vu le nombre d’exploitations créées, ça relativise franchement l’utilité de toutes ces administrations qui pèsent sur les paysans et des subventions qu’elles donnent », achève-t-il. A quelques kilomètres de la ZAD, un autre paysan ne dit pas autre chose « il faut que tout le monde soit aux mêmes conditions pour qu’il n’y ait pas de tensions. Notamment pour les paysans là-bas : on doit tous payer les mêmes charges, être traités pareil, se plier aux mêmes obligations ».

Louis-Benoît Greffe

Crédit photos : Breizh-info.com
[cc] Breizh-info.com, 2018, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

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3 réponses à “Notre-Dame-des-Landes. Les opposants à l’aéroport font la fête et préparent l’avenir”

  1. Richard Jacques dit :

    Enfin une décision, bravo. Mais après il faudra faire appliquer notre loi, toute notre loi, et sans discutions ou aménagement, celle que tous les français doivent respecter, et là j’ai quelques doutes.

  2. Yvette Prétet dit :

    Ces opposants sont des  »hors-la-loi ».
    Ils occupent  »illégalement » des terrains et ils ne paient pas d’impôts….si TOUS les Français faisaient comme eux,comme cette bande de gauchistes crasseux???

  3. Yvette Prétet dit :

    Quel avenir pour les zadistes??..
    …qui occupent  »illégalement » des terrains et ne paient pas d’impôts,ces crasseux et ces casseurs qui dénaturent cet endroit plein d’ordures,de déchets,etc..

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