Jeux vidéo. Bolloré va-t-il avaler les frères Guillemot ?

31/07/2016 – 07H00 Paris (Breizh-info.com) – À coup sûr, la société Ubisoft apparaît la plus fragile des grandes entreprises bretonnes. Partis de peu – leur père exploitait à Carentoir (près de Redon) une petite affaire de produits du sol et d’aliments du bétail -, les cinq frères Guillemot se sont lancés avec succès dans les jeux vidéo (Ubisoft et Gameloft). Ils ont fait fortune et ont gagné un train de vie confortable (mariage à l’Hermitage, le célèbre palace de La Baule). Mais ils ont fait preuve d’une grande imprudence. Grâce à la Bourse, ils ont pu financer l’expansion de leur entreprise sans avoir recours aux banques, mais surtout en conserver le contrôle.

Le capital flottant présente des avantages mais aussi des inconvénients. Si avec seulement 10 ou 15% du capital, les fondateurs peuvent demeurer les patrons, la situation se complique lorsqu’un « glouton » aux gros moyens commence à acheter du « papier » sur le marché. Mésaventure qui  vient d’arriver aux frères Guillemot avec Vincent Bolloré. Avec les petits porteurs, la vie était belle pour les Guillemot, mais avec l’entrée de Bolloré dans le capital, c’est la déconfiture. Les premiers ont déjà capitulé avec Gameloft que Vivendi a avalé. Une seconde bataille se prépare avec Ubisoft. Mardi 18 juillet 2016, Vivendi (donc Bolloré) a annoncé avoir poursuivi sa montée au capital de l’éditeur de jeux vidéo, atteignant 22,8% du capital contre 20,10 au dernier comptage. Vivendi détient 20,2% des droits de vote d’Ubisoft, contre 17,77 précédemment (Le Monde, 20/07/2016).

Que vont faire les Guillemot des 150 millions d’euros que leur a valu la cession de leurs parts dans Gameloft à Vivendi (Bolloré) ? « Tous les regards se tournent vers Ubisoft, dont Vivendi détient déjà 17,7% du capital, devant les cinq frères bretons et leur 8,7%. La fratrie pourrait réinvestir son pécule pour racheter 4% du caital supplémentaire de l’éditeur d’Assasin’s Creed et de Watch Dogs. Insuffisant pour repousser l’assaut de M. Bolloré » (Le Monde, 03/06/2016).

Une seule solution pour les Guillemot : trouver un partenaire industriel ou financier qui les aidera à stopper Bolloré ; La banque Lazard est investie de cette mission. S’ils avaient songé dans le passé à s’assurer le bloc de contrôle – comme Yves Rocher avait réussi à le faire avec Sanofi -, ils ne seraient pas aujourd’hui dans le pétrin.

En dernier lieu, les Guillemot pourront peut-être utiliser l’arme absolue : quitter le navire Ubisoft et monter une entreprise nouvelle ave l’argent obtenu par la cession à Bolloré de leur part dans le capital de l’entreprise. Et si les créatifs – qui sont la richesse de la maison – les suivent, Vincent Bolloré pourra se flatter d’avoir acheté une coquille vide. Car les jeux vidéos, c’est essentiellement de la matière grise.

B. Morvan

Crédit photo : DR
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2 réponses à “Jeux vidéo. Bolloré va-t-il avaler les frères Guillemot ?”

  1. Pschitt dit :

    Y’a qu’a ! S’il prenait fantaisie aux Guillemot de créer une nouvelle entreprise ex nihilo avec une partie de leurs anciens collaborateurs, peut-être réussiraient-ils grâce à leur fortune, leur talent et leur énergie, qui sont grands, mais ils auraient un gros handicap à remonter. Le capital intellectuel d’Ubisoft est « cristallisé dans ses programmes (et c’est déjà énorme, car leur modularité permet de les réutiliser pour de nouveaux développements) et dans ses « franchises » c’est-à-dire la réputation, l’image, l’existence d’une communauté de passionnés. Ce patrimoine-là restera chez Ubisoft. Les Guillemot, qui ne sont pas tombés de la dernière pluie, en sont sûrement conscients.
    Par ailleurs, qualifier de « déconfiture » l’entrée de Bolloré (ou plutôt de Vivendi) dans le capital d’Ubisoft ne rime à rien. Bolloré n’est pas seulement un « glouton » : avec Vivendi, il a une stratégie industrielle (qui rappelle celle de Jean-Marie Messier, d’ailleurs — mais Vincent Bolloré a sûrement mieux bordé son affaire). Qu’il ait choisi Ubisoft pour la mener à bien ne plaît sans doute pas aux Guillemot, mais c’est un hommage et sûrement pas une déconfiture.
    Qu’on incline vers les Guillemot ou vers Bolloré dans cette affaire, une chose est sûre : on ne peut que ce féliciter qu’il existe des chefs d’entreprise bretons de cette trempe !

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