04/01/2018 – 05h00 Saint-Brieuc (Breizh-Info.com) –Comme son nom l’indique, le mot Urgences signifie qu’il y a potentiellement quelque chose de grave qui peut se passer (ou même de vital). Ce n’est visiblement pas la traduction qu’en font certains parmi les centaines d’usagers qui défilent aux Urgences du CHU de Saint-Brieuc depuis le début des vacances scolaires, encombrant le service mais provoquant une saturation au niveau de l’hôpital dans son ensemble.
« La Direction du Centre Hospitalier de Saint-Brieuc informe que le service d’accueil des urgences du centre hospitalier de Saint-Brieuc enregistre un très fort pic d’activité qui se traduit par :
– des délais d’attente importants pour les urgences les moins graves ;
– une saturation des services d’hospitalisation et la nécessité depuis quelques jours d’y installer des lits supplémentaires ;
– des transferts de patients vers d’autres établissements du territoire de santé. »
Voici le communiqué adressé à la presse ce mercredi par la direction du CHU de Saint-Brieuc, qui a par ailleurs tenu un point presse dans la foulée.
Mardi 2 janvier, ils étaient ainsi une vingtaine de patients, à dormir dans les couloirs des Urgences, faute de lits disponibles dans les services spécialisés, avec un flux de nouveaux arrivants continu, et alors que le personnel ne peut pas faire face, les urgences devenant une forme de goulot d’étranglement pour tout l’hôpital.
Plusieurs raisons à cet afflux :
- l’influence néfaste de la campagne médiatique sur la Grippe – avec à la clé une panique qui amène n’importe qui à vouloir consulter un docteur pour un simple rhume ou pour quelques symptômes qui ressembleraient à cette maladie, sans en plus faire partie des publics les plus à risque (personnes âgées ou jeunes enfants)
- Certains patients qui, selon le service communication du CHU que nous avons contacté, utilisent les Urgences comme si ils allaient chez le médecin (ce qui n’est pas le rôle de ce service particulier), pour un diagnostic et une ordonnance. En effet, les consultations dans le service n’étant pas facturées immédiatement, les patients n’ont rien à avancer et s’y pressent donc – alors même que tout un chacun est remboursé lorsqu’il va chez le médecin (et qu’une large partie bénéficie du Tiers Payant). La France a un des meilleurs service de santé du monde, et cela n’empêche pas ceux qui engorgent les Urgences pour n’importe quoi d’en abuser.
- Des cabinets médicaux de ville et des spécialistes qui, en période de vacances scolaires, ferment pour partir en vacances alors que statistiquement, c’est là où la population est la plus demandeuse.
« Nous savons que depuis des années, les vacances scolaires de janvier constituent un pic d’affluence dans nos services et nous nous préparons en conséquence » nous explique Brigitte Perignon, chargée de communication. « Nous ne prenons aucune activité programmée (des opérations qui ne sont pas urgentes) durant cette période justement pour éviter ce premier encombrement, mais là, elles vont reprendre d’ici lundi alors que nos services sont déjà débordés. Il n y a plus de lits disponibles.»
Et le CHU de Saint-Brieuc de lancer un appel au civisme et à la responsabilité des usagers : « non seulement le personnel fait face à un encombrement, mais il doit essuyer les violences verbales des personnes qui, éventuellement sont orientées vers d’autres services. Par ailleurs, il faut savoir que venir aux Urgences augmente le risque de contracter de vraies maladies avec les microbes qui peuvent y circuler. »
Le Docteur Letellier, du CHU, nous indique par ailleurs que ces médecins généralistes travaillent énormément toute l’année, et que le problème est plus global : « la question du numerus clausus et de la démographie médicale est posée en permanence ». C’est en effet ce qui empêche bon nombre de jeunes de devenir médecins généralistes ou spécialistes en France, et ceux en exercice de trouver des remplaçants durant leurs vacances.
Et ce dernier d’appeler les usagers à d’abord aller voir, si ils le peuvent, leur médecin traitant, ou sinon d’appeler le 15 qui les guidera.
La situation serait la même dans toute la France à l’occasion de ces vacances scolaires. Avec 20,3 millions de passages en 2015 (42% de plus qu’en 2002), la fréquentation des urgences augmente à un rythme «difficilement soutenable à long terme» pouvait-on lire déjà sur Le Figaro l’an passé.
Pour rassurer les potentielles victimes graves (pronostic vital notamment) sachez que les ambulances, pompiers et SAMU sont bien évidemment prioritaires et que le petit garçon de 6 ans amené aux Urgences par ses parents pour un simple rhume ou une gastro devra prendre son mal en patience et attendre que les professionnels de la santé sauvent des vies dans la chambre d’à côté.
Encombrement des services, désert rural et rarification de la médecine de ville et des spécialistes, mauvais comportement d’une partie des usagers, la tiers mondisation de la Santé et de la Médecine en France serait-t-elle en route ?
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