02/12/2015 – 10H00 Nantes (Breizh-info.com) – Jean-Luc Hees, l’ancien patron de Radio France, s’ennuie. Son mandat n’ayant pas été renouvelé en 2014 par le CSA – qui lui a préféré le jeune Mathieu Galet – le voilà obligé de faire des tournées en province pour la promotion de son autobiographie Voyage. Ainsi il était le 27 novembre à Nantes dans le cadre des conférences- débats de l’observatoire des médias de l’université permanente où il est intervenu sur le thème « Itinéraire d’un bourlingueur des ondes ».
Le journaliste nous a narré longuement sa carrière journalistique, ses débuts à l’ORTF en 1972 sous Pompidou, puis son long séjour à Washington comme correspondant de France Inter. A son retour en 1990 il va présenter en direct et en public pendant neuf ans le journal de 13h de la station ainsi que le magazine Synergie qui deviennent alors de véritables tribunes pour la gauche politique et culturelle, sous Mitterrand puis Chirac. Cela lui vaudra d’être promu en 1999 directeur de France Inter par le très centriste PDG de Radio France Jean-Marie Cavada.
Quoique se présentant comme « libéral » et n’ayant d’ordres à recevoir de personne, Jean-Luc Hees supprimera brutalement de la matinale de France inter la chronique scientifique « Odyssée » qui déplaisait fortement aux grands groupes pharmaceutiques. Il fera entrer à la radio des journalistes très engagés comme Pascale Clark ou son « grand ami » Philippe Val de Charlie Hebdo et y revenir Michel Polac. Il perd son poste en 2004 avec l’arrivée de Jean-Paul Cluzel à la tête de Radio France. Sa traversée du désert sera de courte durée car le voici en 2006 sur Radio Classique où il animera la tranche matinale qui va devenir plus politique que musicale. Parallèlement en 2008, dans Charlie Hebdo, il tiendra une chronique sur les élections américaines d’une totale et prévisible « obamania ».
Son grand retour se fait en mai 2009 où, à la surprise générale, il est nommé par Nicolas Sarkozy président de Radio France. Jean-Luc Hees tient à préciser : « je ne le connaissais pas, ou à peine » et il rajoute : « sa loi était tellement inacceptable [la désignation en Conseil des ministres des présidents de l’audiovisuel public] qu’il va donc prendre un mec réputé de gauche ».
Il reconnait aussi que sa nomination fut « applaudie par Libé » tandis que Le Monde le traite de « réac de gauche ». Sa première décision avait été de nommer Philippe Val ancien patron de Charlie Hebdo à la tête de France Inter : « Philippe c’est mon ami, il le sera toujours ». L’OJIM , (Observatoire des journalistes et de l’information médiatique) dépeindra Val comme « le symbole de l’alliance de l’extrême gauche bobo libertaire avec le sarkozysme et le showbiz ».
Jean-Luc Hees va aussi se trouver avec le même Val au cœur d’une polémique sur son indépendance après qu’il ait limogé en juin 2010 les humoristes Stéphane Guillon et Didier Porte qui avaient multiplié les railleries sur Nicolas Sarkozy. Il est pourtant « prêt à jurer sur la tête de sa mère » que le Président de la République n’a jamais fait la moindre pression ou intervention pendant qu’il dirigeait Radio France. Un président qui le fera officier de la légion d’honneur la même année. Comme exemple de son indépendance Hees cite ses refus de céder à des artistes « comme Jane Birkin qui intervenait dix sept fois dans la semaine pour qu’on fasse sa promo ». Son indépendance politique sera contestée durant toute la durée de son mandat par ses anciens amis politiques, PS en tête.
Candidat à sa propre succession, Jean-Luc Hees n’a pas digéré le non renouvellement de son mandat en 2014, cette fois par le CSA. Il va se faire désormais critique sur l’évolution des médias, leur propension à rire de tout comme le fait Ruquier : « ricaner, se moquer, ça remplace quoi ? La dictature du rire ça ne m’intéresse pas ». Plus aigre il s’en prend à « ceux qui jouent aux Robin des bois quand ils ont les mains dans la caisse pour 50 000 € par mois » mais il ne cite personne. Dommage. Il va même jusqu’à dire : « je ne peux plus écouter ma station préférée où les journalistes sont devenus des juges d’instruction ».
Marine Le Pen : « danger public »
Mais le militant politique de gauche reprend vite le dessus. Ainsi il conteste la façon dont France Inter traite Marine Le Pen – « danger public » selon lui – et donne ce conseil aux journalistes de la station : « plutôt que de la traiter de grosse naze, ce qui lui fait gagner deux points, il vaudrait mieux expliquer ce que c’est (sic), ce qui lui en ferait perdre quatre ! ».
En introduction de son exposé, Jean-Luc Hees avait pourtant déclaré : « ma fonction, c’est informer les gens ». L’ex PDG de Radio France n’est pas à une contradiction près, mais le bon sens affleure aussi dans son discours : « aujourd’hui il faut être formaté, comme à Sciences Po ! » avant d’ajouter « penser différemment de la meute c’est un anathème ».
Jean-Luc Hees ne se reconnait plus aujourd’hui dans un monde qu’il a pourtant largement contribué à façonner.
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Une réponse à “Nantes. Jean-Luc Hees ou la nostalgie n’est plus ce qu’elle était”
Parce qu’en plus ce gaucho-idéologue prétend informer. Ce n’est qu’une fois sorti du fromage qu’il laisse libre cous à sa bile. Il n’est comme la plupart de ses confrères qu’un agent de désinformation à la solde du pouvoir.