19/11/2017 – 07h45 Rennes (Breizh-info.com) – Florian Bachelier (LREM), député de Rennes Saint-Jacques, occupe au Palais – Bourbon un poste envié, mais très exposé en ce moment : premier questeur, c’est-à-dire l’intendant chargé de gérer la maison avec deux autres questeurs. A l’entendre, « pour redevenir audible, l’Assemblée nationale doit commencer par devenir exemplaire sur les plans individuels et collectifs ». D’où un catalogue d’économies diverses et variées afin de faire maigrir un budget qui s’élève à 550 millions d’euros par an. Mais surtout, « nous anticipons un engagement fort réaffirmé au Congrès de Versailles par le président de la République, la réduction d’un tiers du nombre de parlementaires », explique-t-il (Journal du dimanche, 5 novembre 2017). Et là, M. Bachelier ne va pas se faire que des amis.
Une loi ordinaire ne pourra pas régler la question car le nombre de députés (577) et de sénateurs (348) est fixé par la Constitution (article 24). Une révision constitutionnelle s’impose donc. Si le Président n’utilise pas la voie référendaire, le Parlement sera réuni en Congrès ; « dans ce cas, le projet de révision n’est approuvé que s’il réunit la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés. » (Article 89). C’est-à-dire que, sur les 925 parlementaires, le Président a besoin de trouver 555 volontaires pour faire passer la révision. A l’Assemblée nationale, il peut compter sur 360 députés (313LREM et 47 MoDem) et sur 21 LREM au Sénat. Reste à trouver 174 supplétifs. Au Palais-Bourbon, chez les 35 « Constructifs » ? Au palais du Luxembourg, chez les 49 Union centriste, chez les 11 « indépendants de droite eu du centre » ? Chez les 21 « Rassemblement démocratique et social européen » (radicaux de gauche) ?
Si Florian Bachelier s’était donné la peine d’effectuer additions et soustractions, il aurait constaté que l’arithmétique ne lui est pas favorable ; d’autant plus qu’on ne voit pas quel intérêt députés et sénateurs n’appartenant pas à la majorité officielle aurait de voter leur mise à mort. Restera alors au Président à utiliser l’arme atomique : le référendum.
Que pensent de tout cela les 37 députés de Bretagne qui ne seront plus que 25 lorsque Florian Bachelier aura réussi son opération « réduction du budget de l’Assemblée » ? Même question pour les 19 sénateurs de nos cinq départements condamnés à devenir 13. Ont-ils un goût prononcé pour le suicide ?
B. Morvan
Crédit photo : G. Garitan/Wikipedia (cc)
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2 réponses à “Un « tueur » nommé Florian Bachelier”
L’article 24 de la constitution ne fixe que des maximums aux effectifs des chambres qui sont fixées par une loi organique. Or les contraintes de ce caractère organique ne sont pas rédhibitoire pour la majorité actuelle : »
« le texte n’est soumis à l’examen de la première assemblée saisie
qu’au moins six semaines après son dépôt sauf si la procédure accélérée
est utilisée ;
l’Assemblée nationale ne peut avoir le dernier mot qu’à la majorité
absolue de ses membres, alors que la majorité relative est suffisante
pour les lois ordinaires ;
l’accord du Sénat est nécessaire pour l’adoption des lois organiques qui lui sont relatives ;
le contrôle de la conformité de la loi à la Constitution par le Conseil constitutionnel est obligatoire. »
L’homme est ainsi fait qu’il espère toujours que c’est le voisin qui se fera tuer. Sans quoi, tous les soldats déserteraient. Individuellement, les parlementaires ne se prononceront pas forcément contre la réduction de leur nombre. Mais si on leur demande leur avis collectivement, en corps constitué lors d’un Congrès, il est probable qu’ils seront contre. Du moins peut-on compter sur un fort absentéisme pour raisons médicales ! Car alors la question signifiera pour eux : « Voulez-vous avoir une chance sur trois de perdre votre poste ? » Même pour les élus LREM, cette question serait très traumatisante.
Comme le président n’a aucun intérêt à traumatiser sa majorité, l’option référendum est sans doute la seule possible. Vu l’ambiance d’antiparlementarisme, s’il avait lieu aujourd’hui, le résultat ne ferait guère de doutes. Et peu de députés oseraient vraiment faire campagne pour le non. Ce serait pour Emmanuel Macron l’occasion de remporter une victoire pas trop difficile, en amenant au moins deux Français sur trois à voter pour sa position. Je ne vois pas pourquoi il se priverait de ça. En revanche, on peut imaginer qu’il attende le moment propice où un tel référendum lui servirait à détourner l’attention d’une question plus délicate pour lui.