Nantes. Un Congolais en prison après une course-poursuite

27/04/2015 – 08H00 Nantes (Breizh-info.com) – L. est congolais. Arrivé en France en 2002, il totalise, à vingt ans à peine, déjà 6 mentions à son casier pour 5 condamnations. Il comparaît à nouveau en correctionnelle ce 15 avril pour avoir, le 31 mars, refusé de s’arrêter à un contrôle de police dans le quartier « sensible » de Bellevue, engagé une course poursuite en ville et sur le périphérique et aggravé son cas par une dénonciation calomnieuse. Tout ça alors… qu’il n’avait rien à faire à Bellevue puisqu’il lui était interdit de paraître dans le quartier. Et qu’il n’avait pas le permis.

Le 31 mars, des policiers procèdent à un banal contrôle de véhicules dans le quartier de Bellevue, entre Nantes et Saint-Herblain. La voiture, dans laquelle se trouvent deux Africains dont le prévenu, refuse le contrôle et une course-poursuite s’engage. Le véhicule prend à vive allure plusieurs voies du quartier (rues de Dax, Romain Rolland, Winston Churchill), puis le périphérique autour de la porte de l’Estuaire. Le conducteur grille les feux, force plusieurs barrages, roule sur les voies de bus et la bande d’arrêt d’urgence, enfin tout le toutim. A l’approche du pont de Cheviré, un peloton de gendarmerie circulant par hasard dans le coin appuie les policiers. Un motard descend de son véhicule et braque le conducteur avec son arme, peine perdue, il continue ! finalement le véhicule est abandonné, le passager s’enfuit et le conducteur finit par être interpellé… mais il donne le nom d’une autre personne, J. Ce n’est qu’avec des investigations complémentaires et les bandes de plusieurs caméras de vidéo-surveillance que les policiers arrivent à confondre L, qui avoue.

« j’ai tenté de prendre la fuite, mais je n’ai pas foncé sur les gendarmes« 

Mais il ne regrette rien, même devant le tribunal qu’il défie presque, en expliquant comme s’il allait faire les courses : « j’ai tenté de prendre la fuite, mais je n’ai pas foncé sur les gendarmes« . Le procureur donne la raison de son comportement : « le prévenu n’a pas le permis de conduire et par suite d’une autre condamnation dans un dossier de stupéfiants il a interdiction de paraître dans le quartier« . Il rétorque : « j’allais chercher des documents pour la préfecture« , afin de pouvoir avoir un récépissé sans lequel il ne peut, dit-il, passer son permis. La juge reste perplexe : « vous êtes en France depuis 2002, donc depuis toujours quasiment« .

Le profil du prévenu ne plaide pas en sa faveur : il a été condamné en 2012 pour vol et recel de vol, en décembre 2012 pour trafics de stupéfiants, en juin 2013 pour outrage et rébellion, en mars 2014 pour un vol et outrage à agent (3 mois avec sursis et travail d’intérêt général), et enfin en janvier 2014 pour du trafic de stups commis en mai 2013 (5 mois avec sursis et interdiction de paraître à Bellevue). Aîné d’une famille de sept enfants, il a grandi sans père – celui-ci, condamné en France a purgé sa peine et est retourné au Congo. Sa mère n’a pas de prise sur lui, il en convient volontiers : « j’dis pas à ma mère ce que je fais« . Titulaire d’un BEP électrotechnique, il n’a jamais travaillé dans ce secteur mais a occupé un emploi chez son oncle dans la parfumerie à Paris et postule actuellement comme vendeur chez Boulanger. Seule petite note positive : il a arrêté de consommer de la résine de cannabis, « depuis un an » selon lui. Mais sa mère nuance : « depuis un mois il est devenu plus calme, donc je pense qu’il a arrêté« .

La justice a par ailleurs été largement clémente avec lui, et il en a abusé, comme ne manque pas de le souligner la représentante du parquet : « vous avez oublié quatre convocations du SPIP successives, d’ailleurs le SPIP a jeté l’éponge puisque vous ne venez pas, votre JAP commence à en avoir marre de vous car votre sursis vous ne le respectez pas, votre TIG non plus, d’ailleurs il a été révoqué« ,dit-elle au prévenu avec une certaine lassitude. Le TIG – travail d’intérêt général – a en effet été révoqué en deux fois, en juin 2014 et en mars 2015.

« Monsieur a de grandes difficultés à comprendre les obligations judiciaires qui sont les siennes »

Le procureur reprend : « monsieur a de grandes difficultés à comprendre les obligations judiciaires qui sont les siennes, il est dans une politique du pas vu pas pris. Au moment où il comprend que la police va le prendre, c’est la panique, la compréhension s’accélère et l’encourage à commettre du grand n’importe quoi« . Elle assène : « il est prêt à tout pour échapper à ses obligations judiciaires« , y compris à la dénonciation calomnieuse : « il donne le nom d’une de ses connaissances en se disant que dans l’absolu, il y a deux Africains dans la voiture, ils ne feront pas la différence« . Le procureur insiste sur la précision de la dénonciation puisqu’il donne son nom, sa taille, précise qu’il s’agit d’un « ami d’enfance » – circonstance morale qui visiblement ne l’empêche pas de le dénoncer – « bref, ça commence à faire un peu beaucoup » conclue-t-elle.

Elle plaide pour du ferme, soit maintien en détention et 6 mois ferme en tout avec 3 mois de révocation de sursis plus trois autres mois : « sursis, sursis TIG, sursis mise à l’épreuve on a déjà donné, monsieur n’a plus rien à faire des avertissements« . L’avocate prend la parole, et commence… par insister sur la gravité des faits, si bien que le prévenu dans son box passe la main sur son visage, en un facepalm de compétition. Puis elle essaie de chipoter sur le caractère spontanné de la dénonciation, qui ne serait pas calomnieuse « puisqu’il n’a fait que répondre aux questions des policiers, il y a clairement eu sollicitation de leur part. » Elle plaide pour quatre mois ferme sans maintien en détention, plus le rétablissement du sursis mise à l’épreuve « pour assurer un suivi judiciaire » car « à 19 ans, le prévenu est immature« . Ce dernier n’arrange rien : « faut me laisser tenter, j’peux pas dire que j’ai changé mais je suis en train de changer« . Dans la salle plusieurs personnes lèvent les yeux au ciel.

Pourtant, une fois n’est pas coutume, la ficelle plus c’est gros mieux ça passe ne marche pas. Le juge va au-delà des réquisitions et inflige au prévenu une peine de… six mois ferme et deux mois de révocation de sursis. Soit huit mois ferme avec maintien en détention. La gradation des peines a encore frappé – c’est tout de même la première peine de prison ferme à laquelle il est condamné et elle ne peut pas être tout de suite très importante. Ce qui n’empêche pas le juge d’enfoncer le clou : « le tribunal estime que les faits sont particulièrement graves (…) avec la mise en danger de la vie des gens, une totale inconscience, un comportement dangereux sur un long temps et pas sur 500 mètres, une récidive de conduite sans permis, une dénonciation calomnieuse… le tribunal veut mettre un coup d’arrêt par rapport à ce qui se passe« . Et la maison d’arrêt de Nantes récupère un nouveau pensionnaire, qui avant de s’en aller adresse un baiser à la volée à la salle. Toujours bravache. Et sans un mot d’excuse ou de contrition.

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2 réponses à “Nantes. Un Congolais en prison après une course-poursuite”

  1. en prison au congo alors!! Puisque il est congolais! Marre de payer pour les prisonniers étrangers! !

  2. clasim dit :

    Ce genre d’individu n’a rien à faire en France!

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