Cinéma. 7 films à voir ou à revoir sur le Cycle arthurien

Breizh-info vous propose désormais une chronique hebdomadaire intitulée « 7 films à voir ou à revoir » et réalisée par Virgile pour le Cercle Non Conforme, qui nous a donné son accord pour reproduire le texte.

Cette semaine, 7 films à voir ou à revoir sur le thème du Cycle arthurien.

Issu d’un ensemble de textes médiévaux autocentrés autour de la figure du roi Arthur, le Cycle arthurien compte parmi les plus merveilleuses gestes européennes. Loin de constituer un texte unique, la légende arthurienne s’est au contraire enrichie, à partir du 9ème siècle, de divers apports issus des traditions orales bretonnes et, plus généralement celtiques, compilés par plusieurs générations d’écrivains. C’est le poète du 12ème siècle Chrétien de Troyes qui, le premier, fixe par écrit la légende dans ses Romans de la Table Ronde et fait émerger la Quête du Graal, voyage initiatique parsemé d’embuches visant à la découverte du vase contenant le Sang du Christ. De la même manière, l’amour que se portent le chevalier Lancelot et Guenièvre préfigure-t-il les romans d’amour courtois qui dicteront une part importante de la littérature médiévale.

Et la Quête de transcender très rapidement les frontières du monde celte pour s’internationaliser et former la quintessence de l’aventure européenne, jusque dans les mondes germanique et slave qui conservent le souvenir de la Table Ronde dans le Royaume mythique de Bretagne, regroupant une majeure partie de l’Angleterre contemporaine et un territoire non défini de la Bretagne armoricaine. L’unité de temps est également conservée quelque soit sa forme et les influences internationales subies. Aussi, le Cycle arthurien prend-il place après le départ des troupes romaines d’Angleterre à la fin du 5ème et au début du 6ème siècles. Transformée, réécrite, adaptée, la littérature arthurienne parvient jusqu’à notre monde moderne, popularisée de nouveau par les écrits de Xavier de Langlais ou Jean Markale au 20ème siécle. Et il ne sera pas exagéré d’indiquer, qu’avec Homère et Virgile, le Cycle arthurien est père de toute la littérature de contes et légendes initiatiques ; Le Seigneur des anneaux de John Ronald Reuel Tolkien demeurant la plus parfaite illustration. Païen et chrétien solaire, le Cycle arthurien a massivement débordé le cadre de la littérature pour être largement repris dans l’ensemble des autres arts, de la peinture au théâtre en passant par le chant, et bien évidemment le cinéma. Plus ou moins inspirés, dans tous les sens du terme…, du Cycle arthurien, plus ou moins fidèles aux textes initiaux ou, au contraire, en totale confrontation, on dénombre pas moins d’une soixantaine de films, téléfilms, dessins animés et séries s’y rattachant. Et le phénomène semble s’accélérer dans la seconde moitié du 20ème siècle.

Rentré de plein fouet dans notre ère désenchantée et matérialiste, le cinéma, majoritairement anglo-saxon , entreprit de contribuer au réenchantement du monde. Le chef-d’œuvre en la matière est signé John Boorman qui rend à la légende ses lettres de noblesse païenne, évolienne et eliadienne pourrait-on dire. Par ailleurs déjà auteur de Lancelot et la reine chevalerie hyperboréenne et féminité, l’écrivain Nicolas Bonnal, dans son dernier ouvrage Le Paganisme au cinéma, indique qu’Excalibur « est une grande réussite : la fin de cette chevalerie arthurienne est une fin de notre monde. Bienvenue après au centre commercial et à la salle de bains américaine ». Plus qu’un film, Excalibur est un crachat lancé à la figure hideuse de la médiocrité contemporaine. Excalibur et quelques autres à découvrir maintenant ! Et la Quête ne fait que commencer en réalité. Le destin de l’Europe est à ce prix…

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LES BRUMES D’AVALON

Titre original : The Mists of Avalon

Film américano-germano-tchèque d’Uli Edel (2001)

Une invasion barbare se précise sur les côtes anglaises. Les hommes de Camelot se préparent à défendre le Royaume d’Avalon dont Viviane est la grande prêtresse de ce monde invisible aux impies. Elle est la Dame du Lac chargée de la préservation des traditions et mythes païens du royaume. Même pour les fidèles, Avalon devient un lieu mystérieux de plus en plus introuvable tant sont nombreux ceux qui se détournent de la Déesse-Mère. Il faut un roi à la Bretagne ! Et c’est aux femmes qu’il revient de le trouver. Viviane est rejointe dans sa quête par Morgaine, désignée à sa succession un jour, et sa sœur Morgause, femme du Roi Lot qui, au prix de nombreuses infamies, intrigue en vue de capter l’héritage du trône à son profit. L’irréversible combat que vont se mener ces trois femmes va changer à jamais la destinée du Royaume d’Arthur Pendragon et de ses chevaliers…

Réalisée pour la télévision, cette mini-série de deux téléfilms est bien évidemment tirée de deux romans du Cycle d’Avalon de l’écrivaine américaine Marion Zimmer Bradley qui assume une réécriture de fond en comble des mythes arthuriens. Sacrilège !, ne manquerons pas de hurler certains d’entre nous. Fidèle au roman, Edel filme son histoire à l’aune de ses personnages féminins narrant l’histoire d’Arthur au cours de trois heures de téléfilm à grand spectacle qui contiennent cependant de nombreuses longueurs. Et c’est peu dire… Le réalisateur filme, en revanche, magnifiquement certaines scènes, à l’instar des feux de Beltaine. On pourrait croire au premier abord à un film de contes et légendes pour enfants. Les têtes blondes feront pourtant bien de ne pas regarder certaines scènes de mœurs assez… « païennes ».

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CAMELOT

Film américain de Joshua Logan (1967)

Roi du pays pacifié de Camelot, ceint par une merveilleuse forêt enchantée, Arthur épouse Guenièvre et fonde la confrérie des chevaliers de la Table Ronde. Ce mariage arrangé devenu romance procure au royaume une forte période de stabilité, de liberté et de justice, dont les chevaliers doivent constituer le fer de lance. Arrive de France Lancelot du Lac qui formule le vœu de rejoindre l’ordre chevaleresque. Arthur voit en celui-ci un fils mais le chevalier trahit son roi en tombant éperdument amoureux de la reine Guenièvre dont il devient bientôt l’amant. Cet amour interdit précipite la fin de la confrérie…

Le Cycle arthurien se décline à toutes les sauces. Aussi en 1960, Alan Jay Lerner et Frederick Loewe produisent-ils une comédie musicale à Broadway, adaptée d’un roman de Terence Hanbury White, dont la réalisation de Logan constitue l’adaptation cinématographique revisitée. A titre d’exemple, sont manquants les personnages de Viviane et la fée Morgane. Idem, la Quête du Graal. Camelot est l’anti-Excalibur de Boorman et développe un curieux univers Flower Power, il est vrai bien contemporain en 1967. Une plaisante mise en scène, des décors et costumes soignés, et pourtant, Camelot laisse un goût amer. La faute peut-être à une théâtralisation trop académique qui peine à convaincre. A plus forte raison, le film dure trois heures… De même, la qualité des chansons mises en scène laisse à désirer. Pour une camelote musicale, c’est un comble !

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LES CHEVALIERS DE LA TABLE RONDE

Titre original : The Knights of the Round Table

Film anglais de Richard Thorpe (1953)

Au 6ème siècle, au sein d’un royaume miné par les dissensions internes, le Roi Arthur s’appuie sur Merlin l’Enchanteur et le chevalier Lancelot pour ramener la paix sur l’ensemble de ses terres. L’ordre des Chevaliers de la Table Ronde qu’Arthur fonde doit pourvoir à ce but. A la cour, l’intrépidité et l’élégance du chevalier Lancelot font l’unanimité auprès de tous. Presque tous…, car Mordred, un des chefs de clan rebelle jalouse le prestige dont jouit le chevalier et cherche par tous les moyens à ourdir contre lui. La reine Guenièvre est son talon d’Achille ; Lancelot et la reine éprouvant de forts sentiments auxquels leur loyauté empêche de se livrer. La fée Morgane, mère de Mordred, diffuse la calomnie dans tout le royaume. Afin de faire taire les médisances, Lancelot épouse dame Elaine et fuit la cour pour guerroyer. Les périls pointent à l’horizon. Lancelot absent, la malédiction s’abat sur le royaume sans protection face à l’appétit saxon, affaibli qu’il est par les tensions au sein de l’ordre de chevalerie…

Une année après Ivanhoé, la société de production hollywoodienne Metro-Goldwyn-Mayer récidive en confiant à Thorpe une adaptation du Cycle du Graal. Et la M.G.M. met le paquet dans cette superproduction à très haut budget pour l’époque. Pour qui n’est pas un héraut fanatique de l’imaginaire arthurien, le résultat est à la hauteur grâce à un subtil mélange de romance dramatique et de guerre chevaleresque, accompagné d’une sublime musique de Miklos Rózsa. Il est une curieuse tradition pour chaque réalisateur s’essayant au cinéma arthurien : gommer certains personnages et parties de l’intrigue. Ici, c’est à Viviane d’en faire les frais tandis que Merlin et la Quête du Graal ne sont quasiment pas évoqués. Une fois n’est pas coutume, Ava Gardner peine à convaincre, à la différence de Robert Taylor, grande figure de la geste cinématographique médiévale anglo-américaine. Un petit bijou.

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EXCALIBUR

Film américain de John Boorman (1981)

De Merlin l’Enchanteur, Uther Pendragon reçoit l’épée Excalibur sortie des eaux par la Dame du Lac. A Uther revient la mission d’unir et de pacifier le Royaume de Bretagne. Mais les espoirs de Merlin sont bientôt ruinés par les amours du Roi qui convoite la belle Ygraine, épouse du duc de Cornouaille. Afin qu’Uther séduise Ygraine, Merlin use de sa magie et offre les traits du duc à Uther. Du lit illégitime nait Arthur qu’enlève Merlin à son père en échange de l’utilisation de ses pouvoirs. A la mort d’Uther, Excalibur demeure scellée dans une stèle de granit. Il est dit que seul celui qui parviendra à retirer l’Epée deviendra Roi. Seul Arthur parvient à extraire le métal de la pierre et le brandir. Quelques années plus tard, le nouveau Roi épouse Guenièvre en même temps qu’il fonde la Table Ronde. Sa demi-soeur, la fée Morgane intrigue et parvient à enfanter un bâtard d’Arthur. L’enfant va provoquer la perte du Roi…

Si le film de Boorman peut sembler avoir vieilli sous certains aspects, quel chef-d’œuvre il demeure ! Le réalisateur livre l’adaptation cinématographique la plus fidèle au Cycle arthurien dans sa chronologie malgré quelques entorses imposées par la nécessité de ne pas produire une œuvre trop longue. Elle est également la transposition la plus païenne de la légende au cinéma tant un grand soin est apporté aux rapports de l’homme à Dame Nature et aux apports prodigués par celle-ci. Boorman fait également la part belle à la Quête du Graal en opposition avec les autres réalisations arthuriennes. Cet Excalibur résonne, en outre, comme une tragédie grecque dans laquelle le destin de chacun est aliéné, empêchant toute possibilité d’échappatoire. Quant aux mélomanes, ils apprécieront, à n’en pas douter, l’immixtion précieuse d’œuvres de Richard Wagner et Carl Orff. A voir et à revoir !

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LANCELOT DU LAC

Film franco-italien de Robert Bresson (1974)

La Quête du Graal se solde par un échec et a décimé les chevaliers de la Table Ronde l’un après l’autre au cours de furieux combats. Parmi les derniers survivants contraints au désespoir maintenant que l’ordre chevaleresque est sur le point de disparaître, le chevalier Lancelot regagne la cour du Roi Artus. Il y retrouve Guenièvre qui, bien que Reine entretient une relation adultérine avec le noble chevalier. Lancelot se persuade que l’échec de sa Quête est une punition divine exigée par Dieu pour que le chevalier expie sa relation cachée. Humblement, Lancelot demande à son amante de le délivrer de son serment de l’aimer ; ce que la Reine refuse. Gauvain exhorte à la poursuite de la Quête tandis que Mordred, souffrant du prestige du chevalier, entend user de tous les stratagèmes pour le déshonorer. Plus que tout autre, il devine la passion adultère qui unit les amants et en apporte la preuve irréfutable à Artus…

Spécialiste de l’adaptation au cinéma des œuvres de Georges Bernanos, mais encore de Léon Tolstoï et Fiodor Dostoïevski, Bresson prend le risque de s’attaquer au mythe arthurien. Le film n’est pas le meilleur du genre mais conserve un intérêt certain dans l' »identité » cinématographique française de l’œuvre. A la différence des adaptations américaines ou anglaises, le présent film offre une transcription plus austère et plus dépouillée, plus cérébrale et plus théâtrale également. Cela manque certainement de panache mais l’intention est louable. Bresson ne conserve qu’un seul personnage féminin en la personne de Guenièvre. Exit les autres ! Mais on ne restera pas insensible à la scène lors de laquelle elle prend un bain. Moins spectaculaire que les autres, il n’en est pas moins à voir. Le Lancelot de Bresson est largement supérieur en tout cas à celui de Jerry Zucker réalisé deux décennies plus tard.

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MONTY PYTHON, SACRE GRAAL

Titre original : Monty Python and the Holy Grail

Film anglais de Terry Gilliam et Terry Jones (1974)

Recruter des chevaliers de la Table Ronde, tel est le défi qui anime le Roi Arthur. L’entreprise n’est pas sans difficultés et les tentatives d’approches du chevalier noir ou de paysans anarcho-syndicalistes s’avèrent vaines. Au cours du procès d’une sorcière, Sir Bedevere le Sage accepte de se joindre au Roi, bientôt rejoints par d’autres chevaliers sans montures. Cheminant vers Camelot, la petite troupe part en Quête du Graal à la suite d’une divine rencontre. Un château renfermant des soldats français serait détenteur d’un Graal. Qu’à cela ne tienne, nos courageux chevaliers entreprennent la construction d’un lapin de Troie afin de pénétrer à l’intérieur des lieux. Mais le sort s’acharne contre les chevaliers qui oublient de se cacher à l’intérieur de la structure. Les hommes d’Arthur sont contraints d’abandonner toute velléité de tenir plus longtemps le siège car les Français se battent vaillamment en lançant des vaches domestiques depuis la muraille. Et encore ne sont-ils pas au bout de leur dangereuses aventures. Heureusement, la police motorisée veille…

Hilarant que cette parodie du mythe arthurien, la plus montypythonesque qui soit ! Ça n’est que succession de gags tous plus loufoques les uns que les autres, anachronismes surréalistes, danses absurdes, redondances abrutissantes ; le tout apparaissant dès la première seconde du générique. Il paraît que les loufiats Gilliam, Jones et consorts ne pouvaient produire que des navets. Alors l’industrie cinématographique anglaise refusa d’y mettre le moindre penny. Le film put quand même être produit grâce aux largesses de Led Zeppelin, Pink Floyd ou encore des Rolling Stones. Comme quoi l’Angleterre a quand même pu léguer à l’humanité quelques bonnes choses. En cherchant bien… Même Henri Béraud eut pu esquisser un sourire à la vision de ce film irrésistible ! A côté de Monty Python, la série, quoique réussie, de Kaamelott, fait figure de thèse d’histoire médiévale !

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PERCEVAL LE GALLOIS

Film français d’Eric Rohmer (1978)

Perceval est un jeune valet éduqué par sa mère loin de toute présence masculine. Aussitôt qu’il croise par hasard des chevaliers, Perceval rêve d’en épouser le code et ses dangers. Malgré la farouche opposition de sa mère qui a vu mourir au combat son mari et ses deux autres fils, Perceval quitte le château maternel afin de gagner la cour du Roi Arthur et être adoubé à son tour. Il y apprendra le maniement des armes et aura à venger une offense faite à une damoiselle dont l’honneur a été bafoué par un triste personnage que Lancelot tue sans sourciller. Il est désormais temps pour le preux chevalier de partir en Quête mais auparavant de saluer sa mère. Se dresse alors sur son chemin un étrange château où le chevalier est invité à demeurer le temps d’un étrange festin…

A l’instar de Bresson, Rohmer fait une brève incursion dans l’imaginaire médiéval avec cette curieuse adaptation du Perceval de Chrétien de Troyes. Curieuse mais réussie ! Curieux décors en papier mâché en effet qui ne sont pas sans rappeler l’art de l’enluminure médiévale, en ce qui concerne la disproportion des perspectives, mélangés à des décors de séries animées pour enfants des années 1970 et en contraste total avec le grand soin apporté aux costumes. D’aucuns seront effarés de cette hardiesse mais le style esthétique est intéressant. A plus forte raison, si Rohmer traduit en langue moderne le roman courtois du 12ème siècle, il en conserve la versification. La musique est composée de chœurs s’inspirant d’airs médiévaux. Loin de l’argot célinien, Fabrice Luchini dans l’un de ses tous premiers grands rôles. Ce film est un bijou majestueusement conservé dans son écrin !

Virgile / C.N.C.

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