Le vendredi 24 juin au soir, les invités d’Elisabeth Quin sur le plateau d’Arte (invités qui sont pour l’essentiel des lascars estampillés bobos pur beurre tels Léa Salamé, Renaud Dély ou Jean Quatremer) étaient de toute évidence submergés par un immense désarroi ; les traits étaient tirés et les visages étaient pâles. Le résultat du référendum britannique les avait accablés dès le lever et ils n’avaient toujours pas récupéré du coup de gourdin matinal. Nous aurions aimé contempler le visage de ce phare de la pensée occidentale qu’est BHL (vous savez, cet olibrius qui est à l’origine du chaos et de la guerre civile qui règnent en Lybie) lequel s’est fendu d’un tweet à 3h47 du matin en ce 24 juin pour annoncer la déroute des souverainistes xénophobes et racistes et nous faire part de sa volonté de refonder l’Union européenne !
C’est Arnaud Leparmentier, le journaliste du Monde, qui a exprimé, au cours de cette émission, le fond de la pensée eurocratique, à savoir qu’il y a des décisions qui doivent être réservées à une élite de décideurs compétents et que certaines décisions ne doivent plus pouvoir être remises en cause, notamment les décisions prises par les eurocrates, bien évidemment. Ce point de vue est tout à fait scandaleux et totalement contraire à l’esprit de la démocratie lequel est tout aussi opposé à la dictature des experts qu’à celle des juges. Dans une réelle démocratie, tout peut être remis en cause, y compris les principes les plus essentiels.
Le 27 juin, sur Radio Classique, Alain Minc a comparé le peuple britannique à un enfant qui a fait une ‘’connerie’’ et auquel on doit donner une deuxième chance. Ce propos est éloquent. Pour notre oligarque, les peuples sont infantiles, immatures et dotés d’une capacité de jugement insuffisante : « Ce référendum n’est pas la victoire des peuples sur les élites, mais celle des gens peu formés sur les gens éduqués ». Il est vrai que Minc est un récidiviste ; dans une interview accordée à Paris Match, il avait exprimé, il y a déjà de nombreuses années l’idée d’un retour au suffrage censitaire. Selon Minc, seuls les riches ont les qualités qui permettent d’être citoyen.
Autre figure de proue de l’européisme déraciné, Jacques Attali a écrit : «un tel référendum implique qu’un peuple peut remettre en cause toute évolution considérée jusque-là comme irréversible, telle qu’une réforme institutionnelle, une conquête sociale, une réforme des mœurs» ! Mais par qui les évolutions imposées par l’oligarchie eurocratique, laquelle n’a jamais jugé nécessaire de demander aux peuples un accord démocratiquement validé, sont-elles considérées comme irréversibles si ce n’est par cette seule oligarchie despotique ?
«C’est la dictature du populisme et de l’égoïsme des nations»
Et Attali d’ajouter que le niveau raisonnable d’une majorité devrait être fixé à 60% ; pourquoi pas, mais dans ce cas, il aurait fallu organiser des référendums concernant tous les traités adoptés par l’Union européenne en prenant en compte ce même niveau et il est à peu près certain qu’aucun de ces traités n’aurait été adopté. Attali a par ailleurs exprimé le fond de sa pensée : pour lui le résultat du référendum britannique « C’est la dictature du populisme et de l’égoïsme des nations ». Pour la caste oligarchique mondialisée, qui est profondément libérale, les nations et les peuples sont les ennemis à abattre. La ligne de fracture majeure en ce début de 21ème siècle se situe entre ceux qui pensent en termes de peuples et de nations et ceux qui ne connaissent que des individus et l’humanité. Cette ligne de fracture est aussi d’ordre géopolitique puisque l’on voit se profiler un conflit entre les Etats qui pensent en termes de nations enracinées (Russie, Chine…) et les Etats universalistes dont les Etats-Unis sont le chef de file.
Quant au journaliste Jean Quatremer, il nous a expliqué dans Libération que le référendum est l’exact contraire de ce qu’est la démocratie parce que le référendum ce serait la dictature de la majorité. Il est vrai que la dictature de la minorité telle qu’elle est pratiquée par Bruxelles et ses satellites nationaux c’est beaucoup mieux ! Notons au passage que cet argument de la dictature de la majorité est un argument typiquement libéral et que Quatremer ne s’inquiète pas de la dictature de la majorité quand cette dernière va dans son sens.
La règle démocratique vaut ce qu’elle vaut mais à ce jour on n’a pas trouvé de meilleure solution pour maintenir la concorde au sein des peuples, sous réserve qu’une majorité de circonstance ne puisse pas confisquer le pouvoir, ce qui implique que le principe républicaniste de non domination arbitraire (en l’occurrence de non domination arbitraire de la minorité par la majorité) soit respecté.
‘’Oui. Je hais les nations, épiphénomène sanglant de l’histoire humaine, et méprise les nationalistes ’’
Suite au Brexit, Gaspard Koenig, un jeune philosophe libéral chouchouté par les médias, nous a fait part de sa haine sur Figarovox : ‘’Ce référendum a fait ressurgir l’autre Angleterre, celle des hooligans et des Little Englanders. Cela semble méprisant ? Oui. Je hais les nations, épiphénomène sanglant de l’histoire humaine, et méprise les nationalistes ’’. Voilà qui a le mérite d’être clair !
Les membres de la caste bobocratique ont hérité de la gauche un sentiment de supériorité intellectuelle et morale qui remonte à 1789. Comme l’a souligné le sociologue Jean-Pierre Le Goff : ‘’…elle mettait directement en cause une idée clé de la gauche qui structure son identité depuis longtemps et constitue comme un point aveugle de certitude : la gauche dispose d’une supériorité morale sur ses adversaires, elle est en quelque sorte le dépositaire de l’idée du Bien’’ (‘’La gauche à l’épreuve 1968-2011’’).
Cette croyance est, selon Jean-Pierre Le Goff, ‘’un obstacle à son renouvellement’’ mais la gauche n’a pas renoncé à s’approprier la morale : ‘’au fur et à mesure que son ancienne doctrine tombait en morceaux, elle a sombré dans l’imprécation et la dénonciation’’. Cette caste qui a partie liée avec la caste mondialisée des affaires hait les nations et veut les détruire pour laisser le champ libre au seul marché (la nomination de Barroso , ex maoïste et ex Président de la sinistre Commission européenne, à un poste très important chez Goldman Sachs illustre parfaitement le fait qu’elle est au service du ‘’big business’’ ; l’écologiste Eva Joly vient de montrer dans un livre récent que son successeur Jean-Claude Juncker est lui aussi très lié aux grandes compagnies pour lesquelles il a aménagé un super paradis fiscal au cœur de l’Europe, le Luxembourg).
Le fait que les peuples résistent et se montrent capables de renverser la table la rend folle ; elle réagit par le mépris et l’injure, mais aussi par la mise en cause du bien-fondé de la démocratie. La caste hystérique va essayer de nous imposer une marche forcée vers l’intégration politique des Etats européens ; cela ne fonctionnera pas.
Cette fuite en avant ne fera qu’accélérer le processus de dislocation parce que les peuples comprennent de plus en plus clairement que la construction européenne en cours est a-démocratique (c’est Juncker lui-même qui l’a dit : « Il ne peut y avoir de choix démocratiques contre les traités européens ») et que les décisions prises par les eurocrates sont funestes (ainsi, c’est le rejet majoritaire de la politique démente de ces derniers en matière d’immigration qui est la cause essentielle du Brexit). La disparition de l’organisation de Bruxelles est inévitable.
B. Guillard
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