Sans les femmes, l’État islamique ne serait rien

15/06/2016 – 07H00 Miami (Breizh-info.com) – Pour l’État islamique, les femmes seraient-elles justes bonnes à porter un voile intégral et à faire des enfants ? Rien n’est moins sûr. Une étude menée par Neil Johnson et ses collègues de l’université de Miami en Floride (USA), qui vient tout juste d’être publiée par la revue Science Advance, donne lieu à des découvertes intéressantes, qui montrent que les groupes terroristes, dont l’État islamique, placent les femmes au cœur de leur stratégie de propagande.

Facebook et Twitter redoublent d’efforts pour supprimer les contenus terroristes ; cependant, les terroristes portent l’effort de leur propagande ailleurs, et notamment sur le réseau social russophone Vkontakte (Vk.com) dont les administrateurs sont moins attentifs et la sécurité moins grande. Ce réseau social est très populaire en Russie et dans tout l’ancien bloc soviétique, dont il constitue encore un élément partagé malgré les conflits et les divergences, avec une culture commune héritée de l’URSS.

Les chercheurs ont identifié en deux mois l’ensemble des personnes qui faisaient partie de groupes reliés à l’État islamique : soit 40.000 personnes dans 170 groupes. Puis ils ont cartographié l’ensemble des connexions sociales entre les membres : si deux personnes étaient membres du même groupe pro-EI, alors l’on considérait qu’elles étaient connectées une fois. Puis l’équipe a utilisé les outils de statistiques afin de mesurer les flux d’information et de ressources. Ils ont notamment mesuré la centralité d’intermédiarité (BC)  qui désigne le nombre de fois où un nœud agit comme un point de passage le long du plus court chemin entre deux autres nœuds et donc le contrôle de certains individus sur la communication entre d’autres individus ou dans un groupe. Près d’un million de liens ont été recensés et mesurés.

Les découvertes réalisées étaient assez étonnantes  : près de 40% des membres de ces réseaux étaient des femmes. Plus intéressant, elles n’avaient pas un rôle mineur, et de loin. Leur BC était jusqu’à deux fois supérieure à celles des hommes, c’est à dire qu’elles connectaient toutes les parties du réseau entre elles, et servaient de meilleurs raccourcis pour connecter une personne à l’autre. Interrogé par Science Advance, Neil Johnson estime que « Dans des situations typiques du quotidien telles que la hiérarchie d’entreprise, le ratio de la BC des femmes par rapport aux hommes est inférieur à 1 » Les femmes sont donc souvent moins centrales et plus périphériques dans des organisations dominées par des hommes. « Mais dans la promotion du terrorisme, une femme est un canal essentiel qui transfère deux fois plus d’informations, de savoir-faire et de matière » par rapport aux relations sociales quotidiennes.

Par ailleurs l’étude constate que les femmes sont plus enclines à coopérer entre elles, et sont plus discrètes que les hommes : elles ne cherchent pas à accumuler les amis ou les followers, ce qui leur permet de rester sous le radar des administrateurs de Vkontakte. De façon générale, plus il y avait de femmes dans un groupe, et plus il tenait dans la durée avant de finir par être fermé par l’administration du réseau social.

Cette étude corrobore en partie un rapport du think tank Institut for Strategic Dialogue écrit par Erin Marie Saltman et Melanie Smith et paru en janvier dernier. Les deux auteurs y traitaient  du cas des jeunes femmes qui ont émigré en Syrie et en Irak. Selon les auteurs du rapport, elles sont motivées par le mariage, mais aussi la haine de leur pays d’origine. La propagande les a persuadées aussi qu’elles avaient un rôle à jouer, fondé sur la religion… ainsi que la propagande sur les réseaux sociaux. Le rapport cite les tweets d’une brittanique émigrée en Syrie et qui enjoint ses compatriotes à faire de même : « Sérieusement, les musulmans qui vivent à l’Ouest feraient mieux de faire leur hijra [migration religieuse]. Allah nous a offert un califat, il n’y a pas d’excuses ».

Pour l’État islamique, l’enjeu est double : recruter de nouvelles compagnes pour ses combattants, mais aussi de nouveaux combattants. Et pourtant la place réservée aux femmes est congrue, car elles sont confinées au rôle de génitrice, et d’épouse : selon le manuel de bonne conduite édicté par l’EI pour les femmes, « il n’y a pas de plus grande tâche pour les femmes que d’être l’épouse de l’homme ». L’émancipation des femmes occidentales y est condamnée : « le modèle adopté par les infidèles en Occident a échoué à la minute où les femmes ont été libérées de leur cellule dans la maison ».

L.B. Greffe

Crédit photo : DR
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