Quels enfants n’ont pas dans leur chambre une multitude de figurines Playmobil ? Quels parents n’ont pas, dans leur grenier ou leur cave, un carton plein de ces figurines prêtes à servir ? Pourquoi un tel succès ? Playmobil est le premier jouet à avoir donné aux enfants la possibilité de créer grâce à des personnages animés leur propre univers dans de multiples domaines (travaux, police, ferme…). Malgré son nom d’origine anglaise (« play » et « mobil »), cette marque de jouets allemande est ancrée dans la campagne bavaroise. Depuis son origine, elle a mis l’accent sur la transmission de l’Histoire. En projetant son imaginaire dans le jeu, l’enfant dès son plus jeune âge peut ainsi créer des aventures dans un cadre historique.
Créée en 1974 par Hans Beck (1929-2009) et Horst Brandstätter (1933-2015), la marque Playmobil appartient à la famille des Brandstätter, aux commandes de l’entreprise depuis 1872. A l’origine, l’entreprise familiale fabrique des ferrures et des serrures pour boîtes à bijoux. Puis la société s’oriente vers la fabrication de jouets en métal pour enfants. En 1970, alors que la mode est aux petits soldats de plomb ou en plastique non articulés, Hans Beck, directeur de bureau d’études de Geobra-Brandstätter, élabore des figurines en plastique d’une taille de 7,5 cm accompagnées d’accessoires. Il fait le pari de créer une figurine pouvant tenir dans la main des plus jeunes et la conçoit comme un enfant dessine un adulte, avec des codes basiques (un visage rond, neutre, doté seulement de deux yeux et d’une bouche en forme de sourire). Il fait tester les prototypes à ses neveux et nièces qui sont bien sûr conquis. Pourtant, les premiers modèles (un indien, un chevalier et un ouvrier) sont mal accueillis au Salon international du jouet de Nuremberg en 1974. Heureusement, un grossiste néerlandais passe la première commande. C’est le succès immédiat. Au fil des années, la gamme se diversifie, accueillant les figurines féminines en 1976 et les enfants (garçons et filles) en 1981. Puis en 1990 est lancée la gamme Playmobil 123, conçue pour les enfants de moins de trois ans. Les Playmobil sont tous fabriqués en Europe : les grosses pièces (bâtiments, véhicules, bateau des pirates…) dans les usines allemandes (60 % de la production), les figurines à Malte (30 %) et les petites pièces en République tchèque. Ces usines parviennent à produire chaque année 150 millions de figurines, pour un total aujourd’hui de près de 3 milliards. Le catalogue propose 650 personnages différents (3 000 depuis sa création). La France est le premier marché étranger de Playmobil (5 % de part de marché)[].
Rappelons l’évolution des créations de la marque Playmobil dans le domaine historique.
En 1974, trois thèmes sont proposés : la vie de chantier, les indiens (indien, tente, cheval, canoë) et les chevaliers. L’année 1975 est marquée par l’arrivée des cow-boys et des soldats Nordistes (les « soldats bleus ») de la guerre de Sécession. On trouve également les premiers bâtiments à assembler. En 1976 sont créés le tournoi médiéval et les premiers canons et forts des soldats bleus. Après fort union (1976) sortiront fort reno (1977), fort randall (1980), fort bravo (1987), fort glory (1994), fort eagle (1998) et fort reno (2005).
En 1977 apparait une nouvelle collection de chevaliers avec un grand château, de l’artillerie et une multitude de maisons médiévales (boulangerie, forgeron, grange, poste de garde, auberge…).
En 1978 est créé un nouveau thème : les pirates. Le bateau pirate reste, aujourd’hui encore, l’un des grands succès de la marque. Mais le nouveau thème des guerres napoléoniennes (troupes françaises, anglaises et allemandes) n’a pas le même succès.
Ensuite, pendant une dizaine d’années, il n’y a pas de véritable création dans le domaine historique. Seuls sont ajoutés des explorateurs et des arabes (peau noire, perruque bouclée et barbe) en 1980, une maison médiévale en 1982, un saloon en 1983, un ranch, un chemin de fer pour le western et une cavalerie des soldats bleus en 1987, un nouveau canon des soldats bleus en 1988…
Puis survient une période riche en nouveautés. En 1989 apparaît la collection 1900, consacrée à la Belle Époque, avec notamment une magnifique maison qui fait la joie des petites filles. En 1991 sont créées une ile des pirates et une goélette. En 1993, le thème du Moyen Âge fait son retour, avec un grand château, un tournoi, une scène de trône… Enfin, en 1994, la collection western s’enrichit d’une gamme consacrée à la guerre de Sécession : on se souvient de la cavalerie des soldats Sudistes (les « soldats gris ») arborant le célèbre drapeau confédéré. C’est la première fois qu’un événement historique précis reçoit une collection. De plus, de nouvelles boîtes médiévales évoquent Robin des bois. En 1995 apparait le thème des sorciers (Merlin, épée Excalibur fichée dans un rocher…).
Par la suite, on assiste à une nouvelle période sans véritable création dans le domaine historique. Les collections existant déjà sont seulement renouvelées. En 1995, on note une nouvelle cavalerie et une artillerie pour les soldats bleus, une tente médiévale du roi et de nouvelles boîtes individuelles (un viking et un soldat arabe). En 1996 apparaissent de nombreuses boites indiennes (camp indien, totem…), une prison des pirates, des troupes anglaises avec un canon dans le cadre des guerres napoléoniennes, un soldat mongol et un soldat croisé. Parmi les figurines individuelles, on note un druide (1997) et un mousquetaire (1998). Dans la collection pirates apparaissent en 2000 un nouveau bateau pirate et l’île des pirates. Puis en 2001 sortent de nouvelles boîtes de soldats anglais luttant contre les pirates (port et artillerie) et un soldat musulman des croisades.
A partir de 2002 sont enfin produits de nouveaux thèmes historiques : les vikings (camp, drakkar, bélier…) en 2002, l’arche de Noé en 2003, les chevaliers rouges en 2004, les barbares (camp, catapulte, tour d’assaut, char…) en 2005, les romains (Colisée avec gladiateurs, galère romaine, tour d’assaut, catapulte, char…) en 2006, des soldats gaulois en 2007, l’Egypte ancienne (pyramide, sphinx, temple, tombe, char, navire…) en 2008, le médiéval fantasy (chevaliers des dragons verts…) en 2009, un nouveau château médiéval en 2010, la Préhistoire en 2012… La collection Western, qui avait été arrêtée en 2006, revient même en 2012.
Enfin, la marque vient de lancer une nouvelle collection : Playmobil history. Ainsi sortent de nouvelles boîtes sur l’antiquité. Pour les adeptes de la Rome antique : arène, galère, tente, baliste, char, quadrige, tortue romaine, César et Cléopâtre… Pour ceux qui préfèrent l’Égypte ancienne : pyramide, baliste…
Ainsi, on note une grande variété dans les thèmes traités. Playmobil propose une dizaine de thèmes historiques, du paléolithique à la guerre de Sécession, en passant par l’époque médiévale et les pirates. Mais Playmobil n’a jamais représenté les guerres du XXème siècle.
Contrairement à la plupart des autres marques, Playmobil ne passe pas sous silence les racines chrétiennes. On note, en 2000, un nouveau thème religieux : les rois mages et la nativité (avec Jésus, Marie, Joseph). L’arche de Noé est créée en 2003. De 2004 à 2006, une collection à tête de lapin est conçue pour commémorer la fête de Pâques (dont le lapin est le symbole en Allemagne). Playmobil a également créé une église (2008) et une figurine de Saint Martin.
Depuis plus de 40 ans, la marque Playmobil a ainsi réussi à conquérir le marché des enfants en leur donnant le goût de l’Histoire. Devenus grands, ceux-ci deviennent parfois des collectionneurs et donnent vie à leurs rêves : reconstituer des grandes batailles (Zama, Gettysburg…).
Kristol Séhec
Crédit photos : DR
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