7 films à voir ou revoir sur le thème de la prostitution

Breizh-info vous propose désormais une chronique hebdomadaire intitulée « 7 films à voir ou à revoir » et réalisée par Virgile pour le Cercle Non Conforme, qui nous a donné son accord pour reproduire le texte.

Cette semaine, 7 films à voir ou à revoir sur le thème de la Prostitution.

A propos de la prostitution, Raymond Abellio écrivait : « La religion en fait un problème moral, le communisme un problème social […]. En employant le jargon de la philosophie, c’est d’abord un problème ontologique*. Il touche aux racines de l’être et, en l’espèce, à celles de la féminité. » Quel regard avoir ainsi sur le commerce du corps ?

Vaste débat qui n’a pas manqué d’enflammer la société française, en 2014, sous l’impulsion de Najat Vallaud-Belkacem. Les termes de celui-ci, maladroitement posés par l’ex porte-parole du gouvernement, masquent la réalité des différents types de prostitution. Jeunes filles sous l’emprise tyrannique de réseaux, femmes déboussolées pratiquantes malgré elles, prostituées volontaires et indépendantes, le cinéma a largement abordé ce thème sous de nombreux angles.

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A SEIZE ANS DANS L’ENFER D’AMSTERDAM

Titre original : Hanna D., la ragazza del Vondel Park

Film franco-italien de Rino Di Silvestro (1984)

Hanna est âgée de seize ans et partage un modeste logement de la capitale néerlandaise avec une mère alcoolique et son compagnon, Hans, un homme deux fois moins âgé, que Hanna ne laisse pas insensible. Chaque jour, Hanna se livre à des hommes contre de l’argent. La jeune femme fait bientôt la rencontre de Miguel qui la présentera à un producteur de films pornographiques. Du statut d’amant, Miguel ne manque pas de remplir également la fonction de proxénète. Hanna sombre progressivement dans une prostitution de plus en plus avilissante avant de sombrer définitivement dans l’enfer de la drogue…

Très critiqué à sa sortie, ce film cru et frisant avec une certaine vulgarité livre une glaçante plongée dans les bas-fonds les plus sordides et pervers de la cité amstellodamoise. Hanna ou l’héroïne d’une brutale descente aux enfers.

 

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CHLOE

Film franco-belge de Dennis Berry (1996)

Après une violente dispute avec sa mère avec laquelle elle entretient des rapports conflictuels, Chloé, lycéenne âgée de seize ans, promène sa solitude dans les rues. Son compagnon, Ahmed, tête brûlée sans envergure, ne lui accorde guère plus d’attention. Chloé est livrée à elle-même et s’abandonne à chaque bouée que provoque son errance. Une boite d’allumettes sur laquelle figure une adresse et voilà Chloé se rendant au domicile indiqué. L’adolescente y rencontre Katia qui devient bientôt son amie. Poursuivant toujours une quête obscure, Chloé fait alors la connaissance de Jean-Michel, charmant jeune homme. Mais Jean-Michel ne tarde pas à montrer sa face sombre et entraîne la jeune fille résignée dans une spirale destructrice jusqu’à la prostitution…

Dennis Berry livre une présentation classique, parfois banale et trop manichéenne, de la chute progressive d’une jeune femme. Aussi, le film ne révolutionnera-t-il pas le thème. L’intérêt est contenu, ici, dans l’époustouflante prestation de Marion Cotillard, alors à l’aube de sa carrière, dont le talent crève l’écran malgré l’extrême dureté des scènes de viols et violences corporelles.

 

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ELLES

Film français de Malgorzata Szumowska (2012)

Anne mène une vie banale et jongle entre l’essoufflement de son couple, les questionnements adolescents de son fils et ses contraintes professionnelles. Anne est ainsi journaliste pour un grand magazine féminin. Abordant le thème de la prostitution estudiantine, elle parvient à gagner la confiance de Charlotte et Alicja, fraîchement arrivées de Pologne. Les deux étudiantes parisiennes se livrent progressivement à la journaliste sans pudeur ni tabous. Chacune a leur façon, elles tentent d’améliorer leur quotidien à l’aide d’un gagne-pain plus lucratif et rapide que les traditionnels jobs d’étudiants. Aucune des deux jeunes femmes ne semble vraiment mesurer la portée du commerce de leur corps. Ces témoignages vont bouleverser l’existence de la journaliste et provoquer des suites inattendues…

Libération ou soumission ? La réalisatrice se garde bien de prendre parti dans cette œuvre quasi-construite sur un mode documentaire ; oscillant ainsi entre le quotidien routinier d’une mère de famille et les flash-back évoquant la vie dissolue des jeunes étudiantes. Un remarquable témoignage impudique sur l’intimité féminine, à défaut de tout point de vue féministe.

 

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JEANNE DIELMAN, 23 QUAI DU COMMERCE, 1080 BRUXELLES

Film belge de Chantal Akerman (1975)

Jeune veuve depuis six années, Jeanne Dielman poursuit une morne existence dédiée à l’éducation de son fils âgé de seize ans. Quand celui-ci est à l’école, Jeanne pratique inlassablement, à horaires très stricts, le ménage, la cuisine et les courses. Le midi, Jeanne garde également un bébé. Mais Jeanne exerce aussi, dans le plus grand secret, en tant que prostituée occasionnelle dans la chambre de son appartement l’après-midi. Une vie parfaitement rangée bientôt troublée par une succession de petits incidents qui la conduisent à assassiner l’un de ses clients à l’aide de ciseaux…

Curieux titre que ce film que d’aucuns trouveront exaspérant. Peu de dialogues, peu de son et d’interminables plans fixes capturant le quotidien routinier d’une jeune mère de famille emprisonnée dans sa solitude et un conditionnement atavique.

 

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JEUNE ET JOLIE

Film français de François Ozon (2013)

Isabelle jouit de l’insouciance de ses dix-sept printemps. En vacances sur la Côte d’Azur, avec sa famille issue de la petite bourgeoisie, elle offre sa virginité à Félix, un jeune Allemand, sans qu’elle n’éprouve le moindre plaisir. Rentrée à Paris, Isabelle, bien que ne manquant de rien, prend la décision de se livrer à la prostitution sous le pseudonyme de Léa et multiplie les rendez-vous sur internet. Parmi les nombreux clients attirés par sa beauté et sa jeunesse figure Georges, homme attentionné et d’un certain âge. Mais Georges meurt d’une crise cardiaque tandis qu’ils font l’amour. Paniquée, Isabelle-Léa fuit mais est bientôt rattrapée par la police. Sa famille découvre alors horrifiée qu’Isabelle s’offrait volontairement et en toute indépendance à des hommes contre de l’argent…

Comment une jeune fille peut-elle délibérément s’adonner au commerce de son corps ? François Ozon livre ici un portrait ambigu de la jeune héroïne qui semble dénuée de toute émotion et parfaitement insensible au monde qui l’entoure. Ce manque de communication constitue néanmoins un point faible du film. En rupture avec le monde bourgeois, le portrait de Léa aurait gagné en une explication plus profonde de ce suicide sexuel.

 

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MATRIOSHKI : LE TRAFIC DE LA HONTE

Titre original : Matroesjka’s

Série belge de 20 épisodes créée par Marc Punt et Guy Goossens (2005 & 2008)

Elles sont une dizaine à poursuivre le même rêve : fuir la misère en Lituanie et travailler en Europe de l’Ouest. Ce rêve devient accessible tandis qu’elles participent à un casting pour une compagnie de danse que dirigent deux Belges. Et d’accessible, il devient réel lorsqu’elles sont engagées. Qu’importe de signer un contrat de travail en langue grecque, elles s’envolent pour Chypre ! Chypre dont les plages ensoleillées ne manquent pas de contraster avec la neige de Vilnius. Mais sur place, elles comprennent que la danse s’avère devoir se pratiquer nue… Les jeunes femmes seront ensuite emmenées dans un club de striptease anversois et se verront confisquer leur passeport avant d’être livrées à la prostitution pour rembourser les frais de voyage et de « formation »…

Une fois n’est pas coutume, non un film mais une série trop injustement méconnue. Tirée d’une histoire vraie, cette série évoque pudiquement le quotidien de dix de ces centaines de jeunes femmes contraintes de se livrer à des relations sexuelles dans les clubs de danse belges et néerlandais. Remarquable série !

 

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TOKYO DECADENCE

Titre original : Topâzu

Film japonais de Ryu Murakami (1998)

Pourtant timide, Ai, jeune collégienne japonaise, est une prostituée de luxe qui s’est fait du sadomasochisme et des pratiques fétichistes extrêmes une spécialité pour le compte de riches clients aux mœurs décadentes. Délurée la nuit, Ai se mue le jour en une discrète jeune femme, renfermée sur elle-même et qui poursuit le doux rêve de retrouver celui dont elle est secrètement amoureuse, un homme malheureusement pour elle, déjà marié…

Qualifié par certains de film pasolinien à la nippone, Ryu Murakami développe en filigrane une vision corrosive de la société japonaise perçue comme castratrice, pudique et imprégnée de valeurs patriarcales, contre laquelle certains assument de plus en plus ouvertement des penchants exhibitionnistes et immoraux. Le film ne fait nullement l’économie d’une évocation très précise des rituels fétichistes.

* En italique dans le texte

Virgile / C.N.C.

Crédit photo : DR

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