21/03/2015 – 14h00 Nantes (Breizh-info.com) – « Extrême droite : fausses questions, mauvaises réponses ». C’est sur ce thème que la Ligue des droits de l’Homme organisait le 18 mars à Nantes un débat précédé par la projection d’un long documentaire intitulé Bassin miné.
Ce film, réalisé par Edouard Lills-Affif, entend décrypter la stratégie d’implantation du FN à Hénin Beaumont depuis 2003 jusqu’à sa victoire au 1er tour des élections municipales de 2014. S’il montre bien le long travail méthodique et militant entrepris par Steeve Briois « 7 jour sur 7 » depuis une décennie, il est en revanche muet sur les raisons profondes du basculement d’une population ouvrière votant PC et PS depuis près d’un siècle vers le parti de Marine Le Pen.
Sans complaisance avec les socialistes qui ont « perdu le nord », le réalisateur met en cause les médias accusés de s’être « laissés prendre dans les filets de la stratégie de dédiabolisation du Front national » avant de s’attarder sur les longs états d’âme d’une militante du Front de gauche, tenancière d’une friterie locale. Au final Edouard Lills-Affif, qui tenait pourtant un bon sujet, n’aura réussi qu’à réaliser un documentaire caricatural, bien éloigné de ses objectifs d’origine qui étaient de réaliser une œuvre « objective ».
Le débat qui suivit fut par contre très révélateur de l’état d’esprit d’un public – majoritairement composé de retraités de toutes les tendances de gauche – venu en nombre témoigner de son inquiétude. Manque de chance, dès son introduction le meneur des débats ne fit rien pour rassurer son auditoire : « Les choses changent, c’est pas possible, ça s’amplifie, il faut faire quelque chose ! ».
Dès la première intervention le ton sera donné : « dès qu’on regarde les visages des mecs du FN, c’est la guerre, c’est le combat contre Dark Vador » déclare un cinéphile. Vont s’ensuivre des dénonciations répétées contre le PS : – « il a laissé tomber les ouvriers », le Premier ministre « ne s’intéresse qu’aux entreprises », les espoirs de 2012 ont été trahis etc.
Pour d’autres intervenants, figés dans le passé, « le FN c’est la réaction, le défenseur de Balkany (sic) » ou le « fascisme c’est la roue de secours des multinationales ». Plus réaliste : « il n’y a plus de lien, d’échange car le PC n’est plus là au quotidien » ou « on ne peut pas lutter contre la désespérance avec ce système là ». Les plus anciens déploreront que « les jeunes qui votent Marine à 35% n’ont plus de conscience politique, de valeur républicaine …, ils ont sucé (sic) le capitalisme dans le biberon ».
Sur qui compter ? Pour l’un « les ‘assoces’ sont squelettiques, il y a un désinvestissement dans les quartiers », pour un autre « les syndicats roupillent et les travailleurs sont anesthésiés », pour un troisième « les hommes politiques ne s’intéressent plus qu’à l’économie ». Plus cruel, on entendra même un « soulevez le couvercle politicien, la saloperie émerge ». Nauséabond, dirait la bienpensance…
Un parti aux portes du pouvoir ?
La formule revient comme un leitmotiv dans la plupart des interventions. Marine Le Pen peut gagner en 2017 et « il faut tout faire pour que ça n’arrive pas ». Le FN apparait comme « l’idéologie dominante », il a réussi « une remise en cause radicale des idées sur lesquelles on vit depuis 1945 ». Aucun territoire n’est à l’abri « même Saint-Nazaire », remarque un militant réaliste qui ajoute « car le FN y défend une ligne sociale : la justice et la préférence nationale ». Clairvoyant un autre remarque que « le FN gagne car il défend l’identité culturelle dans un monde globalisé ». De ces multiples interventions devenant répétitives il en sortira une conclusion très pessimiste : « Il faut faire vite car on a le dos au mur…. Toutes les organisations politiques sont à reconstruire ». L’exemple grec attire manifestement plusieurs participants, le droit de vote des étrangers aussi.
Le responsable de la Ligue des Droits de l’homme devra interrompre les débats car le ton commençait à monter sérieusement entre défenseurs du PS et militants du Front de gauche. Il réussira finalement à rétablir le calme en présentant une sorte de ligne de conduite militante en cinq points susceptibles de faire l’unanimité : sortir de la peur (!), manifester la présence sur le terrain, réaliser l’unité, créer de nouvelles résistances multiformes, revenir au combat des idées.
C’est le programme d’un nouveau collectif de Loire- Atlantique « Et maintenant pour un avenir solidaire » avec les partenaires habituels , Ligue de l’enseignement, Fédération des amicales laïques, MRAP, CEMEA, le Cercle Condorcet, France Palestine… qui a envoyé un questionnaire à 21 formations politiques (dont l’UMP, l’UDI et même le MPF !). Il faut que l’heure soit grave pour qu’une organisation connue pour son sectarisme – hors de la gauche point de salut – en appelle à des partis de droite.
Cet appel sera-t-il entendu ? Rappelant l’échec de tentatives identiques en 1998, 2002, 2007, 2012, l’orateur ne semblait pas y croire. Est-il trop tard ? « Il ne faut pas désespérer Billancourt », disait-on naguère. C’est toute la gauche nantaise qui apparaissait désespérée ce soir là. Comme à Saint Nazaire elle a le moral dans les chaussettes ! Et ce n’est pas l’Internationale -version bobo 2015 – qui pourrait mobiliser la classe ouvrière…
Clip de L’Internationale version SAINT-DENIS par plaine-saint-denis
Photo : DR
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2 réponses à “Nantes. Face à la montée du FN, la gauche locale a le moral (très) en berne”
J’espère que le FN va faire un carton !
moi aussi