09/06/2017 – 15H00 Édimbourg (Breizh-info.com) � Les résultats de l’élection générale britannique sont difficiles à analyser, ce qui permet aux commentateurs français de dire pas mal de bêtises. À les entendre, on pourrait croire que les Conservateurs ont été battus et que les électeurs ont voté contre le Brexit. En réalité, les Conservateurs sont vainqueurs avec 42,4 % des voix et gagnent 5,5 points par rapport à la précédente élection !
Bien entendu, Theresa May espérait mieux en provoquant l’élection avec deux ans d’avance. Ce qu’elle n’avait pas prévu, c’est que l’Ukip (United Kingdom Independent Party) allait être laminé, tombant en deux ans de 12,7 % des suffrages à 1,9 %, et qu’une bonne partie de ses électeurs allaient se tourner vers les Travaillistes. Ces derniers progressent davantage que les Conservateurs (+9,5 points) et obtiennent 40,1 % des voix.
Le mode de scrutin britannique (majoritaire, de circonscription, à un tour) a fait le reste : la remontée des Travaillistes étant supérieure aux progrès des Conservateurs, les premiers gagnent 31 sièges tandis que les seconds en perdent 12. Les Conservateurs restent majoritaires au Parlement mais n’y détiennent plus la majorité absolue. Là réside leur « défaite ».
La quasi-disparition de l’Ukip signifie-t-elle que les électeurs britannique se repentent du Brexit ? Probablement pas. Le Brexit voté, la mission de l’Ukip paraissait accomplie ; le parti était d’ailleurs en proie à des conflits internes. Une bonne part de ses électeurs venaient du travaillisme ; ils y sont probablement retournés. Le positionnement « populiste » du leader de gauche Jeremy Corbyn, qui s’est gardé de faire campagne sur les thèmes européens, a pu les y aider.
Une remontée des Travaillistes qui profite aux Conservateurs
Le SNP est l’autre perdant incontestable de l’élection : il abandonne 21 des 56 sièges qu’il détenait depuis 2015. La perte la plus voyante est celle du siège de Gordon, détenu depuis 1987 par Alex Salmond, ancien leader du SNP et premier ministre écossais. Mais la plus sévère est celle de Moray, où Angus Robertson est battu par un Conservateur. Ancien journaliste de 48 ans, numéro 2 du SNP, Angus Robertson était leader du groupe indépendantiste à la Chambre des communes. Parfaitement germanophone (sa mère est allemande), il est réputé pour sa connaissance des questions européennes.
Les sièges perdus par le SNP vont d’abord aux Conservateurs. Mais les Travaillistes en ont aussi leur part, notamment à Glasgow, plus grande ville d’Écosse, où le Labour récupère le siège conquis haut la main par Anne McLaughlin en 2015. Quand au parti Libéral-démocrate, il récupère le siège de l’East Dunbartonshire, qu’il avait perdu en 2015. Globalement, les reculs du SNP semblent principalement dus aux progrès des Travaillistes : en arrachant des voix aux nationalistes, ils les font parfois passer en seconde position derrière un candidat d’un autre parti, qui est donc élu.
Le SNP va-t-il revoir sa stratégie ?
Le revers des nationalistes est relatif : le Scottish National Party demeure le premier parti d’Écosse et sa position au parlement écossais n’est pas menacée dans l’immédiat. Pourtant, il va devoir s’interroger sur quatre points de sa stratégie :
· L’opposition au Brexit. Elle a sans doute été payante électoralement dans une Écosse où le « non » au référendum du 23 juin 2016 a été très majoritaire. Sauf exception : à Banff and Buchan, près d’Aberdeen, où la pêche tient une place importante, le Brexit est arrivé en tête et un Conservateur reprend le siège du SNP.
· L’Indyref2. Le projet d’un deuxième référendum sur l’indépendance a été agitée avec insistance par le SNP lors de la campagne électorale, alors que les Écossais n’y semblaient pas très favorables. Les Conservateurs l’ont agité comme un épouvantail. L’idée devra probablement être laissée de côté pour un moment.
· Le cap à gauche suivi ces dernières années par Nicola Sturgeon, leader du parti et Premier ministre. Il a permis d’attirer des électeurs déçus par le Labour. Mais ceux-ci ont peut-être préféré l’original à la copie : l’activisme affiché par Jeremy Corbyn les a en partie ramenés au bercail.
· La politique en faveur de l’immigration. icône de cette politique, Tasmina Ahmed-Sheikh perd le siège d’Ochil and South Perthshire, conquis en 2015.
Crédit photo : [cc] Scottish Government via Flickr [cc]
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