01/04/2015 – 09h15 Erquy (Breizh-info.com) ‑ A Erquy, Stéphane Domagala, jeune militant Breton très actif au sein des Bonnets rouges, nous informe s’être vu refuser un emploi permanent par le mairie d’Erquy, alors qu’il y travaillait en tant que saisonnier depuis huit années maintenant, deux mois par an. Il dénonce, dans une lettre adressée à Mme Guervilly, maire de la commune, un refus de l’équipe dirigeante en raison de son implication politique, qui n a pourtant jamais porté atteinte ni à la ville d’Erquy, ni à la loi française, plus globalement.
Du côté de la mairie d’Erquy, jointe par téléphone, Mme Guervilly n’est pas de cet avis : « M. Domagala a effectivement eu un entretien d’embauche pour être agent d’entretien. Mais au final, il n a que très peu parlé du poste, et souhaitait visiblement nous parler des ses projets pour la politique culturelle de la commune. C’est un jeune à la recherche d’un emploi, comme beaucoup d’autres. Notre choix de prendre quelqu’un d’autre n a rien à voir avec ses engagements politiques en faveur de la Bretagne. Nous recherchions la personne la plus qualifiée pour ce poste bien précis » nous confie l’édile costarmoricaine, qui souligne que deux personnes dans la famille de M. Domagala travaillent déjà pour la commune d’Erquy avant de conclure : « on ne peut pas tout attendre d’une municipalité simplement parce qu’on y a fait des emplois saisonniers, y compris pendant plusieurs années. Il y a de plus énormément d’entreprises qui embauchent, à l’année ou à la saison, au sein de la commune d’Erquy, particulièrement attractive ».
Nous publions la lettre ouverte que M. Domalaga a adressé, lui qui faisait également la chaîne de télévision BR TV Arzurig.
« Lettre ouverte à Madame Guervilly Christiane, Maire d’Erquy
Madame, cette lettre je vous l’adresse après réflexion.
Vous me connaissez bien, depuis vos mandats et bien avant, comme la plupart des personnes de notre village. Je suis Réginéen depuis l’âge de 12 ans, et bien que je vois les jeunes de ma génération partir et quitter ce petit paradis au bord de mer pour cause de chômage, je me suis pris d’attachement pour ce village et les gens qui y habitent.
J’ai cherché à m’intégrer très vite socialement et professionnellement, et je m’en suis toujours plutôt bien sorti.
Huit saisons estivales sans reproche passées au sein de la commune, avec les employés qui maintenant pour beaucoup sont devenus des amis, et l’hiver, je me débrouillais toujours, entre la criée, la pêche, les relevés de compteurs d’eau, les abattoirs, l’usine … , bref, je voulais tout faire pour rester ici car je sais ce qu’est la chance de pouvoir voir le matin le soleil se lever sur la mer, passant le cap.
On me connaît aussi pour être membre depuis plus de quinze ans de la troupe de théâtre local, et aussi dans d’autres associations, ayant toujours le soucis de m’épanouir et surtout de proposer de l’animation et du rire pour une population qui malheureusement ce sent de plus en plus isolée voir oubliée.
Je vais bientôt avoir 29 ans, malgré ma régularité dans les emplois saisonniers, aujourd’hui il m’est impossible de me projeter et d’avoir un avenir, pas de prêt possible, pas de maison possible, aucune stabilité, une vie sociale impossible à compléter, impossible de me voir en couple, impossible d’imaginer avoir des enfants, impossible de savoir de quoi demain va être fait, je fais rire les autres car je suis incapable de rire moi même.
Pourtant depuis un certain temps il y avait un espoir, celui d’être titulaire pour entretenir les rues, mon chef partait en retraite, d’autres aussi, et j’étais en bonne liste et appuyé par les employés.
Pour certains ce job est qualifié de dégradant, mais pour moi nettoyer les rues, ramasser les papiers au bord de mer vaut plus que dix Smig que d’habiter là où j’ai grandis.
Je me suis passionné pour la Bretagne, pour les bretons, plus que ça, j’essaye de participer à la culture bretonne, j’essaye de m’enrichir l’esprit et chaque jours dans les livres ou dans les relations, je grandis et me sent paradoxalement petit pour ce même drapeau qui flotte sur votre mairie, pour les mêmes raisons qui vous ont fait inviter Gilles Servat dans vos murs, pour la même raison que vous exposez la « marque » Bretagne et le Gwenn ha Du en vantant la coquille du pays, l’histoire , etc.
Pour la même raison que des personnes apprennent a Erquy le breton en cours du soir.
Aujourd’hui, mon amour de la Bretagne est la seule raison pour laquelle la commission a rejeté mon offre…
Je n’ai pas eu de mots quand on me l’a annoncé de vive voix, je me suis senti partir, perdu, seul, écoeuré, triste, en colère … je le suis encore.
Ces projets que j’avais en tête pour enfin me poser , pour proposer et m’investir dans la collectivité par le biais de la culture, la musique , pour faire vivre Erquy, ses gens, ses commerces , pour enfin avoir mon chez moi, et peut être commencer enfin ma vie d’adulte, tout est anéanti .. Pire, aujourd’hui, je dois envisager de quitter mon petit paradis, de ne plus voir le matin les bateaux partir, de ne plus boire un café chez des amis, de ne plus rire, de ne plus faire rire parce qu’aujourd’hui on juge les gens sur ce qu’ils penseraient, ou sur la couleur de leur bonnet…
Si aujourd’hui je suis détruit, c’est bien l’amour de mon pays qui m’aide à me lever et si il n’y avait pas ces personnes qui se battent pour nos drapeaux, pour que la Bretagne ne devienne pas le grand ouest, pour que la Gwenn ha du puisse encore exister, pour que la culture et l’âme bretonne persistent et perdurent …
Je n’aurai pas envie d’ouvrir les yeux le matin.
Erquy est un village magnifique, il restera quoiqu’il en soit dans mes souvenirs.
En vous souhaitant bonne continuation.
A Galon Vat ,
Bevet Breizh , Bevet Erge Ar Mor
Domagala Stéphane »
Crédit photo : DR
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Une réponse à “Erquy. Un jeune Breton en recherche d’emploi écrit à la maire.”
On peut comprendre les deux points de vue. Hélas, le fait d’avoir eu déjà la chance d’obtenir 7 ou 8 ans de suite un emploi temporaire ne donne aucun droit pour une embauche définitive. On ne peut pas tout attendre dans la vie de sa mairie qui a déjà fait beaucoup. On peut comprendre aussi le désir de » neutralité » du maire devant la candidature d’un garçon affiché » bonnet rouge « . Ce courrier nous emmène sur le terrain « affectif » que le droit ne reconnait nullement.
Bien évidemment on ne reste pas insensible non plus sur les arguments très bretons du candidat. Nous aimons tous notre Bretagne ! Mais pour se construire, il faut aussi aller voir ailleurs, ce qui peut être une épreuve temporaire. C’est la vie !