15/12/2016 – 10H00 Nantes (Breizh-info.com) – Contexte terroriste oblige, l’évacuation du site occupé par les opposants à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique) n’est manifestement plus d’actualité pour le nouveau gouvernement. Bernard Cazeneuve l’a bien précisé hier à l’Assemblée nationale. Retour sur une volte-face qui provoque la fureur des partisans du projet.
Mercredi 23 novembre 2016 (matin). Un curieux ministre de l’Agriculture que Bernard Le Foll ; ne pas défendre la cause des peetits paysans constitue sa religion. C’est le cas avec Notre-Dame-des-Landes ; il se garde bien de s’opposer à l’expulsion des agriculteurs prévue par Vinci et Manuel Valls. Ce jour là, il en apporte une nouvelle fois la preuve : « Je confirme ce qu’a dit Manuel Valls », déclare-t-il. «La zad de Notre-Dame-des-Landes sera évacuée avant la fin de l’année» (BFM TV).
Mercredi 23 novembre 2016 (après-midi). Le lobby du BTP peut toujours compter sur le concours de serviteurs zélés – la droite et la gauche – pour défendre ses intérêts au Parlement ; ces derniers ne manquent jamais une occasion de relancer Manuel Valls, alors Premier ministre, sur le projet de construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Ce jour-là c’est Marie-Françoise Clergeau (PS) député de Nantes-centre, qui était de service : « Monsieur le Premier ministre, pouvez vous nous confirmer que les travaux vont bien être engagés, et nous indiquer dans quels délais ? ». On sent le chef du gouvernement mou du genou : « Le préfet a déjà eu l’occasion de réunir les élus pour préparer la reprise des travaux. Il appartient maintenant au ministre de l’Intérieur de préparer les conditions qui permettront demain l’engagement des travaux. » (Assemblée nationale, questions au gouvernement). On n’en saura pas d’avantage ; il n’est plus question de lancer l’offensive des gendarmes avant la fin de l’automne, ce que Manuel Valls répétait depuis plusieurs mois. Le flottement semble avoir remplacé les coups de menton auxquels Valls nous avait habitués…
Jeudi 8 décembre 2016. Une source « proche du dossier » explique que la nomination de Bernard cazeneuve change tout. « L’ancien ministre de l’Intérieur considère qu’une « intervention policière dans la ZAD risquerait de provoquer un Sivens puissance 27 », autrement dit une bataille rangée pouvant causer des morts. Un message qu’il a déjà fait passer au chef de l’État. Depuis la rentrée, Cazeneuve a transmis plusieurs notes des renseignements territoriaux et de la gendarmerie sur la situation dans le bocage nantais. Elles dressent un tableau guère encourageant. Sur place, un certain nombre de militants radicaux sont prêts à en découdre avec les forces de l’ordre. Ils pourraient être rejoints par plusieurs centaines d’opposants pacifistes, mais non moins déterminés à empêcher l’évacuation. Tous les ingrédients sont réunis pour un face-à-face à hauts risques. » Sans oublier le coût politique dont est bien décidé à se passer un François Hollande en fin de mandat : « l’obligation pour l’État de donner l’ordre de faire demi-tour, comme ce fut le cas lors de l’opération « César » en octobre 2012. Tous ces calculs interviennent dans un contexte de menace terroriste élevée, avec l’obligation de sécuriser les festivités de fin d’année (grands magasins, marchés de Noël). « Est-ce le bon moment pour mobiliser durablement 2500 gendarmes autour de Notre-Dame-des-Landes », interroge la « source proche du dossier », sans doute quelqu’un de Matignon (Libération).
Vendredi 9 décembre 2016. Une dépêche d’agence annonce le report de l’évacuation de la ZAD en citant « l’entourage du Premier ministre ». « Le projet d’aéroport n’est pas abandonné, mais une telle opération, l’évacuation de la zone, se prépare dans des conditions qui doivent être sécurisées, à la fois sur le plan juridique et sur le plan opérationnel », explique un proche du Premier ministre (Le Monde, 11-12/12/2016). En effet, outre l’affrontement physique avec les paysans et les zadistes se pose le problème du contentieux avec Bruxelles. « En avril 2014, la Commission européenne a mis en demeure la France de respecter le droit de l’environnement. Bruxelles reproche à l’État d’avoir fragmenter les impacts environnementaux cumulés de l’aéroport et de ses accès (routes, tram-train, TGV). La France n’a toujours pas régularisé cette infraction. C’est en cours, une étude plus globale est annexée à la révision d’un document d’urbanisme, le schéma de cohérence territoriale (Scot) de la métropole Nantes – Saint-Nazaire. Il sera soumis au vote des élus le 19 décembre » (Ouest-France, 10-11/12/2016).
Colère chez les pro-aéroports. Par exemple, Alain Mustière : « Le renoncement de François Hollande à lancer les travaux abîme une fois de plus l’image de la classe politique. L’histoire se souviendra de lui comme celui qui a cédé à la violence illégitime d’une poignée d’extrémistes. » L’histoire se souviendra davantage de celui qui promettait de mettre « la finance » au pas (discours du Bourget) !
Mercredi 14 décembre 2016. Interrogé lors de la traditionnelle séance de questions au gouvernement, par le député (LR) Alain Chrétien qui lui reprochait que le projet de NDDL ait disparu des « priorités » du gouvernement et lui demandait donc ce « que sont devenues les grandes déclarations péremptoires » de Manuel Valls et les engagements de François Hollande, Bernard Cazeneuve a précisé sa position : « « Le sujet n’est pas de savoir s’il faut ou non évacuer la ZAD. Bien entendu qu’il faut le faire, pour des raisons qui tiennent au fait que dans un État de droit, le droit doit être respecté, que nul ne peut par la violence s’opposer à l’expression de la souveraineté des élus lorsqu’ils respectent le droit ni aux décisions qu’ils prennent ».
Pour le nouveau Premier ministre, « sur un sujet de ce type, comme sur la question de Calais il ne s’agit pas d’être (…) dans les incantations. (…) Il faut être dans la méthode, dans l’efficacité, et il faut être sûr que l’opération que l’on conduit se déroulera sans violences, avec une véritable réussite et la possibilité pour cette infrastructure de se faire. (…) C’est la raison pour laquelle, compte tenu de ce qui est le niveau de mobilisation des forces – vous pouvez l’ignorer, mais moi je ne peux pas l’ignorer parce qu’il y a une menace terroriste extrêmement importante à laquelle l’État doit faire face -, j’ai demandé au ministre de l’Intérieur de bien vouloir déterminer les conditions d’une opération pragmatique, efficace et qui permette de faire en sorte que cet aéroport puisse se faire », a-t-il conclu.
Alors quand est-ce que l’«opération pragmatique, efficace et qui permette de faire en sorte que cet aéroport puisse se faire» aura lieu ? La question n’est pas dénuée d’intérêt, notamment pour Vinci. En effet, «le 18 janvier prochain, l’ordonnance d’expropriation arrivera au terme de ses cinq ans de validité (…) Et le 10 février 2018, ce sera au tour de la déclaration d’utilité publique de tomber » (Presse Océan, 10/12/2016). Ainsi le dossier pourrait s’étouffer tout seul, sans que François Hollande ne se soit mouillé…
Bernard Morvan
Photo : Galerie collective : non à Notre-Dame-des-Landes/Flickr (cc)
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5 réponses à “Notre-Dame-des-Landes. Bernard Cazeneuve arrête les frais”
Je ne suis ni pour ni contre ce aéroport mais je trouve minable le maque de courage des Valls ou Cazeneuve .Nous sommes vraiment gouvernés par des incapables qui ne pensent qu’a leur poste(et donc à leur fric)
Même si l’aéroport de Notre Dame des Landes ne voit pas le jour, il est inconcevable que tous ces fauteurs de troubles y restent habiter. Comme les autres, les impôts fonciers et compagnie ça existe. Des sangsues qui vivent aux crochets des besogneux.
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non. Les frais sont énormes et vont peser sur les impôts.
Tant mieux qu’ils le fassent sur les Champs-Élysées leur aéroport destructeur !