23/04/2016 ‑ 07H00 Nantes (Breizh-info.com) – Un an après sa mise en service, où en est la SoNantes, la monnaie locale nantaise ? « Tout fonctionne comme prévu », assurent ses promoteurs. Un accent d’autosatisfaction pas plus justifié que celui de François Hollande lors de sa dernière intervention télévisée.
Comme la quasi-totalité des monnaies locales, la SoNantes est le fruit d’une réflexion militante où les mots « éthique » et « solidaire » reviennent souvent. Mais contrairement aux autres, mises en œuvre le plus souvent par des associations, elle a bénéficié des moyens d’une puissante collectivité locale. Trois bonnes fées, en particulier, se sont penchées sur son berceau avec la bénédiction de Jean-Marc Ayrault, alors maire de Nantes : Massimo Amato, historien, professeur à l’université Bocconi de Milan, Pascal Bolo, fonctionnaire des impôts devenu adjoint au maire de Nantes, et Jacques Stern, directeur général du Crédit municipal de Nantes.
L’idée remonte à plus d’une dizaine d’années. Elle a été longuement étudiée. Ses promoteurs ont notamment observé le cas de WIR, une banque coopérative suisse qui émet depuis 1934 une monnaie locale, le Wir, indexé sur le franc suisse – un exemple qu’ils auraient légèrement fantasmé, assure un blogueur nantais. En revanche, ils ont cessé de se référer à l’inspirateur du Wir, Silvio Gesell, peut-être parce que cet économiste était un chaud partisan de l’eugénisme et de la concurrence.
De nombreux voyages d’étude ont été effectués, en Suisse et ailleurs, dont certains avec la participation de Jean-Marc Ayrault. La Chambre des métiers, la Chambre de commerce, la Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire, des syndicats et des associations ont été associés aux préparatifs. Un logiciel a été développé pour gérer la future monnaie, qualifiée de « complémentaire » car elle ne prétend pas se substituer à l’euro. Le Crédit municipal, un établissement public, a créé une filiale spécialisée, SoNao, dotée de 2 millions d’euros de capital.
Annoncé pour 2013, puis 2014, le lancement est finalement intervenu le 28 avril 2015. Une équipe de commerciaux recrutée pour la circonstance a démarché massivement les entreprises nantaises pour leur faire souscrire des comptes en SoNantes et placer chez les commerçants des terminaux de paiement – car la SoNantes, monnaie dématérialisée sans pièces ni billets, fonctionne uniquement avec des cartes électroniques.
Au bout de six mois, malgré le soutien massif de Nantes Métropole, seuls 500 comptes environ avaient été ouverts, dont 120 par des entreprises. Aujourd’hui, au bout d’un an, 150 entreprises seulement adhèrent au système. Et encore, pour faire nombre, on a recruté parmi elles plusieurs institutions dépendant de la municipalité nantaise, comme le château des ducs de Bretagne, et des associations subventionnées comme la Fédération des amicales laïques… Du côté des particuliers, 820 comptes ont été ouverts – un nombre trois fois inférieur à celui des agents de Nantes Métropole.
Ainsi, l’objectif envisagé avant le lancement, 3 000 entreprises et 10 000 particuliers en quatre ou cinq ans, semble hors de portée. D’autant plus que si les adhérents sont peu nombreux, ils sont aussi peu actifs : le volume des échanges sur un an n’atteint que 41 352 SoNantes (1 SoNantes = 1 euro), soit en moyenne 42,63 par titulaire de compte.
Le Galléco, monnaie locale soutenue par le conseil départemental d’Ille-et-Vilaine, fera-t-il mieux que la SoNantes ? Un bilan de l’expérience en cours à Rennes, Fougères et Redon devait être établi fin 2015. Il ne l’a toujours pas été, ce qui ne rassure personne.
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