08/09/2015 – 08h30 Ecosse (Breizh-info.com) – L’Ecosse détient 12,5% des réserves en gaz et 62,4% des réserves en pétrole de l’Union Européenne. Pourtant, elle a mise en place une réelle politique énergétique basée sur les énergies renouvelables : produire autant d’électricité d’origine renouvelable qu’elle n’en consomme, c’est-à-dire l’autonomie électrique pour 2020. Et le moins qu’on puisse dire c’est que c’est bien parti. Pourquoi ? Comment ?
L’opportunisme géographique
Comme la Bretagne, Galles ou l’Irlande, l’Ecosse est battue par les vents et est baignée par une mer agitée et dangereuse : le foyer d’énergie renouvelable est important , les nouvelles technologies développées depuis 30 ans permettent d’en tirer profit. En 2014, le ministre écossais de l’Energie et des Entreprises Fergus Ewing s’exprime en ces termes :
« Nous sommes la nation la plus riche en énergie par tête en Europe. Nous représentons 1% de la population européenne, mais nous possédons la plus grande réserve d’hydrocarbure, 25% du potentiel éolien, 10% de son potentiel en matière d’énergie des vagues »
Au départ, il y eut l’hydroélectrique, un fort relief a permis à l’Ecosse de produire 90% de l’électricité d’origine hydroélectrique du Royaume Uni. Mais une bonne partie du potentiel est encore à installer, et n’est pas négligeable : 1,2 GW.
C’est ainsi que les études s’accordent sur un potentiel aux alentours des 100 GW et qui se divise ainsi :
Biomasse 1 GW
Hydrolien 14 GW
Eolien Terrestre 11,5 GW
Eolien Marin 25 GW
Hydroélectricité 2,5GW
Houlomoteur 14,5 GW
A titre de comparaison, le premier parc nucléaire européen, le français, a une capacité cumulée de 63,1 GW ce qui montre le caractère exceptionnel des gisements renouvelbles écossais.
Les racines d’une motivation politique
Les objectifs d’une autonomie s’est faite progressivement : les objectifs politiques sont passés de 40% de l’autonomie en 2005 à 50% en 2007 puis à 100% (autonomie totale) en 2011. Que s’est-il passé ?
C’est le pic pétrolier (le sommet de la courbe de production annuelle a été atteint) et les considérations sur le changement climatique (l’Ecosse est une civilisation côtière et est donc en première ligne) qui sont les fondements du tournant écossais.
L’Ecosse s’est donc munis d’un bureau de l’Energie et d’un Plan Renouvelable. Cette politique a été mise sur les rails par Alex Salmond qui a annonçé : “produire le double des besoins en électricité de l’Ecosse dont un peu plus de la moitié à partir de ressources renouvelables“, “exporter ainsi autant d’électricité que nous en consommons“ et “consolider notre rang de leader européendes énergies vertes”.
La nécessité d’un cadre administratif stable
Dès 2002 au Royaume Uni, la « Renewables Obligation », a été introduite afin de pousser les fournisseurs d’électricité à s’approvisionner en renouvelables, en usant de la vieille méthode de la carotte et du bâton. Annuellement, les fournisseurs d’électricité ont l’obligation de fournir une certaine proportion d’électricité renouvelable, augmentant au fil du temps (3% de l’électricité vendue en 2002, puis 15,4% en 2015) matérialisée par des certificats appelés ROCs (Renewables Obligation Certificates). Les fournisseurs doivent acquérir ces ROCS auprès des producteurs d’électricité pour les présenter à l’OFGEM6, qui régule le marché gaz et électricité en UK. A la fin de l’année, les fournisseurs qui ne disposent pas de suffisamment de ROCs sont condamnés à payer des pénalités ; celles-ci sont ensuite reversées à l’ensemble des fournisseurs, proportionnellement aux nombres de ROCs détenus. Les fournisseurs vertueux se trouvent alors doublement favorisés par l’absence de pénalité et le versement d’une récompense d’autant plus importante que l’engagement réel est fort. Ce montage administratif est stable, monte en puissance depuis le début et a été déterminant pour la mise en place de la politique énergétique.
Un résultat impressionant : le triplement de la production en renouvelable!
Triplement de la production en renouvelable, effondrement du charbon, stabilité du nucléaire, diminution des hydrocarbures dans la production générale d’électricité qui a légèrement augmentée en Ecosse entre 2000 et 2015.
Autre conséquence : les efforts ont coûté entre 15 et 20% d’augmentation des factures payées par les entreprises et par les particuliers (système RIIO).
Cependant, toutes les conditions sont réunies pour atteindre les 100% de l’autonomie en 2020 et se manifestent politiquement parlant.
La politisation de l’énergie en Ecosse
L’autonomie réelle est une chose, l’exportation en est une autre. L’export de l’électricité verte écossaise et des technologies écossaises dans le reste du monde sont à la portée de l’Ecosse si elle dit Oui à l’indépendance politique, affirment les militants indépendantistes actuellement au pouvoir avec le SNP.
Unionistes et indépendantistes s’écharpent sur le partage des ressources et des charges énergétiques. Les Unionistes ont toujours affirmé que si l’Ecosse partait elle n’aurait plus la possibilité de vendre son énergie au reste du Royaume « Uni » : plus aucune obligation pour les Anglais d’acheter l’énergie écossaise un peu plus chère ni d’ailleurs de participer à son subventionnement (à hauteur de 28%). Mais les Indépendantistes répondent en souriant que les anglais sont en situation de dépendance vis à vis des énergies écossaises et qu’ils sont contre des coupures d’électricité en Angleterre…
Derrière les stratégies énergétiques se profilent donc trois autres niveaux de complexité : les conséquences du changement climatique, le développement économique basé sur une énergie accessible, et le spectre de la précarité énergétique d’une population occidentale dont des millions de familles sont dans des situations de paupérisation inquiétante.
Source : http://www.gov.scot/Topics/Business-Industry/Energy
Crédit photo : DR
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