09/01/2018 – 08h00 Vienne (Breizh-info.com) – Son arrivée sur le devant de la scène médiatique a coupé le souffle à nombre de commentateurs. La presse française, d’habitude prompte à tirer à boulets rouges sur ce qu’elle nomme « populisme », a été bien prudente sur le sujet. Une presse aussi inquiète que fascinée par ce jeune homme bien éloigné des clichés de la droite extrême. L’ascension fulgurante du leader autrichien Sebastian Kurz est celle d’un genre nouveau.
« L’enfant prodige » du nationalisme autrichien
Son surnom n’est pas usurpé. Baptisé « Wunderwuzzi », comprenez « l’enfant prodige », Sebastian Kurz n’a effectivement pas perdu son temps. Entré en politique à l’âge de 24 ans, il est, depuis le 18 décembre 2017, le plus jeune chef d’État du monde à 31 ans à peine.
Fils d’un ingénieur et d’une professeure de lycée, il est titulaire d’un baccalauréat puis effectue de brèves études de droit. Il y met rapidement un terme pour se consacrer entièrement à la vie politique autrichienne.
Mais, au-delà de la précocité du « young leader » de Vienne, c’est surtout le style Kurz qui marque un tournant dans la politique européenne. À l’heure où les vieilles droites du continent n’en finissent plus de se chercher, voyant le combat des idées supplanté par la bataille culturelle. La seule qui prime à l’heure actuelle.
Et le style Kurz, c’est précisément le souci de l’esthétisme associé à des positions tranchées. À ceux qui le soupçonnaient d’un simple marketing de façade privilégiant la communication sur l’action, le nouveau patron de l’Autriche a répondu par du concret. Et du très concret même.
Les bras droits du FPÖ
Alors qu’il est membre du Parti populaire autrichien (ÖVP) de tendance démocrate-conservateur, Sebastian Kurz a redistribué les cartes après sa victoire aux élections législatives d’octobre 2017.
Tandis que l’ÖVP a recueilli 31,7 % des suffrages, c’est le SPÖ de centre gauche qui est arrivé en seconde position. Juste devant le FPÖ. C’est ainsi que le nouveau chancelier a proposé à l’ancienne formation de Jörg Haider la formation d’un gouvernement de coalition.
Le FPÖ en question, bien plus virulent qu’un Front national en France sur les questions migratoires, a régulièrement été la cible de la presse occidentale lors de ses années passées au pouvoir. Mais de tout cela, Sebastian Kurz n’en a cure et a ainsi confié pas moins de six ministères à des membres (ou proches) du FPÖ.
Ainsi, les tenants de la ligne dure du nationalisme autrichien sont aux commandes de l’intérieur, de la défense, du ministère des Affaires étrangères. Mais également des affaires sociales, de la santé et des transports.
Et, pour couronner le tout, Sebastian Kurz a nommé comme vice-chancelier Heinz-Christian Strache, président du FPÖ. L’homme, connu pour avoir radicalement lissé l’image de son parti au cours des dernières années, l’est aussi pour ses positions très fermes vis-à-vis de l’immigration et de l’Islam.
700 000 musulmans en Autriche
Si les questions d’immigration et d’identité ont été autant au cœur des enjeux électoraux, c’est qu’elles occupent une part importante dans le débat qui agite la société autrichienne. La population de confession musulmane se chiffrerait aux alentours des 700 000 individus dans le pays. Soit environ 8 % du total de la population selon l’Université de Vienne.
Mais c’est aussi son doublement depuis le début des années 2000 qui inquiète les Autrichiens. À Vienne, la part des musulmans dans la population locale avoisine les 12,5 %.
D’autre part, la progression de l’Islam radical est en grande partie responsable des derniers scores électoraux. Ce développement de la radicalité a régulièrement été rappelé par l’Agence autrichienne pour la sécurité d’Etat contre le terrorisme (BVT).
Une situation à laquelle Sebastian Kurz compte s’opposer fermement, notamment en refusant les quotas de migrants imposés par l’Union européenne.
« Établir un nouveau style politique »
La société française a vu le « dégagisme politique » et le style Macron modifier totalement le paysage en 2017. Une nouvelle ère qui a aussi débuté en Autriche et dont Sebastian Kurz est le visage évident. Il revendique d’ailleurs volontiers ce besoin de renouveau. Mais la comparaison avec Emmanuel Macron s’arrête là.
Dans son discours de victoire le 18 décembre dernier, il a clairement annoncé la couleur :
« Aujourd’hui, je peux vous promettre que nous mettrons fin à l’immigration illégale pour assurer l’ordre et la sécurité en Autriche ».
Mais, au-delà des mesures prévues, c’est surtout l’idée que la bataille politique passe aussi et avant tout par la bataille du style que le nouveau chancelier a mise en avant :
« Je m’engage aujourd’hui à me battre avec toutes mes forces pour un changement dans ce pays, et je vous invite à aller sur ce chemin avec nous. Il y a beaucoup à faire, il faut établir un nouveau style politique dans ce pays, créer une nouvelle culture ».
Le style Kurz inspirera-t-il la droite française ? La question est posée.
Crédit photo : Wikimedia Commons (CC/Dragan Tatic)
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2 réponses à “Esthétisme et radicalité, le « nouveau style politique » de Sebastian Kurz”
Orban, Kurz, que du bonheur en écrivant ces deux noms et en attendant d’autres noms semblables ( surtout pas celui d’un mini-macron? le fossoyeur de la France.°
[…] où la défiance vis-à-vis de l’immigration est très forte. L’arrivée au pouvoir du jeune Sebastian Kurz ainsi que du parti FPÖ en sont les marqueurs les plus […]