08/12/2016 – 06H30 Quimper ( Breizh-info.com) – Quelques semaines après les difficultés rencontrées à l’occasion de la venue du romancier Laurent Obertone à Quimper, mais aussi après avoir analysé la rentrée politique dans la capitale de la Cornouaille, nous avons souhaité faire le point avec Ludovic Jolivet, maire (LR) de la ville. Bilan politique, situations locale régionale et nationale, nous avons abordé avec lui tous les sujets, sans tabou. Verbatim.
Breizh-info.com : Tout d’abord, pourriez vous dire un mot à nos lecteurs sur « l’affaire Obertone » et le refus de location de salle. Il semblerait que tout parte en réalité d’un malentendu ?
Ludovic Jolivet : Il y a des sujets sensibles et des causes qui peuvent engendrer des risques ou des troubles à l’ordre public, dans des périodes qui le sont tout autant. Il n’y a pas d’affaire Obertone. Le tribunal a tranché, la salle attribuée. Je ne commenterai pas une décision de justice. Cet avis du tribunal administratif étalonne nos jugements et nos décisions. Dont acte.
Breizh-info.com : Vous vous êtes félicité de la victoire de François Fillon, après avoir notamment soutenu Bruno Le Maire. Pour quelles raisons ?
Ludovic Jolivet : Je n’avais pas a priori de candidat de prédilection. Je ne suis pas un homme de parti, je n’ai pas de héros désigné… En revanche j’ai apporté mon soutien à Bruno Le Maire en raison de sa fraicheur, ses compétences, son parcours, son positionnement, son projet. Finalement cela est très subjectif. Dans une primaire de sa famille politique, les fondamentaux sont les mêmes, seules les stratégies diffèrent, heureusement. Son score a été décevant, ça arrive.
Au soir du 1er tour, le score de François Fillon était sans appel, net (44%). Le mouvement était vaste. Le peuple de droite s’est mobilisé. C’était le fait marquant, un score de rassemblement autour de ce candidat. Finalement, il faisait la synthèse des prétendants. Fillon est un homme pondéré. Son programme a été bien travaillé, c’était probablement le plus abouti. Il était lisible, compréhensible, simple.
JF Copé a créé le concept de « droite décomplexée »…F.Fillon l’incarne sans l’avoir une seule fois évoqué. C’est une droite franche, souvenez-vous de sa formule en 2007, « je suis à la tête d’un état en faillite »…, qui tranche, une droite libérale, sociale à la Seguin, capable de réunir toutes les tendances.
Quand il affirme que la première des politiques sociales, c’est l’emploi, il a raison. Le peuple de droite a besoin de message clair, fédérateur, affirmé ; pas de louvoiement face à la situation du pays. En tous les cas son score l’oblige.
Breizh-info.com : En Bretagne, Alain Juppé a été largement balayé (moins dans les grandes villes mais battu tout de même) par François Fillon. N’est-ce pas un signe que la droite et le centre en Bretagne – qui sont restés des années dans le giron de Pierre Méhaignerie notamment – sont déconnectés de la réalité de leurs électeurs, qui attendent une droite plus dure et plus libérale ?
Ludovic Jolivet : Les Bretons sont tolérants et combatifs, ouverts et engagés. Respectueux des règles du droit et des devoirs et ils l’ont prouvé dans l’histoire. Ils sont travailleurs, ne rechignent pas à la tâche. Ils sont durs à l’épreuve… c’est notre ADN.
Face à une Europe qui ne sait pas trop où elle va et un monde qui ne rassure pas plus, la France a besoin de « clés » pour comprendre les bouleversements que nous traversons. La Bretagne n’échappe pas à la règle, à l’ambiance générale.
Les Bretons ont besoin de travailler, ils n’aiment pas vivre au crochet de la société, parce qu’ils sont fiers. Nous devons lever les freins pour que l’entreprise innove et créer de l’emploi, produise de la richesse, qu’elle soit redistribuée équitablement. Pour cela il faut la confiance. Dans confiance, il y a confiant…confiant en l’avenir. Ce n’est pas le cas.
La nation n’a plus les moyens de ses politiques publiques, elle laisse de côté les plus fragiles. La gauche n’a pas pu redistribuer, alors elle a engagé des reformes sociétales, qui ne rassurent pas plus, qui bousculent les français et les opposent. Ce sont les conditions d’une certaine forme de repli. En revanche, il se retrouve dans l’esprit que souhaite incarner François Fillon un positionnement assumé, une foi en l’avenir, la confiance, du travail !
Breizh-info.com : Nous sommes revenus il y a une semaine, sur quelques points de votre bilan de rentrée à la mairie de Quimper. Y’a t’il une crise politique à Quimper actuellement ? Une partie de votre majorité semble ne plus vous suivre, pour quelle raison ?
Ludovic Jolivet : Il n’y a pas de crise politique au sein de la majorité municipale. C’est quoi une crise politique ? C’est lorsque qu’on ne trouve plus de majorité dans la majorité, que le bureau municipal est éclaté, le Maire mis en minorité, qu’aucune synthèse ne soit possible…nous en sommes très loin ! Nous sommes dans un mandat inédit, instable et incertain.
La baisse des dotations, la loi NotRe mettent à mal nos repères. Ce n’est pas de tout repos, mais cela fonctionne bien. Nous sommes en avance sur les reformes, les économies à réaliser et nous allons poursuivre en ce sens.
Que certains ne soient pas toujours à l’aise dans un groupe, ne trouvent pas leur place pour de multiples raisons cela ne me surprend pas…la chose publique est vaste et l’exercice d’un mandat peut être ingrat dans le contexte actuel.
Pensez qu’il y a déjà davantage de démissions d’élus municipaux depuis le début de cette mandature que sur la totalité du mandat précédent, en Bretagne !
Breizh-info.com : Vous avez décidé de suspendre le club de Kermoysan de tout terrain de football (Inter de Kermoysan). Pour quelles raisons ? Pourquoi y’a t’il très souvent une omerta autour des clubs « communautaires » selon vous ?
Ludovic Jolivet : « Derrière le maillot, on est tous égaux ! » . Il y a eu des faits graves lors d’un match. Cela est intolérable lorsque l’exemple ne vient pas du terrain de sport. Nous avons pris, à titre conservatoire des mesures pour éviter que cela s’envenime. Le sport, les pratiques, la règle et l’état d’esprit doivent être exemplaires, quel que soit le club.
La république doit au mieux intégrer ses enfants, la république ce n’est pas le repli. Le joueur auteur des coups a été suspendu pour deux ans, la victime a porté plainte. La justice suit son cours. Le sport ne doit pas être pris en otage, ni être la vitrine, le lieu où la virilité, la brutalité et le mauvais état d’esprit des communautés s’expriment et génèrent une très mauvaise image. Je ne supporte pas la violence sur un terrain de sport. Je le répète, nous devons être exemplaires.
Breizh-info.com : Beaucoup de choses ont par ailleurs été dites sur le projet de deuxième grande mosquée turque à Quimper. Aujourd’hui concrètement, où en est ce projet (un permis de construire ayant été annulé en avril 2016) ? Les responsables de la communauté turque de Quimper sont-ils proches de l’AKP de M. Erdogan , comme cela a été plusieurs fois rapporté ?
Ludovic Jolivet : La rénovation de la mosquée turque est un sujet sensible, très sensible. Ce projet devra s’intégrer au paysage, à l’urbanisme local. Nous avons repoussé par deux fois le permis de construire pour des raisons techniques et nous avons transmis récemment à l’association Turque, un « sursis à statuer » en raison du futur PLU (Plan Local d’urbanisme).
La collectivité Quimpéroise ne se prononce qu’en fonction des règles d’urbanisme. Aucun autre élément n’intervient dans nos décisions en la matière. C’est la loi.
Breizh-info.com : Comment voyez vous les prochaines échéances électorales arriver ? En Bretagne, Jean-Yves le Drian a reproché à Marc le Fur et à son équipe de laisser le terrain au Front national, qu’en dites vous ?
Ludovic Jolivet : Nous devons d’abord avoir l’ensemble des protagonistes, pour imaginer la suite de l’histoire présidentielle. Surprise il y a eu, surprise il y aura… Jean-Yves Le Drian est dans la tactique. Le Parti Socialiste a délaissé le terrain et le peuple depuis longtemps, et il en paye les conséquences.
C’est curieux de reprocher cette attitude au parti Les Républicains ! Si le Président/ministre de la région Bretagne veut parler du théâtre et des envolées lyriques lors des sessions, c’est autre chose.
La gauche a toujours essayé d’utiliser le FN pour combattre les LR. Dehors sur le terrain, je vois beaucoup de militants LR, les PS n’osent pas trop se montrer sauf sur les réseaux sociaux entre eux. Quant aux militants de FN, finalement, on les voit assez peu.
Propos recueillis par Yann Vallerie
Photo : DR
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3 réponses à “Ludovic Jolivet (maire de Quimper) : « Le Parti socialiste a délaissé le terrain et le peuple depuis longtemps » [Interview]”
Le moins que l’on puisse dire c’est que, contrairement à ce que dit cet élu, les militants et les élus LR sont d’une très grande discrétion, en particulier au Conseil régional où leur absentéisme est récurrent. Le Fur y passe furtivement, pour prouver qu’il existe encore, et quitte l’assemblée dès qu’il a terminé de lire ses courriels. Le Conseil régional ne l’intéresse que très peu, semble-t-il, à la différence des élus du FN qui y sont très présents
Bizarre la réponse à votre première question, non?
Merci à Claudine Dupont Tingaud de l’association RéAGIR pour sa lutte de tous les instants contre la mosquée truque à Quimper.
En ce qui concerne les footeux de Kermoysan, la vermine a réussi à créer un club communautariste qui rejette » l’autre » puisque n’appartenant pas à leur communauté. Bravo le vivre ensemble.