Sur la Vendée, trois ouvrages viennent, cette saison, rafraîchir les mémoires : 1) le livre – fresque de Patrick Buisson où se découvrent 150 tableaux plus ou moins naïfs et gravures peu connues, avec une préface de Philippe de Villiers ; 2) une « guerre de Vendée pour les nuls » et notre ouvrage, 3) Nouvelle histoire des guerres de Vendée, de Jean-Joël Brégeon et votre serviteur, chez le même éditeur, Perrin.
On connaît Patrick Buisson, ne serait-ce que par son excellent Cause du peuple, qui solde, pour certains, son compte avec un Président d’antan. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il maîtrise son sujet : l’Histoire. Par les écrits et par les écrans. Ce bel ouvrage en apporte la preuve…
« Ce que la Révolution fit subir à ces pauvres gens et à ces preux resta longtemps enseveli sous les versions officielles » écrit le préfacier. Ce ne fut pas mon cas, enfant de la Vendée par le sol puisque né à l’un des angles du territoire insurgé, contre la Loire face aux Ponts-de-Cé, sur un haut-lieu de combats où s’illustrèrent les troupes d’Autichamp, armée de Bonchamps, et le 8e bataillon des Lombards, crapuleux volontaires parisiens à « cinq cents livres » qui étaient venus pour la solde. La Vendée, je l’avais dans le sang.
Patrick Buisson commence son livre par une suite de notices biographiques, « vendéennes » par le fait, où il manque néanmoins Renée Bordereau (« Langevin ») ou le général Amey qui faisait cuire femmes et enfants dans les fours boulangers. Pareillement, et on se demande bien pourquoi, il n’est question nulle part de l’évêque d’Agra (alias de Guillot de Folleville) ou de l’abbé Bernier, ancien curé de Saint-Laud d’Angers, qui eut un rôle non négligeable durant toute l’insurrection… y compris lors de l’arrestation de Stofflet puis des pourparlers « pacificateurs » avec Napoléon – ce qui lui valut l’évêché d’Orléans. Mais ce sont-là des « détails ».
Tandis que rôdent encore quelques « guillotineurs » il est bon d’attirer l’attention sur ce recueil érudit et chaleureux qui, dit Patrick Buisson, « clôt une imposante littérature de combat » entre bleus et blancs. Il nous le prouve par une série de citations où il fait la part belle à Chateaubriand et au Victor Hugo de Quatrevingt-treize, ne néglige pas Mme de La Rochejaquelein… mais pourquoi n’est-il pas allé chercher le témoignage de la petite baronne de Candé, Pauline Gontard des Chevalleries, 16 ans, qui raconte merveilleusement le passage de la Loire aux premiers jours de la virée de Galerne. Peut-être ne le pouvait-il pas ?
Ne le querellons point sur ces accrocs mémoriels, d’autant que nous sommes d’accord avec lui pour le reste. En fait, Patrick Buisson est l’auteur de la présentation des sept chapitres de son ouvrage, textes intenses où sont résumés les faits et le sens à donner aux citations qui suivent : une quinzaine par chapitre, qui vont du plus effacé au plus connu… ce qui est un choix. « La controverse a quitté le terrain de l’idéologie pour une approche sinon dépassionnée du moins plus soucieuse des règles de la critique historique, écrit-il. » Comment oublier ces phrases d’un Barère (dit de Vieuzac) dictées par l’idéologie ou celle-ci, proférée par Saint-Just, ce gandin malencontreux : « Ce qui constitue une République, c’est la destruction totale de ce qui lui est opposé ». Comment ne pas partager avec Soljenitsyne ce sentiment profond : « De nos jours, si de par le monde on accole au mot révolution l’épithète de « grande », on ne le fait plus qu’avec circonspection et, bien souvent, avec beaucoup d’amertume ».*
Patrick Buisson revient sur la question du génocide : « Il est devenu impossible de nier le coût humain de la tragédie vendéenne. Il y a eu génocide car les Vendéens furent massacrés « comme tels », en exécution d’un plan concerté au sommet sans relation aucune avec les nécessités militaires ni avec les impératifs de défense nationale ». Nous sommes totalement d’accord avec lui, la preuve en est ce qui s’est passé au Mans (les massacres et les outrages), à Savenay, à Nantes (noyades et « fumigations guytoniennes ») et aux Ponts-de-Cé (« voyages à Nantes » par la Loire, tanneries de peau humaine), à travers la « Vendée » au temps des colonnes infernales de Turreau par la ribambelle de généraux génocideurs, « Grignon, Amey, Cordellier, Huché, Boucret, Caffin, Crouzat… » qui ont commis au moins « des crimes contre l’humanité demeurés impunis ».
Gérard Guicheteau
*On ne peut que remercier Patrick Buisson de nous donner l’intégralité du Discours pour l’inauguration du Mémorial de la Vendée, prononcé aux Lucs-sur-Boulogne, le 25 septembre 1993, par Soljenitsyne (pp. 258-259).
Patrick Buisson, La grande histoire des guerres de Vendée, préface de Philippe de Villiers, Perrin, grand format, 23,5 x 29,9 cm, 270 p., 29,00 €.
Crédit photo : DR
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4 réponses à “Les guerres de Vendée selon Patrick Buisson”
Merci pour cet article de mémoire.
Un breton vendéen…
Buisson/de Villiers. Beau duo, je vais suggérer à ma femme de me l’offrir pour Noël…
Première biographie consacrée à Paul de Scépeaux, par Tanneguy Lehideux, avocat castelbriantais qui fait sortir de l’ombre « Le général des Chouans oublié » ; alors qu’il fut, entre Nantes et Le Mans un équivalent des Cadoudal ou Charette. Voilà un sujet d’interview pour Breizh Info : pensons un peu aux Chouans aussi respectables que les Vendéens et moins encensés !
http://souvenirchouandebretagne.over-blog.com/2017/11/scepeaux-decouverte-d-un-general-chouan-illustre-mais-meconnu.html
Patrick Buisson viendra dédicacer son livre à la fête du livre de Nantes le 17 décembre. Info : http://www.librairiedobree.com/5e-fete-du-livre-de-nantes