19/05/2017 – 07h40 Paris (Breizh-Info.com) – Pour la première fois depuis bien longtemps, le Premier ministre a nommé à la tête du ministère de la Santé un médecin et non pas un professionnel de la politique. Il s’agit d’Agnès Buzyn. Elle fût entre 1992 et 2011, responsable de l’Unité de soins intensifs d’hématologie adulte et de greffe de moelle au sein de l’Université Paris V-Hôpital Necker, après avoir été interne des Hôpitaux de Paris.
Fervente opposante aux lobbys du vin – elle a dénoncé l’alcool, « deuxième cause de mortalité en France ». Mais elle est accusée d’être complaisante eu égard des lobbys pharmaceutiques.
Elle va par ailleurs devoir s’attaquer à plusieurs chantiers vivement commentés par plusieurs syndicats de médecin suite à sa nomination.
Pour la Fédération des Médecins de France cette nouvelle nomination « doit être l’occasion de s’éloigner du dogmatisme et de la pseudo concertation imposés ces cinq dernières années ».
La Fédération des Médecins de France préconise notamment des mesures pour :
- Sécuriser et améliorer la prise en charge du patient
La Fédération des Médecins de France réclame une vraie coordination entre médecins généralistes, spécialistes, libéraux et hospitaliers pour sécuriser la prise en charge du patient tout en protégeant la confidentialité des données. Équipons les médecins de logiciels communicants pour échanger les données en point à point, de manière sécurisée, plutôt que de créer de vastes bases de données en accès libre à toute personne publique ou privée tel que le Système National des Données de Santé.
- Sortir des déserts médicaux
Les maisons de santé pluridisciplinaires (MSP), tarte à la crème du précédent gouvernement et des candidats à la Présidence pour résoudre le problème des déserts médicaux, constituent en réalité une fausse solution : l’absence de médecins sur le territoire n’est pas liée à l’absence de bâtiments mais à un manque d’attractivité pour la médecine de proximité. Restaurer l’attractivité de la médecine de proximité, c’est l’urgence vitale !
Il faut pour cela redonner au médecin de proximité les moyens d’exercer son métier, grâce au forfait structure qui leur permettra de travailler dans des conditions acceptables, avec un outil de coordination, un secrétariat d’accueil et /ou un assistant médical, des locaux adaptés, et une confiance rétablie avec les tutelles plutôt que des relations de méfiance aux limites du harcèlement.
Il faut également faire connaître l’exercice de la médecine de proximité aux étudiants et aux internes pour qu’ils n’aient plus peur de s’installer. La FMF propose de :
- les inciter fortement à effectuer leur stage en zone démographiquement faible en adoptant l’exemple corse qui a fait ses preuves depuis plus de 10 ans : doublement du salaire, prise en charge des transports et du logement. La démographie redémarre en Corse qui a su appliquer ces mesures !
- leur garantir une couverture sociale et maternité, identique à celle des salariés au moins lors de leurs première années d’installation.
Pour ReAGJIR, le syndicat qui rassemble et représente les jeunes médecins généralistes (remplaçants, jeunes installés et chefs de clinique), il y a 4 chantiers majeurs sur lesquels il lui semble urgent d’intervenir en priorité :
Améliorer la protection sociale et lutter contre les déserts médicaux
« Le système de prévoyance n’offre tout simplement aucune couverture aux remplaçants non thésés et un délai de carence de 90 jours en cas d’arrêt maladie pour les médecins installés. Quelle autre profession doit être malade pendant 3 mois consécutifs avant de pouvoir prétendre à une protection sociale ? ».
Le syndicat souhaite attirer l’attention de la ministre sur cette précarité, qui contribue à renforcer les déserts médicaux puisque cela constitue un frein sérieux à l’installation en libéral.
« Cela devra être, pour nous, une des priorités de la nouvelle ministre. Tous les jours, nous aidons et conseillons nos adhérents sur des problèmes liés à la précarité de leur protection sociale. Il est temps de régler cela. », explique le Dr. Sophie Augros, Présidente de ReAGJIR.
Vers une corporation pluri-professionnelle
Le deuxième axe important et porté entre autres par ReAGJIR est l’ouverture au travail pluri-professionnel.
En France, le constat est unanime : la population est vieillissante et la désertification médicale ne cesse d’augmenter. Les acteurs du système de santé se sont réunis à plusieurs reprises pour réfléchir aux moyens de panser cette réalité et trouver ensemble des solutions efficaces et pérennes. L’exercice de groupe et la délégation de tâches sont alors apparus comme des prérequis à la médecine de demain.
Actuellement, de plus en plus de médecins se dirigent vers l’exercice à plusieurs. Cela permet de mutualiser les moyens et certains postes de dépenses (comme avoir un secrétariat commun), mais cela permet surtout de garantir la continuité des soins. Le syndicat ReAGJIR se positionne aussi pour une délégation de certaines tâches historiquement attribuées aux médecins mais qui pourraient tout à fait être prises en charge par d’autres professionnels de santé, ce qui libérera du temps médical au praticien qu’il pourra investir auprès de ses patients. Evidemment cette meilleure collaboration entre professionnels de santé à tous les niveaux doit être pensée pour que tous s’y retrouvent.
La diversification de la rémunération des médecins
Pour le syndicat, l’exercice des médecins a évolué et la rémunération doit suivre et être repensée : « En effet, au-delà de l’exercice, les types de prises en charge se sont eux aussi diversifiés et il est logique que la rémunération corresponde à la pratique. Le paiement à l’acte n’a plus lieu d’être dans la mesure où il ne correspond plus à la réalité du métier. », explique le Dr. Sophie AUGROS.
La solution proposée par ReAGJIR serait d’établir un mode de rémunération pour chaque mission.
Accès aux soins pour tous
La problématique de l’accès aux soins est double : à la fois géographique et économique.
En fonction de leur lieu de résidence, certaines personnes ont du mal à trouver un médecin rapidement. Cela peut être dû à une surcharge d’activité du praticien ou encore au fait que le médecin le plus proche soit loin. La répartition des médecins sur le territoire français n’est pas optimale.
« Pour autant il est prouvé qu’obliger un médecin à s’installer à un endroit ne réglera pas le problème. Nos voisins belges et allemands ont tenté d’instaurer des mesures coercitives qui ont débouché sur la fuite des médecins et des étudiants en médecine. », rapporte le syndicat.
Lutte contre les déserts médicaux, amélioration de la protection sociale, meilleure prise en charge des patients, voici les principaux chantiers qui attendent la nouvelle Ministre.
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