Avant même d’écouter les parties et les plaidoiries, le juge a annoncé que le délibéré serait rendu le 25 janvier. Les paysans ont notamment soulevé une question prioritaire de constitutionnalité : « la disposition du code rural qu’invoque Vinci prévoit leur expulsion sans délai. Or, c’est une rupture du principe d’égalité, mais aussi de la liberté d’entreprendre, par rapport aux commerçants ou aux particuliers qui disposent toujours d’un laps de temps pour partir« , explique Sophie Bringuy, tête de liste EELV aux régionales 2015 et juriste en droit de l’environnement. « On ne peut pas déménager une ferme ou un cheptel du jour au lendemain« .
Devant le tribunal, Sylvain Fresneau explique « les fermes que Vinci veut expulser représentent 500 hectares sur les 1650 de la ZAD ». Il expose que « les astreintes demandées par Vinci [200 € par jour et par infraction] font peser une astreinte énorme; Pour notre ferme, c’est 1000 € par jour. En sachant qu’une retraite agricole c’est 850€ par mois, c’est exorbitant. Bref, ils n’ont pas pu déloger les historiques par la force en 2012, ils essaient de le faire maintenant par la pression financière« . Cependant, malgré les échéances, « on reste combatif, on continue notre métier. Le plus dur, c’est de passer du temps hors de la ferme pour répondre aux journalistes, pour notre métier, on s’adapte, on continue à traire les vaches« , explique le paysan.Pour lui, « c’est nos racines qu’on défend. Je suis la 5e génération sur place, et mon fils veut s’installer. »
Pour Sofiane, un manifestant, « C’est ici, à Notre-Dame-des-Landes, que le complexe militaro-industriel se défend, et c’est ici la ligne de front entre les citoyens et ce complexe soutenu par les politiques« . Puis un chant retentit, entonné par la foule : « citoyen sois vigilant, Notre-Dame-des-Landes, c’est la terre de tes parents. Citoyen sois vigilant, Notre-Dame-des-Landes c’est la terre de tes enfants« . François, un autre manifestant, estime que « c’est à la fois la lutte pour une société meilleure, contre un monde dont on ne veut plus, et pour nos racines. Tout le monde a des racines, une identité, un terroir, et on refuse que cela soit saccagé au nom du profit-roi et du béton« . Annick, venue du Castelbriantais pense que « les racines paysannes doivent être défendues. C’est un enjeu pour tout le monde, y compris la population nantaise : moins il y a de fermes, de bocage, de nature, et plus la vie est difficile ».
Au micro, avant une pause musicale, un orateur de l’ACIPA exige que « François Hollande respecte sa promesse, c’est le service minimum » et rappelle qu’une « vingtaine de recours sont toujours dans les tuyaux. D’autres seront faits : aucune autorisation de défrichage n’a été déposée, les permis de construire de l’aérogare non plus, etc.« . La bataille judiciaire continuera. Une ovation de la foule accueille chacune de ses phrases. En revanche, les noms de Hollande, Mustière (président des Ailes pour l’ouest, émanation de la CCI pro-aéroport), Grosvalet et Retailleau, sont hués.
Du reste, « les travaux ne peuvent pas commencer au jour d’aujourd’hui« , précise un paysan au micro, ce qui laisse du temps à la contestation de faire acte de présence et montrer sa force de mobilisation : ce matin, des barrages filtrants étaient organisés par 80 personnes au port de Commerce de Brest et par plusieurs dizaines d’autres au sud de Rennes, à l’embranchement de la RN137. Samedi, une manifestation tracto-vélo doit converger devant la métropole de Rennes. Le collectif paysan COPAIN 44 a annoncé que les blocages allaient continuer et s’intensifier sur les routes du département.
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