Dès 1950, Sacha Guitry lançait un cri du cœur à la France rurale qui disparaissait. Exaltation du terroir, son film Le Trésor de Cantenac vient de sortir en DVD.
Le baron de Cantenac (Sacha Guitry), au bord de la ruine, a choisi de se donner la mort dans son village où abondent les querelles mesquines. Ainsi, le maire et le curé (René Génin) sont frères jumeaux, mais ennemis jurés. C’est alors qu’un vieillard de 128 ans révèle au baron la cachette d’un trésor oublié, lequel appartenait autrefois au Sire de Cantenac, son lointain ancêtre. Ce trésor avait été caché lors de la destruction du château par les révolutionnaires, en 1793. A nouveau riche, au lieu d’employer le trésor à son usage personnel, le baron choisit d’en faire profiter les villageois. Ainsi renait le village.
Chacun oublie ses querelles et retrouve la joie de vivre. Même le maire rentre dans l’église pour se réconcilier avec son frère. Dans son château reconstruit, le baron accueille les villageois à une fête costumée. Il reprend ainsi goût à la vie et décide de devenir maître verrier… Le Trésor de Cantenac est un film français écrit, dialogué, réalisé par Sacha Guitry et sorti en 1950. Guitry commence par narrer, en voix off, l’« histoire miraculeuse » d’un village français imaginaire qui était voué à disparaitre. Le générique original présente les acteurs, lesquels sont les villageois eux-mêmes : le maire, le curé, l’idiot, le boulanger, la gitane… Mais la providence permet au village de renaître. Le baron construit ainsi un nouveau château qu’il veut « très français ». On retrouve dans ce film en noir et blanc l’esprit caustique de Guitry. Guitry célèbre ainsi l’aristocratie et les valeurs du terroir.
Sacha Guitry (1885–1957) a longtemps été méprisé par les critiques du septième art, qui ne voyaient dans son oeuvre de cinéaste que du théâtre boulevardier. Brillant comédien de théâtre à l’humour caustique, Guitry affirme dans l’écriture le goût du bon mot. Puis il adapte au cinéma certaines de ses pièces. En 1936, il réalise Le Roman d’un tricheur, son chef-d’œuvre. Sous l’Occupation, Guitry entend maintenir à Paris l’esprit français face à l’occupant allemand en poursuivant ses activités artistiques de théâtre et de cinéma. Il reprend notamment Pasteur, pièce qui glorifie la France et qui comporte des répliques anti-allemandes. Guitry considère que son album 1429-1942 : De Jeanne d’Arc à Philippe Pétain, publié en 1944, est « un véritable monument à la gloire de la France ». Il le présente lors d’un gala à l’Opéra de Paris le 23 juin 1944, accompagné d’un film de présentation. Mais à la Libération, le 23 août 1944, Guitry est arrêté par des FFI qui lui reprochent son attitude à l’égard de l’occupant allemand. Il est incarcéré. Le juge d’instruction l’inculpe pour « intelligence avec l’ennemi », et Guitry répond : « Je crois, en effet, n’en avoir pas manqué ». Il est libéré le 24 octobre 1944 et obtient en 1947 un non-lieu tardif. Il défend son comportement dans le film Le Diable boiteux (1948), biographie de Talleyrand qui poursuivit son travail sous des régimes politiques différents avec comme seul but de servir la France. Il continue de tourner des comédies mais s’émeut aussi de la disparition des vieux villages de France (Le Trésor de Cantenac, 1950). Enfin, il réalise plusieurs fantaisies historiques à la gloire de la France, notamment Si Versailles m’était conté (1953).
Kristol Séhec.
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