03/08/2016 – 07H00 Carhaix (Breizh-info.com) – Trente-cinq parlementaires soutiennent Emmanuel Macron dans son opération « Elysée 2017 ». Parmi les groupies du banquier-ministre, deux députés bretons : Corinne Erhel (PS, Lannion) et Richard Ferrand (PS, Châteaulin-Carhaix). Ce dernier en fait des tonnes dans son soutien au ministre de l’Économie : « Quoi de mieux qu’un banquier pour faire sauter la banque ! » (Ouest-France, mercredi 13 Juillet 2016).
Porte-parole zélé de Macron, Richard Ferrand s’insurge lorsque Jean-Christophe Cambadélis, patron du PS, raconte qu’il verrait bien le banquier-ministre occuper un poste clé lors de la campagne présidentielle à venir – au profit de François Hollande bien entendu. Pour Ferrand, « Emmanuel Macron n’a pas pour projet de rabattre pour qui que ce soit. Il l’a dit, écrit et répété. Et s’il [Hollande] cherche quelqu’un, je vois très bien Jean-Christophe Cambadélis lui-même être directeur de la nouvelle campagne du chef de l’État ».
Selon Ferrand, les soutiens de Macron « ont bien compris qu’il n’est pas un rabatteur ». « Dans ma circonscription, explique-t-il, ce sont des militants et sympathisants du PS pour beaucoup. Il leur donne envie de tenter quelque chose de positif, autre chose qu’un vote seulement destiné à empêcher le retour de la droite ou la montée du FN ». Pour lui, sans ambiguïté, « même s’il est ouvert à d’autres propositions qui viennent d’ailleurs car personne n’a le monopole des bonnes idées, Emmanuel Macron est bien situé sur la gauche de l’échiquier » (Le Figaro, 12 juillet 2016).
Avec de pareils propos, on comprend que le militant véritablement « socialiste » et non point « de gauche » soit troublé. Effectivement, il ne faut pas compter sur Macron pour nationaliser les banques, les assurances et les entreprises stratégiques.
Le Drian agacé
Les nouvelles occupations fort peu bretonnes de Ferrand ne peuvent qu’agacer Jean-Yves Le Drian, « hollandais » historique. Tout simplement parce que le député de Carhaix est également le président du groupe socialiste au conseil régional de Bretagne – le fief de Le Drian. Autre sujet de mécontentement pour le ministre de la Défense : l’ancien banquier d’affaires (Rothschild) est venu prononcer le discours de clôture du « West web festival » organisé dans le cadre des Vieilles charrues à Carhaix (vendredi 15 juillet), après avoir visité la société d’autocars Salaün, grande opératrice des « autocars Macron ». C’est pourquoi la veille, en marge des festivités du 14-Juillet, Jean-Yves Le Drian avait tenu à faire passer un message à son collègue de l’Économie qu’il a exhorté à « jouer collectif ». « Il n’y a pas de ménage à trois », a affirmé le ministre de la Défense, en référence au duo exécutif dans lequel Macron ne peut, selon lui, avoir sa place (Ouest-France, 15 juillet 2016). À la vérité, Le Drian n’a jamais apprécié que des éminences de la gauche parisienne viennent piétiner les terres bretonnes – les siennes.
« Préempter l’avenir »
À quel jeu joue le banquier-ministre ? Dans un entretien au Figaro (13 juillet 2016), Gérard Collomb (PS), fidèle lieutenant de Macron et sénateur-maire de Lyon, fournit l’explication suivante à propos du fameux meeting de la Mutualité : « Ce rendez-vous est utile. Il permet de nourrir une dynamique nouvelle, face à des partis politiques qui peinent à rassembler. Ce meeting de la Mutualité permet aussi de préempter l’avenir. Car personne n’es devin et personne ne sait ce que sera la situation politique à la rentrée et à la fin de l’année. Il y a un vide à combler, et c’est ce que fait Emmanuel Macron. Il est d’avantage en phase avec l’évolution de la société française que ne le sont les responsables politiques dont le discours est souvent daté ».
Comme Gérard Collomb sait lire les enquêtes, il aura certainement décortiqué avec attention le sondage BVA portant sur les intentions de vote des sympathisants du PS – les plus susceptibles de voter lors de la primaire en janvier 2017 – qui dessine un match à trois entre François Hollande (21%), Emmanuell Macron (19%) et Martine Aubry (18%) (Ouest-France, 13/07/2016). Et surtout le baromètre TNS Sofres de juillet qui montre que la cote de confiance de François Hollande est tombée à 12% et celle de Manuel Valls à 20% (Le Figaro magazine, 01/07/2016). Dans ces conditions, on comprend pourquoi Gérard Collomb tient tellement à « préempter l’avenir ».
Préempter – « Faire jouer un droit de préemption pour acquérir » (Robert)
Préemption – « action d’acheter avant un autre » (Robert)
B. Morvan
Crédit photo :Ferrand/Wikimedia (cc)
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