30/12/2016 – 06H45 Carhaix (Breizh-info.com) – Richard Ferrand (PS), député de Carhaix –Châteaulin, était tout fier d’annoncer que «80%» des adhérents de sa circonscription lui avaient accordé l’investiture pour les élections législatives de 2017 (France Inter, 11 décembre 2016). Évidemment, il se gardait bien de préciser combien la section en question comptait de membres…à jour de leur cotisation.
Mais, depuis la fin octobre, Ferrand est devenu secrétaire général du mouvement En marche, machine avec laquelle Emmanuel Macron compte arriver à l’Élysée. L’ancien ministre-banquier sera donc le premier adversaire du candidat du PS – Valls ou un autre – lors de l’élection présidentielle.
Mais les choses se gâtent depuis la convention nationale du PS destinée à valider les investitures des candidats désignés par les adhérents pour les élections législatives. Christophe Borgel, secrétaire national en charge des élections, s’est montré ferme : « Ceux qui en février soutiendront un candidat qui n’est pas socialiste ne seront pas eux-mêmes candidats socialistes». En clair, après la primaire,, les députés macronistes se verront retirer l’investiture du PS pour les élections législatives : « On ne peut pas jouer à la fois à l’Om et au PS » (Le Figaro, 19 décembre 2016).
Mais cette mesure ne semble pas impressionner Ferrand. Il y avait déjà répondu, s’adressant à Jean-Christophe Cambadélis : «Quand on est chef d’un parti qui a perdu en cinq ans la moitié de ses adhérents, et qu’on veut virer une autre partie, on finit par se retrouver dans le plus simple appareil !» (Le Figaro, 23 novembre 2016).
Peut-être s’estime-t-il incontournable. C’est ce que semble penser Marc Coatanéa, premier secrétaire fédéral du Finistère : «Richard Ferrand est le seul capable de nous faire conserver cette circo» (Le Télégramme, 1er octobre 2016). Mais, dans le Finistère, Ferrand compte également de nombreux adversaires, qui dénoncent son côté girouette. «Je n’ai jamais appartenu à aucune écurie ! », se récrie Ferrand, entré au PS par fascination pour Mitterrand, mais étranger aux petits calculs de Solférino comme aux manœuvres de congrès. Pragmatique et surtout discipliné. « Dans mon esprit, le numéro 1 du parti, c’était forcément le meilleur d’entre nous, celui qui devait être notre candidat naturel à la présidentielle. C’est pourquoi j’ai soutenu Emmanuelli en 1995, pétitionné pour Hollande en 2007 et rallié Aubry en 2012 ! » (Libération, 5-6 novembre 2016). Pas contrariant le personnage, prêt à tous les arrangements.
La prudence devrait pourtant inciter le bras droit de Macron à surveiller ses arrières. En effet, au premier tour des législatives de 2012, il était arrivé en tête : 18 300 voix (32,29%) pour lui, 15 733 voix (27,76%) pour le candidat de la droite, 11 286 voix pour le régionaliste Christian Troadec et 4 312 voix (7,61%) pour le FN. Il l’emporte pourtant facilement au second tour grâce au retrait de Troadec – qui voulait faire barrage à la droite – en obtenant 31 965 voix (58,36%) contre 22 807 voix (41,64%) à Dominique Cap (divers droite), maire de Plougastel-Daoulas. Que se passera-t-il cette fois si un candidat étiqueté « PS officiel » prenait le départ de la course ? A coup sûr, le capital électoral dont bénéficiait Ferrand au premier tour de 2012 se partagerait entre le macroniste et le légitimiste. Avec le risque de ne pouvoir atteindre la barre des 12,5% des inscrits indispensable pour se qualifier au second tour. Voilà qui ferait le bonheur de Christian Troadec qui a besoin d’une division de la gauche parisienne pour l’emporter.
Mais ce qui est vrai en décembre ne l’est pas forcément en février, à cause des sondages. A plus forte raison après la présidentielle. En effet, avec un Macron en position de force, la rue de Solférino perdrait de sa superbe. Un accord électoral s’imposerait alors afin de sauver ce qui est sauvable. D’où une répartition des circonscriptions entre les frères ennemis. Ce qui pourrait arranger les affaires d’un Ferrand qui a tout à gagner à demeurer le candidat unique de la gauche officielle. Sinon, gare à Troadec !
Cette question se pose également à Corinne Erhel (PS), député de Lannion, autre macroniste bretonne. Quant à Jean-Pierre Le Roch, déuté de Pontivy, il ne craint rien puisqu’il a annoncé qu’il ne se représentera pas aux législatives de 2017.
Bernard Morvan
Photo : DR
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