Le nouveau film de Patrick Buisson Ce Monde ancien – Les derniers Gaulois , réalisé par Guillaume Laidet est diffusé sur la chaîne Histoire depuis le 1er mars. C’est à l’exploration d’un continent englouti que nous invite ce documentaire aux magnifiques images en noir et blanc, celui de la France paysanne. Motorisation, remembrement, exode rural : tout un monde a basculé dans les années 50. Il a tout emporté avec lui, type humain et mode de vie, traditions et paysages.En moins de deux générations un monde plurimillénaire qui n’avait guère changé depuis les travaux et les jours du poète grec Hésiode avait disparu.
Images d’archives, de film, de documentaires nous montrent les mêmes visages qu’on ne retrouve plus que sur les photos jaunies des albums familiaux. Il n’ y avait pourtant rien d’idyllique dans ce monde dur rythmé par les saisons. Le film de Buisson ne cède jamais à de vagues nostalgies écologistes pour bobos urbains.
Il nous fait entendre les voix de grands écrivains disparus, les derniers témoins comme Gustave Thibon, Jean Giono, Henri Pourrat, Marcel Aymé, Pierre-Jakez Hélias et bien d’autres comme Henri Vincenot qui écrivait dans La billebaude en 1978 : « A notre insu, lentement, courageusement, opiniâtrement, on nous arrachait au singularisme païen, pour nous préparer aux fructueux échanges universels, c’est-à-dire, pour pouvoir un jour, tous unis et confondus, nous servir des mêmes barèmes, des mêmes machines à laver et devenir de bons consommateurs inconditionnels, se contentant des mêmes HLM ».
D’autres auteurs plus contemporains comme Michel Le Bris racontent la folie destructrice qui fit raser en Bretagne les talus millénaires qui protégeaient du vent et retenaient la pluie. Après de nombreuses citations Patrick Buisson laisse le mot de la fin au sociologue américain Christopher Lasch : « Le déracinement déracine tout sauf le besoin de racines ».
Si son film a rencontré un écho favorable dans l’hebdomadaire Valeurs actuelles – « A sa manière il prend date (…) une stèle mais aussi une pierre d’attente » – il a profondément déplu à Télérama : « Antienne passéiste […] un chapelet d’images pieuses qui tient lieu de filmographie […] un assemblage artificiel et misérabiliste […] qui non content de réveiller de vieilles plumes pétainistes entreprend aussi d’extirper du légitime oubli où il croupissait : Alphonse de Châteaubriant ». C’est aussi le seul nom que retient du film l’hebdomadaire Marianne. Châteaubriant romancier breton, prix Goncourt et auteur de La Brière, fit durant la dernière guerre un choix extrême qui l’amena à l’exil et à la condamnation à mort par contumace. Ces deux journaux ne savent sans doute pas que le Président François Mitterrand qui admirait le talent de prosateur d’Alphonse de Châteaubriant fit créer à la Bibliothèque nationale un fonds d’archives et de manuscrits consacré à son œuvre. Dans toutes les guerres civiles, il y a le temps de la haine, celui du pardon puis reste le patrimoine. La presse de gauche l’ignore encore.
Le film de Patrick Buisson sera projeté sur la chaîne Histoire le 16 mars à 20H40.
Projection spéciale au cinéma « Le grand palace » des Sables d’Olonne le 17 mars à 20H.
François Cravic
Crédit photos : DR
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