15/08/2015 – 07H00 Bretagne (Breizh-info.com) – Aujourd’hui, en Bretagne, le PCF survit grâce à quelques restes, survivance d’une époque qui fût glorieuse. Des poches autour de Saint-Nazaire et de Lorient – les dernières zones où i l y a encore des colleurs d’affiches – des maires ruraux entre Guingamp et Gourin et c’est à peu près tout.
Autant dire qu’obtenir des élus relève maintenant de l’exploit. Exploit qui s’appelle accord électoral avec le PS afin d’obtenir quelques strapontins.
La cause principale de l’effondrement du PCF est connue : après le départ de Georges Marchais, ses successeurs (Robert Hue, Marie-Georges Buffet, Pierre Laurent) ont cessé de parler à ce qui constituait le fond de commerce du parti : les classes populaires et tout particulièrement la classe ouvrière. Pour faire « moderne » on s’est converti dans les droits de l’homme, les sans-papiers, le féminisme …Résultat des courses : les électeurs sont partis.
Si bien qu’aujourd’hui, en Bretagne (5), il ne reste plus que deux parlementaires communistes : Christine Prunaud, sénateur des Côtes d’Armor, adjoint au maire de Lamballe, grande spécialiste de la « citoyenneté » (sic). Elle a été élue en septembre 2014 car placée en deuxième position sur une liste de gauche dirigée par Yannick Botrel (PS) , sénateur sortant, maire de Bourbriac, ancien conseiller général, ancien vice-président du conseil général – le notable dans toute sa splendeur.
Mais surtout Michel Le Scouarnec, ancien maire d’Auray, qui incarne le militant communiste à l’ancienne.
Proche des gens, rendant mille services à la population, ce qui lui permit de devenir maire d’une ville votant à droite (Auray). Grâce à cette excellente image, il fût élu sénateur en septembre 2011, profitant de la lassitude des grands électeurs du Morbihan. Leur volonté de se débarrasser des barons de la droite était telle qu’ils élirent un communiste, un écologiste ( Joël Labbé) en plus du sortant socialiste (Odette Herviaux).
Le PCF, en chute libre électorale, tente de survivre et de démentir Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’Etat aux relations avec le Parlement, qui, histoire de mettre de l’huile dans les rouages, a prédit que les communistes « ne fêteront pas leur centenaire ».
Déjà très affaibli, le PCF fait ce qu’il faut pour s’affaiblir davantage : en se divisant. Deux PCF pour le prix d’un, alors que la préparation des élections régionales est en cours. Voilà la situation après la conférence régionale tenue en juin à Pontivy . Une première stratégie semble inspirée par les instances nationales du PCF ; elle consisterait à une liste « de large rassemblement anti-libéral » réunissant « tous ceux qui ne se satisfont pas d’une austérité à perpétuité et qui ne courbent pas l’échine devant la loi des marchés ». D’où la volonté de constituer une liste de « gauche citoyenne et offensive ».
A la manoeuvre, Xavier Compain, éleveur dans les Côtes d’Armor, qui figurait en deuxième position sur la liste présentée par le Front de gauche aux élections européennes dans la circonscription Ouest.
Il est également délégué en charge des questions d’agriculture et de pêche au sein des instances nationales du PCF et chef de file des communistes pour les élections régionales. Il se définit lui-même comme un homme « front de gauche compatible » qui « peut aussi être second sur une liste ».
Xavier Compain peut donc prétendre être l’homme des « militants » et représenter les fédérations de Bretagne (4).
Caresser le projet d’une liste autonome aux régionales – concurrente de celle de Le Drian – apparait risqué. En effet, en Bretagne (4), aux élections européennes, la liste du Front de gauche n’avait obtenu que 5,02% des suffrages exprimés. Il suffirait de peu pour tomber en dessous des 5% , ce qui enlèverait toute possibilité de remboursement des frais, mais aussi toute possibilité de fusionner au second tour avec la liste de gauche PS-PRG. Résultats : des dettes, et pas d’élus.
Le risque apparait d’autant plus grand que cette stratégie ne peut pas convenir aux conseillers régionaux sortants. Eux savent que leur planche de salut s’appelle Le Drian. Avec lui, la réélection est assurée. Sans lui, c’est le naufrage. Les six communistes ( Daniel Gilles, Gérard Lahellec, Josiane Corbic, Gaëlle Abily, Eric Berroche, Sophie Lemoine), élus en mars 2010 en sont forcément persuadés.
Et comme le casse-croûte l’emporte sur toute autre considération, on les retrouvera à coup sûr sur la liste Le Drian, et aucunement sur celle « de gauche citoyenne et offensive ». Et la contestation interne a déjà démarrée. Dans un texte dit « Appel de Plestin », des militants costarmoricains s’élèvent contre une stratégie de leur parti qu’ils jugent d’abord anti-socialiste et qui exclut les élus régionaux sortants du PC en Bretagne.
Pitoyable spectacle offert par ce qui fût un grand parti, riche en cadres et en militants. Aujourd’hui, on assiste à l’affrontement d’élus et de militants qui ne défendent pas les mêmes intérêts.
Du temps de Marchais, il y avait une « ligne » et tout le monde s’y tenait. Mais c’était au siècle dernier, autant dire à des années-lumières…
Bernard Morvan
Crédit photos : DR
[cc] Breizh-info.com, 2015, dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine.