Valérie Hamon (LO) « Mon problème, ce n’est pas la France, c’est l’intérêt des travailleurs. » [Interview]

12/11/2015 – 07H00 Rennes (Breizh-info.com) – En Bretagne administrative, comme dans l’ensemble des régions françaises, Lutte ouvrière présente des listes pour les régionales. Issu du trotskisme et internationaliste, ce parti mène à l’occasion de ces élections une campagne pour faire connaître ses engagements nationaux. Tête de liste dans notre région, Mme Hamon a bien voulu répondre aux questions de Breizh-info sur son programme et l’actualité.

Breizh-Info : Valérie Hamon,  pouvez-vous vous présenter brièvement ?

Valérie Hamon (VH) : J’ai 43 ans, je milite à LO depuis plus de 20 ans pour « faire entendre le camp des travailleurs », c’est le nom de notre liste. Je n’ai pas d’enfants. Je suis conductrice de trains de voyageurs à la SNCF depuis une dizaine d’années. Avant, j’étais ouvrière dans l’intérim, j’ai travaillé comme cariste, dans l’agroalimentaire et d’autres boîtes (PSA, Thomson, Canon…), j’ai cumulé CDD et intérim pendant 7 à 8 ans, une réalité que nombre de salariés – surtout des salariées – bretons connaissent.

BI : Quels sont les grands axes de votre programme ?

VH : Nous faisons une campagne nationale dont l’objectif est de faire entendre la colère des travailleurs. Qu’ils expriment leur ras-le-bol et le rejet de la politique de ce gouvernement socialiste. Le peu de promesses qu’ils ont faites au peuple n’a pas été tenu et ils ne font qu’aggraver la politique de Sarkozy.

On ne fera pas de promesses farfelues pour la région, comme les notables qui se disputent la mangeoire du conseil régional. Nous savons bien que nous ne serons pas au second tour. Cependant, si on était élu, on dénoncerait la politique des notables, comme les subventions aux grosses entreprises qui cassent de l’emploi. PSA à la Janais a touché 13 millions d’€  de la part de la région pour des terrains que l’entreprise n’occupe plus et qui les a eu il y a plus de 50 ans pour une bouchée de pain. De la même façon, nous dénoncerons les allégements fiscaux pour les patrons et nous soutiendrons tout ce qui améliore le sort du peuple.

BI : Que pensez vous de la réforme du Code du travail, que le gouvernement vient d’initier ?

VH : C’est une nouvelle attaque. Ils disent qu’ils vont soi-disant maintenir les 35 heures, mais ils vont augmenter le nombre de dérogations. Les heures supplémentaires seront payées 10% au lieu de 25% en plus et la durée maximum hebdomadaire travaillée va passer de 48 à 60 heures. Dire que la réforme va aider les PME-TPE est un prétexte. Ceux qui font la pluie et le beau temps dans la législation, ce sont les grandes entreprises, qui étouffent les petites entreprises et les salariés.

Les travailleurs doivent défendre leur droit à l’existence. Avant on disait que le chômage était dû au manque de soutien public des entreprises, et maintenant, alors qu’il n’y a jamais eu autant d’allégements fiscaux, la nouvelle raison du chômage c’est qu’on ne travaille pas assez. Et le chômage continue de monter. Il faut interdire le licenciement aux grandes entreprises.

BI : Vous ne craignez pas de couler l’économie tout à fait ?

VH : On doit pouvoir disposer d’un salaire et d’un travail fixe. Il n’y a pas d’argent ? Prenons- le aux actionnaires et aux grands capitalistes bourgeois. Air France engrange des millions et licencie, tout part dans la spéculation. On peut nous jeter du jour au lendemain, c’est inadmissible. Il est grand temps que ceux qui en ont marre votent pour des candidats qui ont une logique de classe.

BI : Que pensez-vous de la réunification bretonne ?

VH : Je ne pense pas que ce soit une préoccupation des classes populaires. Une frontière de plus ou de moins ne changera rien par rapport aux problèmes quotidiens des travailleurs.

BI : Quelle est votre opinion sur l’aéroport de Notre-Dame des Landes ?

VH : Nous sommes contre. C’est un cadeau de plus aux grands actionnaires du BTP. C’est complètement inutile pour les classes populaires. On ferait mieux de développer le transport ferroviaire, dont nous pensons qu’il doit être public et gratuit. Il sert essentiellement pour aller au travail, c’est donc au patronat de le payer. Il faut aussi éviter de fermer des lignes ou des trains, par exemple les Intercités Nantes-Quimper ou la ligne Morlaix-Roscoff, où on va bientôt circuler à 30 km/h tellement qu’elle est en mauvais état.

BI : Quel est votre avis sur l’accueil des migrants, qui commencent à arriver en Bretagne, y compris dans les campagnes où ils sont imposés par l’Etat ?

VH : On est internationalistes, donc pour une liberté totale de circulation et d’installation.

BI : Vous ne craignez pas de réduire les droits des travailleurs que vous défendez ? Il y a trente ans un autre communiste, Georges Marchais, s’opposait à l’immigration en affirmant qu’elle poussait les travailleurs français au chômage et qu’elle était promue par les patrons et le gouvernement « pour se procurer une main-d’œuvre d’esclaves modernes, surexploitée et sous-payée ».

VH : Ce sont les patrons qui ne cessent de réduire les droits des travailleurs. En Irak et en Syrie, ce sont les Etats les plus riches de la planète qui subventionnent le terrorisme. Si les travailleurs subissent les bas salaires, c’est à cause des patrons qui organisent la concurrence. Entre les équipes, les ateliers, les usines du même groupe. Il n’y a pas besoin d’immigrés pour y arriver !

Les migrants qui arrivent de Syrie, ce sont des frères. Il faut s’allier avec eux contre les patrons. Les barbelés n’ont jamais protégé les travailleurs, c’est l’union pour des principes forts et autour de leurs intérêts communs qui améliorera leur situation. Quant aux barbelés, on a vu ce que ça a fait en Allemagne dans les années 30. [point Godwin]

BI : Quel bilan tirez vous de la majorité de Jean-Yves le Drian ?

VH : Comme au gouvernement : tout pour les patrons, rien pour les travailleurs. En plus c’est le ministre de la guerre, qui parcourt le monde pour vendre des armes françaises qui sèment la mort.

BI : Mais ces ventes d’armes qui sont dans l’intérêt national profitent aussi à l’emploi des français, et notamment des bretons, elles améliorent donc la situation des travailleurs…

VH : L’intérêt national n’est pas l’intérêt de tous les travailleurs, c’est celui des grands patrons. Le monde du travail a des intérêts opposés au grand capitalisme, qui lui n’a pas de nationalité, comme les capitaux qui circulent sur toute la planète.

BI : Et si on ne vend plus rien, comment fait-on en France ?

VH : Je m’en fous de la France ! Mon problème, ce n’est pas la France, c’est l’intérêt des travailleurs. On ne doit pas se mettre à la remorque de nos grands patrons, qui avancent toujours l’intérêt national alors que c’est le leur.

BI : Quels sont vos objectifs électoraux et vos consignes au second tour ?

VH : Notre objectif est de faire le maximum de voix possible. Et permettre au maximum de travailleurs d’exprimer leur appartenance à la classe sociale des travailleurs. Le second tour n’a pas d’importance. Pour les consignes de vote on verra. Du reste, c’est le gouvernement qui est le premier responsable de la désillusion des travailleurs, et donc de la montée du FN et de l’absentéisme.

Propos recueillis par L-B Greffe.

Photo : DR
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