01/09/2015 – 07H00 Rennes (Breizh-info.com) – L’association Produit en Bretagne qui regroupe 360 entreprises de tous les secteurs d’activité fait parfois figure de lobby défendant des intérêts qui ne correspondent pas à l’intérêt général ni à l’avenir bien compris de la Bretagne.C’est particulièrement vrai avec la filière agricole. A tel point que Jakez Bernard, son président, fait figure de porte-parole de l’agrobusiness.
C’est ce qui apparaît dans une tribune publiée par Ouest-France (16 juillet 2016) : « chacun sait combien Produit en Bretagne est lié à la qualité et à la santé de notre agriculture. Nous nous efforçons de valoriser l’agriculture bretonne et de redonner confiance aux agriculteurs dans leur avenir et la fierté de leur métier. La qualité de notre agriculture contribue grandement à la réputation de nos produits », écrit M. Bernard.
Language technocratico-politique qui vise évidemment à défendre l’agriculture productiviste. C’est à dire le fameux « modèle agricole breton » qui mériterait d’être appelé « PSD » pour pollution, surproduction, destruction de la nature. On pourrait même ajouter à l’acte d’accusation la disparition des emplois entrainée par l’industrialisation des fermes.
Quand à la qualité et à la « santé » de notre agriculture que vante M. Bernard, il y aurait beaucoup à dire. Dans le cas des élevages porcins, il faut plutôt parler d’antibiotiques, d’hormones de reproduction, d’aliments importés (soja par exemple). Sans oublier les magnifiques « camps de concentration » qui quadrillent la campagne bretonne et dans lesquels sont entassés des cochons privés de lumière naturelle.
Rien de flatteur pour la Bretagne. Ni pour son image, ni pour la « qualité » chère à M. Bernard. Il s’agit plutôt d’une production bas de gamme destinée à la charcuterie industrielle. Pour nos paysans, continuer à se battre sur ce terrain s’appelle combat d’arrière-garde. Les Allemands seront toujours plus forts que les Bretons dans cette course aux volumes qui exigent le gigantisme : pour être « compétitif » , il faut augmenter la production, car baisser les coûts passe par des économies d’échelle.
Et pour ce faire, les industriels allemands de l’agrobusiness possèdent une arrière-cour fournissant à la fois main d’oeuvre bon marché et vastes terres où il n’est pas question de normes environnementales : la Pologne, la Roumanie et l’Ukraine. Si nécessaire, il s’y installeront demain, si ce n’est déjà en cours.
Puisque Jakez Bernard en pince pour la « qualité », il gagnerait à s’intéresser au projet de filière de porcs sur paille que développe en ce moment un jeune éleveur de Dirinon Stéphane Brélivet (près de Brest). Son concept : 100 truies maximum. La viande sera vendue auprès des grossistes et des moyennes et grandes surfaces. Les fermes ne pourront pas dépasser une surface maximale de terres et l’usage des pesticides sera réduit. Les animaux vivront sur paille ; l’âge minimum à la vente est de 182 jours car il faut allonger la période d’engraissement pour améliorer la qualité de la viande.
Cette nouvelle filière, dont le lancement est prévu pour début 2016, veut se démarquer du porc standard victime de prix trop bas. « Nous nous adressons à une frange croissante de consommateurs prêts à payer plus pour une viande issue d’animaux dont les conditions d’élevage sont supérieures sur tous les critères à tout ce qui existe actuellement en agriculture conventionnelle. » explique Stéphane Brélivet. « Nous n’allons pas jusqu’au label bio, pour ne pas exploser les coûts de production des éleveurs. ». Point très important : le prix d’achat du cochon sera déconnecté de celui du Marché du Porc Breton (Ouest France, 7 juillet).
Voilà qui devrait donner à réfléchir à Jakez Bernard. Sans aller jusqu’au bio, on peut chercher à monter en gamme pour faire de la vraie « qualité ». Pas celle qui relève de la langue de bois.
Dernier conseil : embaucher André Pochon, paysan retraité, fondateur du Centre d’études pour un développement agricole plus autonome. Pochon lui expliquerait que la révolution de l’élevage industriel « s’est faite grâce au pétrole et au soja importés à bas prix. De ce fait, engrais azotés, pesticides, et aliments du bétail ont gavé nos terres et nos animaux. Ce processus est au bout du rouleau. ».
Bernard Morvan
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