Retards sur la ligne SNCF Nantes – Rennes par Redon : les usagers excédés

24/03/2016 – 07h30 Nantes Breizh-info.com) – Ils n’en peuvent plus. Les usagers réguliers de la ligne Nantes – Rennes via Redon et Savenay, qu’ils soient navetteurs abonnés professionnels, lycéens ou étudiants, en ont assez des retards systématiques que connaît cette ligne, certes très chargée et affaiblie par des travaux entre Rennes et Redon. Mardi soir, alors qu’un incident de signalisation sur le contournement de Redon infligeait trois quarts d’heure de retard à des passagers venus de Nantes, ils se sont confiés à nous sur le quai. Verbatim.

Pour Vanessa, qui prend le train régulièrement, y en a « ras-le-bol. Rien n’est à l’heure, ni entre Rennes et Nantes, ni entre Rennes et Paris d’ailleurs. Les seuls qui sont à peu près à l’heure, ce sont les trains qui relient Rennes à Brest ». Gaël le confirme en partie, « je prends le train tous les jours. Il n’y a pas de retard systématique sur cette ligne, en fait il n’y a pas plus ni moins de retards que sur les autres lignes ».

Pour Michelle, « y en a marre. Vraiment. Je ne suis pas une usagère régulière de la ligne, je ne la prends guère que deux, trois fois par semaine. Mais à chaque fois, il y a des retards. Dix minutes par ci, une demi-heure par là, une heure par là, finalement mis bout à bout ça fait 24h de perdues par mois ; 24 heures où j’aurai pu être utile pour mes enfants, pour les autres – je suis médecin – plutôt que d’attendre sur un quai dans le froid ou à m’énerver dans le train parce qu’on est plantés en pleine cambrousse et qu’à Rennes, ou Nantes, je vais encore louper mon bus, et ajouter du retard au retard ».

Alexis prend la ligne depuis huit ans : « je travaille à Nantes et je vis à Rennes. Et depuis trois ans c’est vraiment le bordel. Il y a dix minutes de retard régulièrement, souvent un peu plus. Habituellement quand le train est planté comme là [le direct Nantes-Rennes qui ne devait pas passer par Redon y a fait son terminus à cause de la panne de signalisation], ils envoient des bus qui sont blindés. Là, c’est l’heure de pointe, pas moyen de trouver un bus [tous pris dans les transports scolaires à cette heure], donc c’est un TGV qui monte à Rennes depuis Quimper qui nous prend au passage. C’est du bricolage permanent, y en a assez ».

Pour lui, les problèmes sont dus à la mauvaise organisation de la SNCF et des deux régions Bretagne et Pays de Loire. « Avoir fait le tram-train à Châteaubriant, c’est une connerie monumentale. La ligne directe elle passait par là, il fallait la remettre de façon à avoir des directs ou semi-directs là-bas, et faire l’omnibus ici ». Il ajoute que « les travaux qui durent depuis deux voire trois ans, ça va aussi. Et le fait qu’on n’est jamais tenus au courant, que la SNCF oublie même de s’excuser, d’expliquer pourquoi il y a des retards récurrents. Ce serait la moindre des choses quand même ».

Face aux désordres sur la ligne, les élus locaux ne cachent pas leur perplexité et le manque d’informations dont ils disposent de la part des autorités gestionnaires – SNCF et région Bretagne.=. Dans Les infos du pays de Redon (15 au 21 mars), on trouve un compte-rendu du vote, début mars, du GIP du pays de Redon, en présence du maire de Redon et du député (PS) Jean-René Marsac. Alors que le député faisait part de son inquiétude pour la desserte ferroviaire de Redon, le maire centriste Pascal Duchêne affirmait qu’il « obtient difficilement des informations de la SNCF, il n’est pas normal que nous ayons été collectivement négligés par nos partenaires », en visant nommément Gérard Lahellec, vice-président de la région administrative Bretagne chargé des Transports.

La course à la ponctualité et l’organisation voulues par la Région Bretagne mis en cause par les cheminots

Dans le TGV remontant sur Rennes, nous avons trouvé un cheminot qui donne sa version, mais pas son nom – il a un devoir de réserve. Pour lui, les malheurs des voyageurs sur la ligne Nantes-Redon-Rennes « sont en partie dus aux travaux, en partie à la course à la ponctualité de la région Bretagne, Redon étant devenue la gare des correspondances ultra-courtes entre Nantes et Rennes. Trop de ponctualité nuit à la ponctualité, les marches sont de plus en plus courtes, dès qu’il y a un grain de sable – et il y en a tout le temps – la machine s’enraye et rien ne marche plus. Puis la desserte des petites gares est saccagée aussi, y compris à une certaine distance de Rennes et de Nantes, notamment Redon, Pontchâteau, Messac-Guipry.

Avoir des directs Rennes-Nantes qui ne s’arrêtent ni à Savenay – où il y a la bifurcation vers Saint-Nazaire – ni à Redon où il y a celle vers Vannes et Quimper, c’est un non-sens en terme d’exploitation et de commerce. Avoir des trains qui vont de Lorient à Rennes sans s’arrêter à Redon, idem. Un train, ça ne prend pas seulement des voyageurs qui vont de l’origine au terminus, c’est aussi là pour ceux qui s’arrêtent sur le trajet, qui le prennent pour aller ailleurs ensuite etc. C’est comme si on voulait qu’une grande rivière ait un débit puissant alors qu’on détourne tous ses affluents ».

Rennes moins bien reliée à Nantes que Luçon !

Au fil de l’eau, un autre voyageur, un Nantais, se jette dans la discussion. « Je suis Nantais, la Bretagne, c’est ma région culturelle, mais pas administrative. Mais j’aimerais bien choper le c…ard, je pèse bien mes mots, qui fait les fiches horaires entre Rennes et Nantes. Parce que ce type, il doit avoir une belle caisse, donc il se fiche des voyageurs. Le dernier train de Rennes pour Nantes part à 19h28 en semaine. Ce qui signifie que si on fait la fête avec des amis à Rennes, qu’on va au théâtre, à une conférence, à une soirée, si on n’a pas le permis, soit on se fait loger, soit on ne va pas à Rennes. Pour ceux qui travaillent avec des horaires tardifs ou qui font des heures sup, c’est la galère aussi ».

Il continue : « Mon métier m’emmène souvent au sud de Nantes, du côté de La Roche-sur-Yon, voire de Luçon ou de la Rochelle ; et j’aime bien prendre le train, c’est pratique pour ce que je fais. Pour info, le dernier train de Luçon pour Nantes est à 20h28 en semaine ; il passe à 21h11 à la Roche-sur-Yon. Un bled de même pas 10.000 habitants paumé entre La Roche sur Yon et la Rochelle, certes une ville-évêché mais c’est quand même un bled paumé, qui a failli perdre sa gare il y a deux ans, et qui est mieux desservi par rapport à Nantes que Rennes, autrement plus importante ? On marche sur la tête ! »

Il conclut : «  De deux choses l’une : soit les types qui font les fiches horaires ne supportent pas Nantes et se vengent publiquement, sur le dos de milliers de voyageurs. Soit ils sont idiots, et comme leur bêtise coûte très cher à Rennes, qui perd en interactions possibles et en attractivité pour les Nantais – mais aussi tous ceux qui habitent au sud de l’Ille-et-Vilaine et au nord de la Loire-Atlantique, leur bêtise, il faut qu’ils la payent. Dans le privé, ça marche comme ça. Dans le public, personne n’est responsable de rien et tout le monde subit tête basse. Cela ne peut plus durer ».

Louis Moulin

Crédit photo : DR
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